Le vent jouait avec ses mèches en même temps qu'il effleurait sa tempe, le volant de sa moto entre les mains, Louka frissonait, se sentait vivant. Si la compagnie des sins était son refuge, l'urbex l'était tout autant, et il était naturel chez lui de partir seul, découvrir l'inconnu, d'explorer.. Il avait quitté son domicile en fin d'après-midi afin de prendre la route direction l'endroit qu'il comptait visiter ce soir. Pourtant, il n'avait pas choisi de se rendre sur un pont en chantier par lui même, mais à cause d'un stupide défi qu'il s'était infligé à lui même, histoire d'amuser sa bande de potes, de prouver qu'il n'était pas si ennuyeux qu'il semblait être. Idiot, tellement idiot de sa part, mais il ne pouvait pas reculer maintenant qu'il avait prit la route.

Pont en ruine qu'on reconstruisait, précipice peu profond où une rivière devait probablement couler avant.. Les joies du réchauffement climatiques.. C'était loin d'être son terrain de jeu habituel, mais il allait tenter de s'y faire. Première étape pour le jeune homme, pouvoir franchir les barrières de ferrailles qui baricadaient la structure. Pieds synchronisés pour vaincre le mur de fer, sa cheville gauche avait manqué de le lâcher durant la courte ascension, mais il tenait bon malgré le fort contrecoup qu'il avait pu ressentir en atterrissant au sol. Louka fit de son mieux pour passer son sac à dos de l'autre côté, sortant son téléphone portable pour enclencher le mode caméra. « J'y suis. » simple parole, vidéo qui montrait la zone qu'il s'empressa de leur envoyer. Prochaine mission, descendre sous le pont, histoire d'avoir une vue du chantier, et surtout, de pouvoir exposer une preuve solide de sa venue ici. heureusement pour lui qu'un vieil entrepôt abandonné ne se trouvait pas loin, ce qui lui permettait de faire d'une pierre deux coups. et pourtant, au moment de retourner en haut, alors qu'il grimpait sans trop de problème, sa cheville flancha de nouveau, le faisant basculer en arrière sans qu'il n'ai le temps de maîtriser quoique ce soit. la douleur l'empêchait de pouvoir se relever, et comme instinctivement, il se mit à mentalement paniquer.


ce n'était pas la douleur qui le faisait hurler, non, mais plutôt la frustration. lui, habitué au luxe d'une demeure hors de prix, bloqué ici, dehors, en pleine nuit. son calme légendaire n'existe plus, juste de la panique alors qu'il tient fermement son poignet blessé, essayant de se relever en vain.

loin de la ville mais pas trop non plus. un juste milieu, quelques jours chez de la famille. seon qui a besoin de souffler, l'université et tout le reste. une pression démultipliée alors qu'il peine à se souvenir des mois avant l'accident, de ces cinq dernières années. tout oublier, tel est son destin devenu tragique. il était heureux avant, c'est souvent ce qu'il se dit. il n'a pas l'impression de l'être particulièrement en ce moment. il y a trop de visages sur lesquels il n'arrive pas à mettre de nom. c'est difficile de retrouver qui est qui, surtout lui.

et seon, il a fui les bonnes attentions pour l'air un peu plus frais. jogging dans le quartier, ses pas qui l'emmènent n'importe où. besoin de retrouver de la force pour continuer le basket. heureusement, son corps n'a pas oublié les gestes fondateurs. il a toujours trouvé fascinant que le physique ne le lâche pas. il court depuis une vingtaine de minutes lorsqu'il est attiré par un entrepôt qui semble désert. curiosité enfantine, qui l'a souvent perdu. il s'approche du lieu sans aucune peur, du moins pas pour l'instant. silhouette dont il profiterait sûrement. ou peut-être que le fait d'avoir frôlé la mort l'avait rendu inconscient. et alors qu'il regarde un peu plus en détail l'entrée du lieu, il entend un bruit sourd. un claquement, contre le sol probablement. barrière du chantier au loin ou juste un bruit sans origine ? non. une voix résonne, c'est celle d'un garçon. ça ne lui dit rien mais la douleur qui provient de celle-ci le fait s'avancer, instinctivement. peut-être qu'il était quelqu'un de bien, avant. et avec la lampe de son téléphone, il s'avance en direction du bruit entendu. nouvel écho et après avoir marché, il arrive rapidement face à un garçon. corps allongé par terre, les traits dont l'harmonie est brisée à cause de la douleur. « oh merde. » des mots plus par réflexe qu'autre chose.

seon s'approche sans crainte et s'accroupit à ses côtés. il le voit tenir son poignet et la panique dans ses traits. « tu penses qu'il est cassé ? » qu'il demande au garçon, pas le temps pour les présentations. jogging nocturne bouleversé, sans qu'il ne s'y attende. « tu as mal ailleurs ? » questions qui s'enchaînent, seon qui tente d'aider après l'avoir été.