✦ Prudence oubliée.

Les liqueurs fusionnent avec le sang, comme bien trop souvent, à croire que gamine ne trouve son compte qu'au fin fond des abysses de la bêtise. Elle est si imprudente, si insouciante, à se bourrer la gueule avec n'importe qui n'importe quand, sans jamais prévoir quelque part où passer la nuit. Elle joue à des jeux dangereux Billie, car elle aime se penser entourée, se mélanger au reste du monde comme si chacun d'entre eux était son ami. Elle a de la chance qu'on ne la déteste pas, Billie, et elle a de la chance de l'avoir lui aussi, pour la sauver de ses situations, pour répondre « j'arrive » à chaque fois qu'elle l'appelle, à n'importe quelle heure de la nuit, pour qu'il la ramène chez elle. Le groupe s'est étiolé depuis belle lurette, personne ne se sentant concerné par l'état de la jeune artiste, ils s'en sont allé, le cœur léger, car les considérations ne sont que futilités, le fruit d'une alliance sociétale sans grande profondeur, juste parce que c'est plus cool de traîner avec beaucoup de gens. Billie, elle a des amis tout de même, de très bons amis d'ailleurs, mais elle aime aussi passer son temps avec des gens qui, dans quelques années, n'auront même plus de trace dans son esprit.

Elle a les fesses assises sur la chaise en plastique de l'échoppe encore ouverte d'une vieille dame qui ne s'occupe plus d'elle. Un verre d'eau, une place assise, elle a au moins eu le droit à ça, alors elle ne se plaint pas, de toute manière, elle trop ailleurs pour s'offusquer d'un quelconque traitement. Son corps vacille de droite à gauche, elle peine à rester stable, le monde devant ses yeux tourne bien trop pour qu'elle se relève, alors elle a dû sortir son téléphone, pour la troisième fois cette semaine, elle l'a appelé lui, le suppliant sans scrupule de venir la récupérer, car tout le monde est parti et elle ne sait pas où aller.

Car il n'y a que toi pour me sauver,
Que toi pour m'arrêter.

Elle patiente, sagement, les étoiles comme seules compagnes, et elle chantonne, un air de sa nouvelle composition. N'importe qui pourrait décider de passer et de s'arrêter pour lui chercher des noises, mais Billie n'a pas la notion du danger, elle se croit trop souvent en sécurité, car de toute manière, il ne tardera pas. À trop compter sur les autres, gamine risque de se retrouver bredouille, le jour où les astres cesseront de s'aligner. Une silhouette au loin, elle se dessine sous la lumière des lampadaires, et plus elle avance, plus elle la comprend. Billie redresse un visage tout sourire vers la figure de son meilleur ami, l'air débile, comme à chaque fois qu'il vient la récupérer. « Dawwwn ! Amour de ma vie, le seul et l'unique. » Déclare-t-elle, sans peser le poids de ses paroles. Le verre d'eau s'échoue lamentablement au sol, il était presque vide, alors elle ne s'en occupe pas. Ses bras tendus vers lui, elle veut qu'il la soulève, qu'elle puisse enfouir son visage dans les plis de ses habits, en oubliant comme toujours, qu'il est réticent face aux preuves d'amour.

✦ lassitude.
et les chairs brûlantes se percutent, et les soupires se perdent, et les regards s'échangent. il y a même des sourires, ou quelques jurons soufflés au creux des cous, des coups de dents et des baisers voraces. les oscillations n'en finissentnt plus, la voix éclate dans des poussées aigues, et bientôt les étoiles sont atteintes , avec toujours la même adresse, le même savoir faire. ce soir une de ses clientes les plus habituées a trouvé au creux de lui toute satisfaction, comme d'habitude. et il joue dawn, il joue si bien la comédie. lui fait miroiter qu'il est heureux de la voir, qu'il prend son pied tout autant qu'elle. pourquoi pas la laisser croire qu'il est épris d'elle aussi, si ça peut lui faire plaisir. elle n'est qu'une pauvre quadragénaire lassée de son quotidien d'épouse d'un homme important qui n'a plus de temps à lui acorder, ne se sent plus désirable après avoir mis au monde deux enfants, alors c'est dans les bras des gigolos qu'elle s'enfuit retrouver les frissons de sa jeunesse. dawn la connait bien, elle loue ses services depuis plusieurs années maintenant, et quand le mac l'envoie chez elle, il accepte presque à chaque fois. même si ça l'écoeure de se taper une cougar, au moins il sait qu'elle, elle est réglo.

les ébats sont achevés, pourtant le temps pour lequelle elle a payé n'est pas encore écoulé. il reste au moins une bonne demi-heure. alors elle fanfaronne autour de lui dans cette chambre d'hotel, l'invitant à aller prendre une douche avec elle. ah, il ne pourra sûrement pas y couper... pense-t-il alors qu'il espérait qu'elle tienne plus longtemps pour pouvoir se casser dès qu'il aurant fini. mais le voilà à se retrouver tiré de force vers la salle d'eau par sa cliente, sans avoir eu le temps d'enfiler un calciffe. et il aimerait une échappatoire, une bonne raison pour éviter de sentir ses ongles manucurés sur sa peau, pour ne pas avoir à lui laver le dos, une bonne raison, une excuse, n'importe quoi...

dring dring.

le son spécifique d'une sonnerie d'appel retentit de la poche de son pantalon échoué quelque part dans la pièce. alors c'est presque trop précipitemment qu'il se défait de l'étreinte transpirante de sa cliente pour s'en aller décrocher, pensant que c'est probablement son mac qui l'envoie déjà ailleurs pour finir la nuit. mais non. le nom qui s'affiche sur son écran le fait rouler les yeux au ciel. vu l'heure, pas la peine de se demander pourquoi elle l'appelle. il soupire et décroche, lui demandant simplement où elle se trouve d'un ton sec, ne prenant même pas la peine de s'inquiéter de son état ou de la questionner sur quoi que ce soit. il sait parfaitement qu'elle l'appelle parce qu'elle a besoin de quelqu'un pour la conduire chez elle et qu'y a que lui qui est assez con pour le faire. alors après avoir raccroché, il enfile rapidement son calbute et son falzare, puis s'approche de sa cliente pour s'excuser avec élégance, de caresses, baisers et sourires, lui promettant qu'il restera la prochaine fois mais qu'il a une affaire très urgente à régler. et ainsi, c'est en renfilant son haut qu'il sort de la piaule. presque en courant, parce qu'il le sait, elle a besoin de lui.

heureusement pour une fois elle n'est pas très loin de là où il est, ça lui évitera de se faire toute la ville à pince. non parce que la dame a tendance à oublier qu'il a pas de véhicule et que chaque fois qu'il la ramène, c'est sur son dos. les pas précipités ralentissent alors qu'il l'apperçoit de loin, avachie sur sa chaise à parler toute seule en fixant les étoiles à peine visibles. ah... quand il la voit, il sait au fond de lui, qu'il n'y a qu'elle pour qui il ferait ça. quand il la voit là comme ça, l'air si vulnérable, il sait qu'il tient bien trop à elle. combien de fois a-t-il songé à mettre de la distance entre elle et lui, quand ces palpitations bien trop élevées en sa présence le faisaient trop flipper. pourtant il est là, pour la troisième fois cette semaine, à se planter devant elle d'un air indifférent, les mains dans les poches. il est là à la fixer alors qu'elle chancelle, à l'écouter beugler et lui réclamer des calins, à l'appeler l'amour de sa vie alors qu'elle en pense pas un mot. "ouais, ouais. t'abuses billie bordel, j'étais avec une cliente." il prend la peine de lui spécifier, comme s'il cherchait à lui faire prendre conscience qu'il se fout dans la merde pour elle. alors qu'au fond il sait bien qu'elle s'en souviendra pas.

d'un geste de la main il repousse le câlin réclamé, n'aimant déjà pas rendre les étreintes en tant normal, mais encore moins à une billie totalement beurrée. non à la place il s'accroupit devant elle, lui offrant toute la largeur de son dos en appui. "magne toi, j'ai pas toute la nuit." il gronde et patiente, jusqu'à la sentir s'avachir totalement sur lui comme un poids mort. puis il se redresse, remercie vahuement la gérante de l'échoppe d'un geste de la tête pour avoir pris soin d'elle en l'attendant, et le voilà qui prend la route de la demeurre de son amie.
encore une fois.

✦ Poussière d'étoiles.

Et sous ses airs boudeurs, Billie sait qu'il y a du soulagement, de la satisfaction presque, d'être ce héros pour elle, ou bien c'est sa confiance qui lui parle, cette confiance qui la rend trop aveugle, qui la fait avancer sur le chemin de sa vie avec des œillères, ignorante de tout ce qui pourrait la briser, tout comme de ce qui pourrait la sauver. Et si elle ne voit pas ses propres angoisses, comment verrait-elle l'amour que Dawn semble lui porter ? Billie, elle aime être ignorante, elle aime sa bêtise, sûrement parce que ça lui permet d'accepter les difficultés avec plus de facilités. Les leçons jamais retenues, de ces soirées trop alcoolisées où les tripes ont fini par se vider là où elles le pouvaient, où la tête s'est mise à sonner au point d'vouloir s'en arracher le crâne, où les black-outs étaient si violents qu'elle finissait par en être angoissée. Elle ne retient rien, Bina, et elle l'appelle, lui, à chaque fois, sans imaginer qu'il puisse un jour être fatigué, être occupé, car elle ne voit souvent pas plus loin que le bout de son nez.

T'abuses Billie...

Ouais putain elle abuse Billie, mais ce soir ça ne rentrera pas plus qu'hier, pas plus que demain. Elle recule, redresse un regard offensé vers le brun. « Me dis pas que t'avais plus envie de rester avec ta cliente que de venir me voir Dawn. » Répond-elle trop sérieusement. Et puis son sourire idiot vient rallumer son visage, elle lève les bras, quémande encore des câlins, lorsque lui n'a certainement pas envie de la prendre dans ses bras. Elle chouine comme une gosse à qui on a refusé sa sucette, mais lorsque le dos de son ami se présente à elle, ses gémissements se transforment en gloussement. Elle s'affale sans prendre garde, enfouie son visage rougi dans la nuque du garçon afin de s'imprégner de cette odeur qu'elle aime tant sans savoir encore qu'elle compte plus que les autres. « Je suis contente de te voir ce soir moi... » Marmonne-t-elle en ayant la sensation que sa bouche pèse trois tonnes.

Ses jambes croisées encerclant le buste du jeune homme, elle se cramponne, ferme les yeux, le marchant de sable agitant déjà son tamis au-dessus d'elle. Les pas de Dawn pour la bercer, les étoiles pour la rassurer, elle se sent en sécurité, voudrait que le monde s'arrête de tourner, ou bien, c'est sa tête qui commence à l'importuner. « Pfft... J'aurais pas dû boire autant... C'était même pas drôle en plus... » Lâche-t-elle sans réfléchir, oubliant qu'elle n'est pas seule. Billie n'avoue jamais avoir passé une mauvaise soirée. Elle déteste qu'on pense qu'elle ne s'amuse pas à chaque fois. Elle aime passer pour une fille simple qui s'entend avec tout le monde, mais au fond d'elle Billie sait, que tout n'est qu'une joyeuse comédie, qu'en réalité, il n'y a que peu de gens sur qui elle compte vraiment.

✦ oscillation.
et son pauvre corps chancelle encore lorsqu'elle s'écrase de tout son poids contre lui, manquant encore une fois de le faire basculer sur le côté. car elle fait jamais attention à rien billie, et elle oublie toujours tout, comme le fait qu'il est pas si musclé que ça, et qu'il s'est déjà plus d'une fois cassé la gueule en essayant de la porter. comme elle se souvient jamais qu'il est pas véhiculé, ou de ce qu'il peut bien lui dire ou lui faire, lui reprocher. il pourrait lui dire toutes les horreurs du monde que le lendemain reprendrait comme si c'était jamais arrivé. et elle se complait dans son oubli, elle se complait dans son ignorance de tout, dans sa naïveté, dans son incompétence. il le sait dawn, il la connait. pourtant il continue de lui dire qu'elle abuse. il continue d'essayer de lui faire comprendre qu'elle est pas le centre de son univers - ou alors c'est lui qui essaye de s'en convaincre.

ses yeux roulent vers le ciel étoilé quand l'effrontée lui fait remarquer qu'il est bien mieux ici qu'avec sa cliente. et si elle a pas totalement tort le sujet porte quand même à débat. certes il est mieux partout ailleurs qu'en train de se faire tripoter par une quadragénaire malsaine qui a un faible pour les jeunots. mais trimbaler une billie bourrée est pas non plus le plus grand de ses kiffs. "au moins ma cliente me fait pas traverser la ville à pied en la portant sur mon dos." il lance sèchement parce qu'il reconnaitra jamais qu'elle a raison. parce qu'il reconnaitra jamais qu'une infime partie de lui se satisfait d'être toujours celui qu'elle appelle, d'être son héros, son sauveur. qu'il apprécie d'être indispensable à quelqu'un, lui dont l'existence ne sert qu'à assouvir les désirs inavouables des autres. c'est sûrement pour ça qu'il continue à venir. tant qu'il vient, elle l'appelle. tant qu'il vient, il compte pour elle. tant qu'il vient, elle l'abandonne pas.

pourtant il admettra jamais que lui aussi est content de la voir malgré tout - même si elle est complètement torchée, même si elle s'en souviendra peut-être même pas demain. après tout à chaque fois il la pose dans son lit et se barre, est-ce qu'elle sait au moins chaque matin comment elle est rentrée chez elle ? peut-être qu'elle pense être arrivée là par magie. elle pense peut-être même pas ce qu'elle dit, et dawn se risquera jamais à une réponse sincère à un aveu qui l'est pas forcément. son âme trop fragile pour se mettre à nue. alors il se protège, se cache derrière des piques cinglantes, pour que jamais elle puisse comprendre. "j'te jure que si tu me gerbes encore dessus j'te laisse là."il vocifère en la sentant flasque et nauséeuse, il menance pour tenter de la faire réagir. en vain encore.

ses pas gardent le rythme soutenu alors qu'il traverse les rues qu'il connait par coeur à force de la trimballer à travers toute la ville, ignorant les regards intrigués ou pleins de jugements qui se posent sur eux, ces regards qui doivent se demander pourquoi ils peuvent pas juste appeler un taxi. il l'écoute pleurnicher et se laisse surprendre par sa complaite, elle qui raconte toujours s'éclater et passer de bonnes soirées. "t'as bu autant parce que tu t'emmerdais ?" une question, enfin ; peut-être peut-il bien se risquer à lui donner un peu de son attention. après tout elle l'acapare déjà complètement. alors il la laissera lui raconter ce qui s'est passé pour une fois, tandis que sa marche s'ouvre petit à petit sur le quartier où elle réside.

✦ Poussière d'étoiles.

Les habitudes adoptées trop facilement, trop légèrement, à ne plus hésiter à chaque message envoyé, car pour elle, il est là, est tant qu'il est là, Bina l'appellera, car c'est avec lui qu'elle se sent en sécurité, c'est sur lui qu'elle pourra toujours compter. Lorsqu'il la menace de la lâcher, Billie sert un peu plus ses bras autour du garçon, grognant son mécontentement avant de souffler lourdement. « Si tu me lâches Dawn, je me mets à pleurer fort fort fort pour t'embarrasser. » Et s'il la connaît un peu, il saura qu'elle en est tout à fait capable. « T'as pas le droit de me lâcher, j'ai que toi, tu sais ? » Et ses paroles cachent bien plus que du sarcasme cette fois.  

C'est toi et moi,
contre le reste du monde.

Bercée par le rythme lent de son ami, elle se laisse aller à quelques révélations qu'elle garde d'ordinaire pour elle-même. Et lui ne laisse pourtant pas passer ses mots aussi simplement, car il est attentif, alors il saisi l'occasion et lui pose sa question. Bien sûr, Billie est trop ailleurs pour réaliser qu'elle s'apprête à lui avouer qu'elle s'est emmerdée, alors elle grogne à nouveau, enfoui son museau dans le creux de la nuque du brun avant de tourner son visage sur le côté. « T'étais pas là... C'était vraiment chiant... Que des mecs et des nanas qui se draguaient entre eux, personnellement j'avais pas le coeur à ça. » Et c'est étonnant, lorsqu'on la connaît pour ses tendances aguicheuses. « Je sais pas... Il étaient tous... Plats, t'sais ? Mh. » Elle n'était tout simplement pas dans le mood ce soir Bina, alors elle a bu comme un trou, comme à chaque fois. « Bah t'sais, que je boive parce que je m'emmerde ou parce que je m'amuse, où est la différence ? J'aurais telleeeeement aimé être avec toi et mon groupe, ça aurait été dix fois plus marrant. » Et en vérité Bina ne sait pas se limiter, elle aime ce sentiment d'exaltation qui la prend lorsqu'elle se retrouve avec trop de grammes dans le sang.

« Dawn ? » Murmure-t-elle soudainement, tournant sa tête de l'autre côté, vers son visage à lui. « Tu veux dormir chez moi ce soir ? » Et c'est une demande qu'elle n'a pas l'habitude de faire, une demande bien incongrue, qui plus est. Elle vient glisser ses doigts dans la chevelure du garçon, jouant avec quelques mèches brunes en souriant bêtement. « Tu sens bon pour un gars qui vient de se taper une random. » Elle en devient presque insultante, à lui reprocher des choses alors que ce n'est en rien sa place. Elle ne lui a jamais rien reproché concernant ses activités, mais ce soir elle se sent planer, comme si d'un coup madame avait décidé de devenir possessive. L'alcool donne des ailes, et Billie en abuse un peu trop souvent, elle se pince les lèvres suite à son commentaire, réalisant qu'elle est allée un peu loin. « Pardon je voulais pas dire ça comme ça... »

✦ franchise.
et la fourbe appuie sur la corde sensible lorsqu'elle lui rappelle encore une fois, dans son état de semi-côma, qu'elle n'a que lui. que lui au monde, que lui pour venir la chercher et la ramener chez elle, mais aussi sûrement que lui qui la comprend, qui la soutient. que lui qui est réellement là pour elle, contrairement à tous ceux qu'elle appelle ses amis mais qui se préoccupent même pas de savoir si elle est bien rentrée après l'avoir fait picoler toute la soirée. et elle le fait presque culpabiliser comme ça, à sous entendre que si il la lâche comme il le menance, elle sera vraiment toute seule. alors il répond rien, se contente d'un soupire lassé. pressé de la foutre dans son lit et de retourner se blottir dans le sien.

et il se fait oreille attentive, l'écoute bavasser sur sa soirée qui était si terriblement ennuyeuse. prétendant qu'elle s'est ennuyée parce que lui n'était pas là, et si il avait laissé son coeur se pincer comme il a menacé de le faire un instant, il l'aurait presque crue ; mais il s'en empêche. s'empêche de ressentir ça pour elle, s'empêche de se laisser berner par ses belles paroles qu'elle ne pense pas, qu'elle lui sort uniquement parce qu'elle a trop bu et parce qu'elle veut s'assurer de sa présence près d'elle. alors il se contente de hausser les épaules. "de toute façon je travaillais." il n'aurait donc pas pu l'accompagner à sa soirée. cependant il veut bien comprendre que voir des gens ennuyeux et ordinaires se draguer entre eux toute la soirée soit particulièrement pénible, surtout quand on est pas soi même d'humeur à faire la même chose. "pourquoi tu traines pas avec ton groupe alors ? plutôt que de rester avec ces gens chiants et ordinaires qui te font t'emmerder à ce point." et si la question sonne comme un reproche, c'est néanmoins une vraie question ; qu'est-ce qu'elle a à se forcer à rester avec ces gens qui la font chier ? "c'est juste parce qu'ils sont cool et populaires ? j'te croyais pas si superficielle que ça." il conclut en tournant à un coin de rue.

les voilà quasiment arrivés devant l'immeuble de l'infirme sur son dos quand elle l'implore à demi-mot de passer la nuit avec elle, dans une proposition qui sonne presque comme une supplication ; et dawn s'en retrouve un instant perturbé, ne sachant pas s'il devrait accepter ou non. "je..." il caffouille, alors que tout se mélange dans sa tête, toutes ses émotions se retoruvant d'un seul coup chamboulées. et il aurait presque pu accepter, en grognant qu'il se contenterait du canapé ; mais elle coupe court à tout sentiments trop perturbant lorsqu'elle lui balance cette pique qui lui fait voir rouge. se taper une random qu'elle lui sort... comme un reproche, comme une insulte. elle sait pourtant quel métier il fait, elle sait surtout pourquoi il le fait, comment il en est arrivé là. elle sait toute sa vie ; mais elle se permet quand même de lui sortir une connerie pareille. choqué par les mots qu'elle ne s'est jamais permis, il s'immobilise tout à coup en plein milieu de la rue, son aura s'étant tout à coup brutalement assombrie. "t'es sérieuse là ?" il gronde ensuite après un long silence. tournant la tête vers elle pour la foudroyer d'un regard ampli de rancoeur.

blessé, ça oui il l'est. alors qu'il pensait pas que la vie pourrait lui cracher encore davantage à la gueule, voilà que celle qui considère comme sa plus proche amie se met à le rabaisser. et il est plus capable de relativiser à ce stade, son cerveau passant bien trop facilement d'un extrême à l'autre pour comprendre que c'est l'alcool qui la fait parler comme ça, qu'elle s'est sûrement crue drôle mais qu'elle est juste maladroite. "va bien te faire foutre bina." renvoi de balle, il utilise ce prénom qu'elle déteste pour tenter de l'atteindre et de la blesser comme elle vient de le blesser. préférant rendre les coups plutôt que d'admettre sa blessure. et ainsi comme promis il la lâche et la laisse s'écrouler sur le sol, lui jetant un regard froid et rancunier. "t'es arrivée devant chez toi alors démerde toi pour rentrer maintenant." il lance, avant de la contourner, paré à s'en aller. "et arrête de picoler, ça te transforme en vraie connasse." ainsi sur ces mots il amorce le mouvement pour s'en aller ; sans se retourner, parce qu'il le sait, s'il la regarde, il va le regretter.

✦ Poussière d'étoiles.

Billie n'a pas vraiment besoin qu'on le lui dise, pour qu'elle comprenne qu'elle est allée trop loin, mais l'alcool lui brouille les pensées, les mots sont sortis avant qu'elle ne puisse y réfléchir et elle doit maintenant assumer les conséquences de ses actes. Une excuse balayée par un coup de vent, Dawn a entendu et il choisit de se laisser blesser. Billie n'a pas d'échappatoire, déjà, il l'abandonne sur les pavés froids de Busan, et elle, ne comprend pas un centième de ce qui est en train de se passer. Son prénom résonne cruellement, punition qu'il lui inflige pour avoir dépassé les bornes. Elle ne peut pas dire qu'elle ne l'a pas cherché, mais peu importe la raison, elle se sent particulièrement offensée par la manière dont il lui renvoie la balle. « Yah, c'est quoi ton problème Dawn ? » Lance-t-elle en lui rendant un regard tout aussi mauvais. Deux amis proches, capables de s'entretuer d'un seul coup d'œil, deux météorites qui se rencontrent ce soir et collapsent ensemble vers l'amertume de ces vies malheureuses.

« C'est ça, dégage, c'est tout ce que vous savez faire de toute manière, fuir. » Et ces paroles-là ne lui sont pas destinées, ces paroles-là sont pour toute la rancœur qui la grignote depuis des années. Lorsqu'elle pose son regard sur son père pour ne voir plus qu'une carcasse vide aux émotions disparues, lorsqu'elle s'est retrouvée bien trop de fois à l'attendre durant ses expositions sans qu'il ne vienne jamais la voir. Ces paroles-là ne sont pas pour Dawn, mais elle les lancent malgré tout car elle ne peut pas faire la part des choses ce soir, et si son esprit à elle n'est pas lucide, elle pet au moins espérer que Dawn ne fera pas l'erreur d'être aussi buté qu'elle. Les insultes lancées par la suite, histoire d'alimenter le brasier, car ô que c'est simple de renvoyer la balle sans trop se mouiller. Billie est bouche bée cette fois, elle tente de l'ouvrir pour lui répondre, mais elle ne trouve pas ses mots. Au final, elle baisse la tête, se relève doucement en sentant les larmes monter toutes seules. Le garçon s'est déjà retourné. « Je t'ai dit que j'étais désolée, que je voulais pas dire ça comme ça. De base, je voulais juste te complimenter, je suis la première personne qui ne te jugera pas pour ça, mais tu choisis quand même de m'en vouloir et de m'insulter, c'est vraiment puéril de ta part. Tu me déçois. » Et c'est peut-être son premier moment de lucidité, car quand une émotion forte vous traverse, ça peut suffire à vous faire dessaouler.

Elle serre ses poings, réfléchit à comment elle souhaite que cette soirée se termine désormais. Partir sur une note salée, rejoindre ses draps et complexer toute la nuit, puis la journée d'après, ou bien le supplier de l'excuser pour son comportement, même s'il a été aussi odieux qu'elle, finalement. Son ego parle pour elle. Sans rien dire de plus, elle se retourne et décide de s'en aller. Ses pas sont lourds, elle semble porter le fardeau du monde sur ses épaules alors qu'elle ne porte que le fardeau de sa bêtise. Elle compose le code de la porte d'entrée machinalement, puis elle s'introduit dans l'immeuble silencieux, sans un autre regard pour celui qui disparaît déjà.

Poussière d'étoile,
S'efface de la toile.