ft @Lee Soo Hyun

“Un des plus grands bonheurs de cette vie, c'est l'amitié ; et l'un des bonheurs de l'amitié, c'est d'avoir à qui confier un secret."

Mes mains caressent la glaise, essayant de délivrer sur cette matière noble les émotions qui caressent mon cœur. Depuis que je suis revenue à Busan, je suis ballottée par les ressentis. Tout se mélange, les souvenirs du passé et les instants présents. Un coup teintés de rires, et puis colorés de larmes. J'ai la sensation d'être un grain de sable qui subit des vagues à longueur de journée. Compliqué de garder le cap, même si j'ai milles choses à penser. Milles choses censées occuper mon esprit. Mais il y a ces temps morts ou le silence se fait roi et ou tout devient trouble. Ou je voudrais trouver une épaule pour me poser et tout simplement parler. Dire ce que j'ai sur le cœur, ne rien cacher.
Alors que ma vie se tisse à un mensonge.
Et parfois je regrette de ne pas le dévoiler. Et puis il y a toujours mon cœur qui vient frapper ma poitrine selon où je passe, quand des lieux me ramènent à nos moments à deux. A cet amour fou et fort que même après quatre ans j'ai du mal à oublier. En revenant dans ma ville natale, j'y ai vu l'espoir mais l'espoir c'est éteint et jamais il ne se rallumera. N'importe comment je tourne le problème Jihun fait parti de mon passé, c'est définitif et rien ne changera cette vérité là. Et j'en rage que se soit encore douloureux. Comme si la plaie était ouverte.
Accueillant chaque faiblesse.
Et mes mains travaillent la glaise, sculptant un autre visage, le sien c'est effacé depuis longtemps. Enfin c'est ce que je me laisse penser. Et pourtant parfois il revient. Vagues éternelles contre lesquelles je ne peux lutter. Féroce vérité qui me ronge. Et j'en rage encore plus me disant que j'aurais pu avertir Soo Hyun de ma venue. Mais le passé aurait été encore plus présent, plus pesant. Et pourtant  ..
Ensemble on était fort.
Ensemble on était complice.
Et là j'ai juste la solitude pour amie.
Mon secret m'éloigne de ceux qui comptent.
Ma souffrance fait barrage à ma vie.

Je finis par jeter l'éponge, rien ne vient. Rien ne naît de mes mains fatiguées, épuisées. Ma tête n'est pas à créer. Mon cœur est juste vide et mon esprit ne peut se nourrir de ce vide. Besoin d'espace, de recharger les batteries. De voir d'autres horizons, de replonger dans mon passé, d'effleurer mes souvenirs et tant pis si j'en souffre. Alors je me change, enfilant un jean et un pull, des ballerines. Mon blouson sur l'épaule et mon sac à la main, je sors. Me laissant guider par mon instinct. Pas de but précis. Juste un besoin fort d'oxygène et de bruits. De gens qui bougent, de vitrines colorées, de vie.
Au final je ne fais que mourir à petit feu depuis quatre ans.
Et de fil en aiguille, les rues de la ville défilent et des idées se dessinent. Je m'arrête parfois sur un banc pour les noter sur mon carnet toujours précieusement rangé dans mon sac. Avant de repartir vers une nouvelle rue. J'ai bien sur depuis mon arrivée notée des changements, des boutiques aux nouvelles enseignes, des immeubles battis, des maisons oubliées. Et puis il y a ces endroits inchangés, ceux que je fréquentais dans le passé. Certains ont évolue, d'autres ont gardé la saveur de mes souvenirs. Les larmes parfois arrivent aux coins de mes yeux.
Nostalgie qui berce la femme que je suis devenue.
Et qui me montre que ma douceur, ma joie de vivre s'est envolé, faisant place à la mélancolie, la tristesse. Est ce qu'un jour mon sourire ne sera plus forcé ? Question encore sans réponse. Surtout quand je me retrouve tous les jours face à Griffin avec qui je dois bosser et qui ne fait voir ce visage tant aimé. Même si je sais qu'il n'est pas celui qui a fait de moi une femme.
J'ai toujours cette saveur amère quand il me fait face.
Saveur qui valse entre mes lèvres.
Ouvrant à nouveau la plaie.

Et puis sans même le réaliser je me retrouve dans Busanjin District. Endroit béni de mon adolescence. Et une nouvelle fois le souvenir de Soo Hyun revient. On a gardé contact malgré mon absence, j'aurais du trouver le courage de lui dire que j'étais là. C'est comme un arrêt sur image, je me fige devant une devanture et je nous vois assis côte à côte en train de rire. De plaisanter d'un rien. Comme deux gamins innocents des lendemains.
On était bien. On avait des rêves.
Et pas de peur, ni de douleur.
Et je reste là presque incapable de bouger.
Sourire sur les lèvres.
Que c'est doux de penser à ces instants envolés.
Et là alors que mon esprit vagabonde dans les images du passé, j'entends mon prénom. Comme si la voix de Soo Hyun sortait de mon esprit. Comme si le rêve devenait réalité. Je souris un peu plus, me trouvant idiote sur le coup. Et je me tourne. Un homme avance vers moi et nos regards s'accrochent. « Soo Hyun. » Je ne sais pas si le son est sorti de mes lèvres. Tout s'arrête autour de nous. Comme si le présent n'existait plus. « Soo Hyun c'est toi ? » Hésitation dans la voix, même si son regard m'interpelle. Les gens changent en quatre ans. Parfois ils perdent leurs âmes et l'éclat dans leurs yeux. Les miens ont si souvent été rongés par les larmes qu'ils ne brillent plus. Et même si je souris, mon cœur lui pleure. Pourtant voir mon ami provoque une douce chaleur.
Parce que les doutes disparaissent alors qu'on avance l'un vers l'autre.
Parce que même si quatre années sont passés, il reste le même.
Et cette idée réchauffe mon cœur.
Coeur mis en hiver à longueur d'année.  
 

ft @Lee Soo Hyun

“Un des plus grands bonheurs de cette vie, c'est l'amitié ; et l'un des bonheurs de l'amitié, c'est d'avoir à qui confier un secret."

Dehors je laisse mon esprit vide se remplir d'essence vitale. J'ignore si ces couleurs, ces bruits, ces mouvements m'aideront dans mes prochaines créations. Mais au moins ce brouhaha et cette agitation effacent momentanément cette sensation de vide pesant. J'ai toujours aimé me balader dans Busan, traîner dans les quartiers, seule ou en compagnie de mes amis, faisait parti de mes passes temps favoris. C'était plus souvent en compagnie de présences masculines que féminines. Les filles me donnaient l'impression d'être jalouse de moi.
Sans trop que je comprenne pourquoi.
D'ailleurs même encore aujourd'hui cette pensée me fait sourire. Je n'ai jamais rien eu de spécial. Peut être une sensibilité plus profonde. Ce qui encore aujourd'hui est d'actualité vu mes ressentis. Je m'en veux un peu d'avoir abandonné ma terre glaise, juste parce que l'inspiration ne voulait pas venir. J'aurais pu insister, partir sur d'autres pistes. Mais j'ai préféré lâcher prise et sortir. Au final je ne le regrette pas. Car je redécouvre la ville qui m'a vu grandir sous un nouveau jour. Mes émotions exaltants un peu plus tout ce qui me caresse. Elle semble par endroit avoir été figé dans le temps et dans d'autres ces quatre années passées, ont agi comme si le double voir le triple de temps s'était écoulé. C'est assez bizarre comme sensation. Mais au moins je me sens mieux et je remplis mon esprit d'idées nouvelles.
Verront-elles le jour ? Je l'ignore.
Mais je les dépose sur mon carnet, sachant que tout est bon à prendre quand on joue avec la création. C'est ce qui est intéressant dans mon métier, les journées ne se ressemblent pas, elles apportent leur lot de réussite mais aussi d'échec. L'essentiel étant de toujours de tirer profit de tout ce que je vois. De toute ce qui m'entoure. De tout ce qui fait ma vie.

Et au final je finis dans un endroit qui m'est familier et un tas de souvenirs me reviennent en mémoire. Le temps semble plus doux d'un coup. Mon cœur est apaisé de penser à ces moments du passé. Moi qui en principe en souffre. Là tout n'est que tendresse et envie de retrouver sa compagnie. L'envie est si forte que j'entends sa voix. Mon prénom résonne hésitant. Je me dis que mon imagination est vraiment trop fertile, elle aurait pu être aussi productive quand j'avais les mains dans la terre. Mais cette voix est si réelle, trop réelle que je me retourne.
Et en plus de la voix, il y a la silhouette.
La silhouette de Soo Hyun.
J'ai du mal à croire que tout soit vrai. Tellement du mal que je me demande si j'ai bien prononcé son prénom. Tellement du mal que je m'en frotterais bien les yeux si je n' étais pas en pleine rue. Mais la sensation de réalité se fait plus présente quand il s'avance. Quand on se trouve face à face comme cela nous est arrivé mainte fois dans le passé. A cet endroit même. Nous étions juste moins hésitant c'est certain. Et je le regarde, il n'a pas trop changé. Je souris ayant envie de le toucher pour bien m'assurer qu'il est là. Qu'il n'est pas une projection de mon esprit.
Et puis il y a ces questions.
Et sur le coup mon cœur se serre un peu. Beaucoup même. J'aurais du le prévenir. Lui dire que j'allais revenir. Plutôt que de donner le champ libre au hasard de nous mettre en présence dans un quartier qui a souvent abrité nos rires et nos larmes. « Depuis peu  … enfin quelques semaines. » Je baisses les yeux gênée de ne pas l'avoir prévenu. « A vrai dire tout c'est fait très vite. » Menteuse, que je suis vu qu'une exposition se prépare un bout de temps à l'avance. « Je suis là pour le boulot .. et c'est compliqué .. d'où le fait que je ne t'ai averti de ma venue .. »
Comment m'enfoncer un peu plus.
Je relève les yeux. Et ma main vient naturellement prendre la sienne. « Désolée, mais je ne pouvais pas parler .. enfin pas par téléphone ou par messagerie .. » Ce qui est faux car je sais que je pouvais éviter de lier l'exposition de Phoenix à ma venue, c'est juste que l'idée de mentir à Soo Hyun me crever le cœur. Comme de mentir à Shin. Le regarder en face aurait été plus difficile. Mais je fais quoi là. « Entends si on commençait par le début. » Et je viens l'enlacer et lui faire la bise.  « Je suis contente de te voir, même si tu dois penser le contraire vu que je ne t'ai pas dis que je venais à Busan. » Je souris. « Tu vas bien ? » Je le regarde pour m'en assurer même si je sais qu'il est facile de cacher ce que l'on ressent. « Est ce que tu as un peu de temps ? On pourrait s'installer à une terrasse de café pour parler. Enfin si tu veux bien sur. » Je comprendrais qu'il m'en veuille, mais je lui dois une explication.
Reste à savoir si elle se drapera de vérité ou de mensonge.  

ft @Lee Soo Hyun

“Un des plus grands bonheurs de cette vie, c'est l'amitié ; et l'un des bonheurs de l'amitié, c'est d'avoir à qui confier un secret."

Questionnement dans le regard.
Avant même que la phrase ne vienne effleurer les lèvres de Soo Hyun. Et je ne peux lui en vouloir de me la poser. A cet instant c'est à moi que j'en veux. Je n'aurais jamais du garder le silence sur ma venue dans ma ville natale. Mais voilà je ne savais pas comment lui annoncer et surtout il a toujours ce poids du secret que je porte et que je garde. Je suis Phoenix et même mon meilleur ami ne le sait pas. Au fond cela me fait souffrir de ne pas dévoiler cette part de ma vie. A croire que je manque de confiance même dans les personnes qui me sont proches. Alors que Soo Hyun ne m'a jamais trahi, même éloigné le contact est resté.
Alors pourquoi ?
Pourquoi je garde le silence ?

Et quand je lui donne ma réponse, je reste évasive prétextant qu'expliquer est compliqué. Idiote que je suis. Qu'est ce qu'il serait compliqué à dire à Soo Hyun que je sculpte sous l'identité de Phoenix ? Même si je ne veux pas que la relation entre elle et moi soit faite pour le moment. Il comprendrait et accepterait de ne rien divulguer. J'en suis sûre. Et le seul mot qui sort de ses lèvres est un oh. Comment dois-je le prendre ? Sur le coup je reste perplexe.
M'en veut-il un peu ?
Voir beaucoup ?
J'essaie de cacher toutes mes craintes et de reprendre mon rôle de l'amie heureuse de le voir et de retrouver une tête connue dans cette ville qui par moment me semble étrangère. J'ai évolué sans elle et elle a en fait de même. Et à présent que je foule à nouveau son sol, un fossé semble se creuser. Certainement une sensation du à cet instant. Je me reprends voulant profiter pleinement des secondes qui me sont offertes. Et je m'excuse de cette faute qui j'espère sera pardonnée. « Si un peu. Et c'est normal, je l'aurais été si les rôles avaient été inversés. » Avant de revenir sur l'essentiel que la surprise a fait oublier. « Je  vais très bien. Heureuse de me retrouver à Busan .. et que le hasard te mette sur ma route. » Parce qu'au fond c'était le plus important à cette seconde. Soo Hyun a toujours beaucoup compté dans ma vie. Les instants qu'on a partagé sont des souvenirs précieux dans mon cœur. Le revoir me fait énormément plaisir.

Et c'est naturellement que je propose, s'il le désire, de prolonger ces secondes données par le destin. On pourra parler de tout et de rien. De nos avancées dans la vie. Est ce que j'en profiterais pour dire pour Phoenix ? Je l'ignore encore. Tout semble si difficile quand je souhaite aborder ce côté de ma vie. Alors qu'il n'y a rien de plus simple à dire. Peut être parce que ce choix est trop lié à une douleur. Et mon sourire se fait plus grand quand il accepte de me donner un peu de son temps. Je me doute qu'il est autant précieux que le mien. Mais notre amitié vaut bien ce petit sacrifice. On pourra parler du bon vieux temps. De ce temps ou l'insouciance de l'enfance et de l'adolescence berçait nos pupilles d'une flamme intarissable.
Flamme qui pourrait renaître durant cet échange.
Et tant pis si ensuite elle disparaît.
« Parfait alors. Je suis contente de pouvoir un peu parler avec toi. » J'ai tellement de choses à raconter. Et tellement de choses à passer sous silence. Un duel alors s'engage dans ma tête. Dévoiler mon secret ou bien le taire encore . Et on commence à marcher à la recherche d'un endroit où se poser pour discuter. « Il y a un bar juste là. On y va ? » Et en quelques pas on passe la porte et on s'installe dans un coin tranquille. « Tu veux boire quoi c'est moi qui invite. » Je lui dois bien ça. J'espère au moins que Soo Hyun ne pense pas que je ne l'aurais pas contacté durant mon séjour. A être arrivée sans rien dire il peut s'imaginer que je saurais partie sans le contacter. Et cette idée me serre le cœur, car je comptais bien le contacter une fois tout mis en place. La préparation des expositions est toujours un casse tête chinois, surtout que les œuvres voyagent. « Je m'excuse encore de ne pas t'avoir averti. Je voyage pas mal en ce moment pour mon projet et c'est toujours compliqué de tout organiser quand je passe d'un pays à l'autre. Je ne dois rien laisser au hasard sinon cela pose des problèmes. Et peut tout compromettre. Du coup j'ai la tête prise par l'organisation et j'oublie l'essentiel. Mais je ne serais pas partie de Busan sans te voir. » Je lui souris et pose ma main sur la sienne. « Tu m'as manqué. » Parce que les contacts par téléphone c'est cool mais cela ne remplace pas la chaleur d'un échange, d'une présence.