C’est fou comme un endroit encore inconnu il y a de ça quelques mois peut vous paraître rapidement si familier. Cette maison, il s’y sent bien. Réellement bien. La décoration n’est peut être pas cent pour cent à son goût, et il se refuse à aller dans certaines pièces pour laisser à Minjae son intimité, l’argenté se sent néanmoins chez lui. Alors que techniquement et même sentimentalement parlant, rien ne le rattache à cette demeure. Sentiment étrange qui grandit en lui. Taeyang est seul depuis trois jours. Son aîné est partit en séminaire loin de Busan. Ce n’est pas la première fois depuis qu’il a emménagé ici, et certainement pas la dernière. Cela ne le dérange pas, au contraire. Il passe des moments privilégiés avec Sunhi, qui ne cesse de l’étonner de jour en jour. Même si, au fond, leurs discussions du soir lui manquent. Mais ça, jamais il ne l’avouera à Minjae. Le gamin est bien trop fier pour cela. Ce soir là comme souvent, après avoir couché cette petite qu’il garde en échange du gîte et du couvert, Taeyang s’enferme dans la dépendance qui lui sert de logement pour étudier. Il ne voit pas le temps passer. Ses études, il les adore, et il se plonge bien volontiers dedans sans le moindre soucis. Pourtant son ventre finit par se manifester et réclamer quelque chose. Il est tard, un soupire quitte ses lèvres en voyant l’heure. Presque minuit. Ainsi donc le métisse pénètre dans la demeure principale, ses pieds le guidant sans mal jusqu’à la cuisine. Il ouvre la porte, mais au lieu de pénétrer la pièce, il bute contre un corps. Ses yeux se lèvent. Cependant, ils ne se posent pas sur Minjae qui est rentré bien plus tôt que prévu. Mais sur ce couteau qu’il tien à la main. Cette dernière par ailleurs levée – pourquoi faire ? Alors le visage de Taeyang change. Son teint devient blanc, livide. Son regarde se floute. Ses lèvres, puis ses mains, puis son corps entier se mets à trembler. Enfin un cri. Court, strident. De ceux qui vous noue l’estomac. L’argenté tombe au sol. Se collant dos au mur, il se recroqueville autant qu’il se peut. Bras devant le visage, les tremblements continuent de le posséder. Sa respiration est lourde, saccadée, difficile. Tout devient noir.

Minjae gara sa voiture dans le garage de la maison et soupira. Il se posa sur l’appuie-tête et ferma les yeux. Son voyage avait été épuisant. Il savait que ces séminaires étaient importants, qu’il pouvait découvrir des nouveautés et discuter avec des collègues intéressants, mais il avait enchaîné les opérations ces derniers temps et n’avait eu aucune envie de partie et de laisser Sunhi. Il avait l’impression qu’il ne l’avait pas vu depuis des mois alors qu’il lui disait au revoir la semaine dernière. Par chance, le séminaire s’était terminé un jour plus tôt. Ses collègues lui avaient proposé de rester pour profiter d’une soirée de libre tous ensemble mais il n’en avait eu aucune envie. Il voulait retrouver sa maison mais surtout sa fille. Ainsi, il pourrait profiter de la journée de demain pour aller au parc avec elle peut-être ? Et Taeyang pourrait prendre une journée de congé.
Taeyang… Le jeune homme s’était bien trop imposé dans sa vie. Même s’il pouvait le trouver parfois arrogant, voir… étrange à l’observer parfois, il était malgré tout attendrissant. Il avait cette espèce d’innocence dans le regard que Minjae appréciait. Le jeune homme ne se laissait jamais déstabiliser par la répartie parfois cinglante de sa fille. C’était d’ailleurs ce qui l’avait décidé à l’engager. Lors de la rencontre de Sunhi avec le jeune homme, ce dernier avait ri avec elle, l’avait mise à l’aise et ça avait rassuré Minjae. Il avait beaucoup hésité à la confier à un étranger. Il se disait que sa mère faisait très bien le travail et cette dernière adorait sa petite fille du plus profnd de son âme mais elle était épuisée. Entre son travail et s’occuper de Sunhi, elle n’avait plus aucun pour elle et ça lui brisait le coeur. Il avait alors décidé d’engager quelqu’un. Il était réticent à l’idée de laisser quelqu’un d’extérieur entrer dans la vie de sa fille car une idée tournait dans sa tête : et si Sunhi s’attachait trop et était abandonné comme elle l’avait été avec sa mère ? Il ne voulait pas voir sa fille souffrir mais avait décidé qu’il était temps. Il ne pouvait pas laisser Sunhi seule malgré le fait qu’elle était très mature pour son âge : ce serait irresponsable de sa part. Alors il avait eu plusieurs rendez-vous avant de rencontrer Taeyang. Ce dernier avait été parfait avec la jeune fille et Minjae n’en demandait pas plus. Le jeune homme avait bien essayé de lui parler mais l’homme avait été clair : il n’était pas là pour être son ami, il était là pour s’occuper de Sunhi et c’est tout. Ils seraient cordiales l’un envers l’autre, parleraient de Sunhi si nécessaire mais pas de familiarité. Ils n’étaient pas amis : Minjae était le patron et Taeyang, son employé. Rien de plus, rien de moins. Mais il était quand même difficile pour l’homme de garder cette distance quand il voyait parfois l’enthousiasme du jeune homme. Il pouvait parfois se montrer arrogant mais rien d’insupportable non plus jusque là. Taeyang avait piqué sa curiosité mais il préférait garder ça pour lui et garder une distance entre eux deux.

Rouvrant les yeux, il observa le plafond avant de sortir de la voiture tout en attrapant son sac qui se trouvait sur le siège passager. Il se dirigea vers l’intérieur et déposa rapidement son bagage dans sa chambre. Il mit sa veste sur l’un des sièges de la table à manger et dénoua  sa cravate afin de la poser à son tour. Il avait l’impression d’étouffer tellement il était épuisé mais il devait manger avant tout. Il avait envie de manger quelque chose devant quelque chose de stupide à la télévision. Remontant les manches de sa chemise et défaisant les deux premiers boutons de cette dernière, il sortit la planche à découper ainsi que quelques légumes et des morceaux de boeufs. Il commença à les découper quand il se rendit compte qu’il avait oublié de mettre un tablier. Il leva les yeux au ciel, n’ayant aucune envie de le mettre mais ne voulant pas tacher sa chemise, il se dirigea vers la porte de la cuisine, là où il était accroché. Il ne prit même pas la peine de poser le couteau et tendit sa main libre vers l’espèce de porte-manteau mural mais la porte s’ouvrit d’un coup à son grand étonnement. Il sentit quelqu’un le bousculer et recula la main qui tenait le couteau afin de ne pas blesser la personne qui venait d’arriver. C’était déjà arrivé au bloc, parfois avec des infirmières inattentives ou des médecins inexpérimentés. Ils le bousculaient et manquaient de s’empaler sur un scalpel. Il avait développer certains réflexes grâce à ça. Il posa ses yeux sur Taeyang qui observait son couteau levé. Le teint de ce dernier devenait blanc et Minjae fronça les sourcils. Il n’avait jamais vu de couteau avant ? Est-ce qu’à force d’être étudiant, il s’était seulement habitué aux repas tout préparés ? Il secoua la tête et leva les yeux au ciel, sentant que sa réflexion devenait stupide. Il devait réellement être fatigué…

Il se reconcentra sur le visage du jeune homme qui devenait de plus en plus livide au fur et à mesure des secondes qui défilaient. Minjae voulut s’approcher mais remarqua le tremblement au niveau des lèvres, puis des mains et, enfin, dans le corps entier de Taeyang. Il ouvrit la bouche afin de lui demander si ça allait, s’il pensait réellement qu’il allait le blesser avec ce couteau mais il fut interrompu par un cri. Un hurlement court, strident. Minjae sentit l’angoisse lui prendre les tripes. Il observa Taeyang tomber au sol, se collant dos au mur, sans rien faire. Il était trop assomé par la fatigue pour réagir sur le coup. Alors il l’observa se recroqueviller sur lui-même, bras devant le visage et tremblant de manière incontrôlable alors que sa respiration se fait lourde et difficile. Pendant un instant, Minjae reste figé à l’observer avant de poser le couteau sur le comptoir de la cuisine et s’agenouiller devant le jeune homme. Il était doué avec les patients habituellement. Il pouvait gérer ce genre de situation mais là, c’était un cadre différent : c’était chez lui, avec quelqu’un qui connaissait. Il était plus ou moins impliqué émotionnellement et il n’aimait pas ça. Il prit une inspiration et avança sa main avant de la poser sur l’épaule de Taeyang. ”Hé, hé ! Taeyang. Ce n’est que moi, Minjae. Je ne vais pas te faire de mal. Respire, calme toi.“ Son autre main se dirigea vers les cheveux du jeune homme. Il les caressa doucement, essayant de le calmer mais aussi de voir ses yeux. Il essayait de le rassurer mais ne savait pas trop quoi faire. Il ne savait pas comment agir face à quelqu’un qu’il connaissait qui faisait une crise. ”Regarde-moi.“ Il ne vit aucune réaction du côté de son vis-à-vis. Il fronça les sourcils, inquiet. Il prit alors une voix un peu plus ferme. ”Taeyang. Regarde moi.“ Il attrapa la nuque de Taeyang, la massant doucement. Il devait concentrer son attention sur lui, uniquement sur lui.

Depuis quand n’avait-il pas fait de crise ? Longtemps. Bien trop longtemps. Il fallait dire qu’avec le temps, mais surtout grâce à sa déconnexion vécue en France, Taeyang avait appris à vivre avec ses angoisses. Bien sûr il a été suivi durant de longues années par un psychologue. Soigner sa peur des gestes brusque et des objets tranchants ne fut pas facile. Un long chemin complexe, pénible, rude. Il évite autant que possible les situations à risque, et se rendre au coiffeur relève d’un véritable défi. Même si à présent, la chose se passe mieux faute d’avoir toute sa confiance en Chul Hei. Sa cicatrice ? L’argenté en fait une excuse pour draguer. Il s’invente des histoires, plus ou moins farfelues selon son humeur. Mais jamais il n’évoque la véritable origine de cette marque indélébile sur son avant-bras. Alors ce qu’il est en train de vivre à ce moment-là le prend de court. Il n’a pas le temps de se calmer, ou même d’y songer. Son corps entier démontre son traumatisme. Son cerveau s’éteint, et Taeyang laisse les ténèbres l’envelopper. Incapable de discerner la réalité, les mots de Minjae ne lui parviennent pas. Ou plutôt, sa surdité l’en empêche. Il est en effet recroqueviller du mauvais côté. Ce n’est qu’en sentant la main de l’homme dans sa nuque qu’il trouve la force pour bouger la tête. Les yeux remplis de larmes et de détresse, il n’arrive pas à parler. Ses spasmes n’aident en rien sa respiration à se calmer. De ses mains crispées, il parvient péniblement à attraper le haut de son aîné, pour ainsi se coller à lui. Se blottir dans ses bras, comme une bouée de secours. « J-Je... ». L’étudiant ne veut pas fermer les yeux. Car il sait que cette action entraînerait le souvenir du visage de ce collégien, emplit de haine à son égard. « … ent...ends… r… rien…. ». Taeyang a mal. Terriblement mal. À la gorge, à ses poumons, à son cœur, à sa cicatrice. Le silence qui l’entoure le terrifie. Il sait que Minjae lui parle. Il entend les vibrations. Mais rien ne parvient à ses oreilles. La droite essaie-t-elle d’imiter la gauche ? Alors il pleure. Les larmes roulent sur ses joues, ce qui ne l’aide en rien à se calmer. Il a peur.

Minjae pouvait sentir les tremblements du jeune homme contre sa main. Il ne savait pas comment réagir. Quand il était dans son métier de chirurgien, c’était méchanique, logique. Mais là… ça touchait le personnel, quelque chose dont il n’avait pas l’habitude. Mais il essayait de rester concentrer sur le jeune homme. Quand il resserre sa prise sur la nuque du jeune homme, ce dernier bouge la tête. Ses yeux sont remplis de larmes mais surtout de détresse et, sans qu’il ne sache pourquoi, ça brise un peu le coeur de Minjae. Il peut sentir ses spasmes, compliquant un peu plus sa respiration. Minjae veut l’aider à se calmer. Il veut l’aider mais il ne sait pas comment. Le jeune homme finit par attraper péniblement le haut de Minjae qui regarde sa main avant de se figer en sentant le jeune se coller contre lui. Il se sent se blottir contre lui, s’accrocher à lui. Il ne sait pas comment réagir avant d’entendre la voix faible du jeune homme se faire entendre. « J-Je... » Minjae concentre son regard sur le visage du jeune homme. Il ne veut pas le perdre. Il veut lui permettre de se concentrer sur quelque chose, même si ce quelque chose c’est lui. « … ent...ends… r… rien…. » L’homme fronça les sourcils, dans l’incompréhension. Pourquoi n’entend-il pas ? Etait-ce à cause de sa crise ?

Il peut sentir les larmes couler le long du visage du jeune homme, mouillant la chemise du chirurgien. Ce dernier ne sait pas quoi faire alors il referme ses bras sur Taeyang, l’enfermant contre lui. Il espère que ça va le rassurer, le calmer, de sentir une présence contre lui. L’une de ses mains caresse son dos, tandis que l’autre se perd dans ses cheveux. Il plonge son visage dans le cou du jeune homme, posant sa respiration contre lui. ”Je suis là, Taeyang.“ Il resserre sa prise autour du torse du jeune homme. Si ses paroles ne peuvent pas l’aider, il sera là physiquement pour lui.”Respire. Concentre toi sur ma respiration. Je suis là, concentre toi sur moi.“ Il ne sait pas quoi faire donc il préfère être là, espérant qu’’il l’entende cette fois. Il ne comprend pas pourquoi il ne l’entend pas mais il sera là pour lui. Il espère que ce qu’il fera suffira. Il se sent impuissant. Comment faire face à ce genre de comportement ? Quand il se retrouve face à un patient, tout est déjà réglé. Il a juste à prendre le patient et l’opérer. La dernière fois qu’il a dû gérer la psychologie d’un patient, cela date de son internat. Il aurait peut-être dû passer plus de temps face à ce genre de cas…

Dieu qu’il déteste être ainsi. Incapable de contrôler son propre corps. Lui d’habitude ce soleil si rayonnant, emplit de vie, qui vous éblouit. Il n’est en ce moment même qu’une coquille. Un corps faible, vidé, meurtrit. Ses larmes coulent à flot contre la chemise de Minjae, sans qu’il ne soit capable de les arrêter. Il a honte de lui. Paraître faible est l’une des choses qu’il déteste le plus au monde. Mais Taeyang n’arrive même plus à réfléchir tant la douleur qui s’empare de son corps est puissante. Un léger sursaut le prend cependant lorsque les bras de son aîné se referment autour de lui. C’est la première fois. La toute première fois que quelqu’un effectue ce geste envers lui. Alors le métisse se blottit davantage, comme s’il cherchait à se fondre en lui. Les vibrations de la voix du chirurgien se glissent jusqu’à ses os, et petit à petit, il arrive à caler sa respiration sur la sienne. De longues minutes de silence s’en suivent, où les larmes de Taeyang finissent par s’estomper tout comme ses tremblements. Avec le reste de force qu’il lui reste, il parvient à repousser quelque peu l’homme, juste assez pour pouvoir s’essuyer le visage jusqu’alors complètement trempé. Les yeux rougis, il n’ose pas regarder Minjae, bien trop honteux. « Je... ». L’étudiant se pince les lèvres et tente de se redresser. Pour s’enfuir de cette situation bien trop gênante à son goût. Mais son corps est encore trop faible. Ses jambes le lâchent, et il retombe dans les bras de son aîné. Alors, lourdement, Taeyang pose son front sur l’épaule de l’homme. « Est-ce que… vous pouvez parler… ? ». Il n’arrive pas à savoir si sa voix est simplement très basse à cause de sa crise, ou si son oreille encore valide lui fait défaut. Il ne dit rien d’autre, simplement trop épuisé pour expliquer ce qu’il vient de se passer.Il se bien ici, dans les bras de Minjae...

Le silence se fit, seulement coupé par la respiration difficile de Taeyang. Minjae n’ose pas parler. Il ne veut pas déranger le plus jeune par des paroles inutiles. Il attend, patiemment, qu’il se calme. Malgré son angoisse et son coeur qui bat plus fort que d’habitude, le chirurgien arrive à le calmer. Il entend ses larmes se terminer tout comme ses tremblements. Le plus vieux se demande encore comment il a pu se calmer avec ses battements de coeur. Il a l’impression que ce dernier va exploser à battre aussi vite. Il ne pensait pas être si rouillé face aux crises de panique. Il en avait tellement géré quand il était encore un jeune médecin. Comment avait-il pu tout oublier ? Était-il devenu si insensible ? Si inhumain qu’il avait maintenant du mal à empatir avec les autres ? Il ne savait pas mais il pouvait sentir son corps fatigué par la route, son envie de dormir. Son corps en a envie mais son esprit n’est concentré que sur Taeyang. Il n’entend que lui, il ne voit que lui. Il n’a pas le choix et il n’a pas envie de faire autre chose à cet instant précis. Il veut aider le jeune homme. Il ne sait pas comment mais il veut l’aider.
Alors que ses mains continuent de serrer Taeyang contre lui, ce dernier le repousse quelque peu. Il le regarda s’essuyer le visage, sans pour autant relever le regard vers lui. Le chirurgien n’ose rien dire, de peur de dire quelque chose qui pourrait reprovoquer une crise. Alors il attend que son vis-à-vis prenne la parole. « Je... » Mnjae posa son regard sur le visage baissé de Taeyang, l’observant se pincer les lèvres. Il tente de se redresser et l’homme ne peut s’empêcher ses main de suivre le mouvement du plus jeune, de peur qu’il s’écroule à nouveau. Son instinct a eu raison car les jambes de l’étudiant le lâche et Minjae le rattrape, le laisser poser lourdement son front sur son épaule. L’un de ses bras entoure la taille du plus jeune tandis que son autre main plonge dans ses cheveux dans le but de le rassurer. « Est-ce que… vous pouvez parler… ? » Face à la phrase du plus jeune, il fronce les sourcils. Parler ? Pour dire quoi ? Il ne comprend pas… Puis, son cerveau fait le lien avec ce que son vis-à-vis a dit plus tôt : « J-Je… ent...ends… r… rien…. ». Ses yeux s’écarquillent et la main présente dans le cheveux de Taeyang s’active, massant son crâne afin de le rassurer, de lui montrer qu’il est là. ”Je… ne sais pas quoi dire ? Est-ce que tu m’entends ?“ La main présente sur son crâne descend sous le menton de l’étudiant l’aidant à redresser sa tête afin de l’observer. Il a l’air épuisé mais rien d’anormal après une crise de panique pareille. Il peut sentir l’inquiétude le prendre et fronce les sourcils. Il l’aide à se poser contre le mur. ”Ne bouge pas. Je reviens.“ En moins de trente secondes, il revient avec une petite lampe et un stéthoscope qu’il avait dans son bureau. Il s’assoit en face de lui, mettant la lumière dans les yeux du jeune homme tout en levant un doigt. ”Ne ferme pas les yeux, essaye de te concentrer sur mon doigt. Suis le. Essaye à ton maximum. Je veux juste vérifier que tu vas bien.“ On était jamais trop prudent avec ce genre de crise. Il n’a même pas vu si le jeune homme s’était cogné ou quoi que ce soit, donc il préfère vérifier, faire les tests adéquats. Après avoir écouté son coeur qui est rapide mais rien d’anormal, il s’assoit en face de Taeyang qui se trouve toujours contre le mur. Il lui attrape la main, cherchant à le rassurer avant de revenir à la peur de son vis-à-vis. ”Je suis désolé… Je ne t’ai même pas laissé répondre à ma question. Est-ce que tu m’entends ? J’ai préféré vérifier tes signes vitaux avant tout.“ Il n’a même pas attendu que Taeyang lui réponde, comme si ce n’était rien alors que ce n’était pas le cas. Il avait juste eu peur et avait laissé son côté chirurgien prendre le dessus. Il ne voulait pas se montrer insensible, loin de là. Il garda malgré tout l’une des mains du plus jeune dans les siennes, caressant délicatement de ses doigts sa paume. Il voulait le rassurer et savait qu’un contact physique était la meilleure solution.

Il avait presque oublié cette douleur insupportable qui prend l’entière possession de son corps. Cette sensation d’une lame froide qui tranche sa peau, lentement. Le poids si imposant qui presse sa cage thoracique pour l’empêcher de respirer. Quel idiot. Dans ce genre de situations, Taeyang regrette que son ego soit si grand qu’il l’empêche d’expliquer ses points faibles. Car il sait, au fond de lui, qu’il aurait dû parler de son problème à Minjae bien avant. Sûrement pas en détails, mais au moins de sa phobie. Après tout, il est médecin. Il aurait comprit, sans émettre de jugement. Et cette crise aurait sans doute pu être évitée. Mais non. Il n’a rien dit, et le voilà à se montrer sous son profil le plus vulnérable. Et honteux, à ses yeux. Alors c’est d’une petite voix que l’argenté ose demander quelque chose à son aîné. De parler, tout simplement. Pour vérifier l’état de son oreille encore intacte. Car s’il a su surmonter son handicap, perdre définitivement toute audition est sans doute la chose qui l’effraie le plus. Malgré cette main si réconfortante et chaleureuse dans ses cheveux, Taeyang sent que l’homme est perdu. Qu’il ne comprend pas tout. Et il ne peut lui en vouloir. Finalement, sans trop comprendre, il se retrouve en quelques minutes adossé au mur, à subir un véritable check-up. Et, malgré lui, il trouve cela extrêmement touchant. Suivant les indications de Minjae, l’étudiant effectue son test, non sans que ses joues soient rougies. Par la crise ou bien le fait que l’aîné prenne soin de lui. Allez savoir. Et puis sa main se retrouve dans celle du chirurgien, et son cœur se fait lourd. Se pinçant les lèvres, le métisse relève finalement le regard et prend la parole. « Ca va. Je vous entends... ». Prenant une grande respiration, Taeyang ferme finalement les yeux et laisse sa tête se reposer contre le mur derrière lui. « C’est à cause du couteau… Je… J’ai une phobie, de tout ce qui est fin et tranchant. ». Instinctivement, sa main libre se place sur l’avant-bras où sa cicatrice se situe. Comme pour la cacher. Comme pour cacher ce passé qu’il aimerait tant oublier. Il est fatigué, très fatigué, pourtant il sait qu’il doit un minimum d’explications à Minjae. Même si cela est difficile pour lui de mettre des mots sur son histoire. « J’ai… comment dire… plusieurs problèmes. ». Ouvrant les yeux, l’argenté les pose sur sa main qui est toujours placée au niveau de sa cicatrice. Son visage se ferme, et il déglutit. « Ma vie a changé, à la fin du collège. Et… Elle ne sera plus jamais comme avant. ».