Hyean était chez lui paisiblement, ça faisait environ moins d'une heure qu'il était rentré et qu'il avait quitté la Cyber Task Force pour pouvoir se reposer après une longue journée. Une bonne journée, mais qui avait eu le mérite de le fatiguer, il devait le reconnaître. Il réalise qu'il devrait réellement consulter un ophtalmo pour faire vérifier ses yeux. Il passait beaucoup de temps sur un écran et ses yeux le picotait. Il était sûrement temps de porter ce que l'on appelle communèment des lunettes anti-lumière bleue.

Le jeune homme avait la chance de vivre au dernier étage d'un ancien immeuble et disposait donc d'un velux. Et il avait choisi d'installer son lit juste en dessous, pour pouvoir regarder le ciel. Il avait aménagé l'entièreté de son appartement en fonction de ce paramètre. Ce n'était pas forcément le plus logique, mais il aimait cette disposition. Hyean regardait le ciel depuis plusieurs minutes, les mains posées sur son ventre, l'une à côté de l'autre.

Son torse vibre soudainement, le tirant de ses rêveries. Ses yeux papillonnent légèrement et il se saisit du téléphone qu'il a posé contre son buste un peu plus tôt. C'est avec surprise qu'il reçoit un sms de la part de Lei. Ce n'est pas vraiment habituel de sa part, surtout à une heure pareille et qu'il le sait en plein service. Il lui demande s'il peut venir chez lui et il accepte, informé de ses blessures. Il a évidemment accepté de le laisser rentrer chez lui, espérant tout de même qu'il n'est pas trop abîmé.

Il se redresse alors, largue son téléphone sur le lit, qui tombe et rebondit légèrement sur le matelas. Il se lève pour aller dans la salle de bain, mais à peine en chemin, son interphone sonne. Il n'a pas eu le temps de récupérer la trousse de secours. Sans se préoccuper de décrocher, il ouvre la porte de l'immeuble, puis la sienne, qu'il laisse entreouverte ; même s'il sait qu'il aura le temps de faire l'allé-retour entre la salle de bain et sa porte.

Il a même le temps de sortir des verres et le thé du frigo.

Gamin qui avait pour politique de tourner de l’oeil lorsqu’il voyait des petites choses illégales se passer quand il avait fini son service, il n’aimait pas travailler plus qu’il ne le devrait, il n’était pas un workaholic, bien au contraire, l’heure était l’heure, les minutes comptaient et de même les secondes. Et pourtant, pour la première fois depuis longtemps, il avait dérogé à la règle qu'il s’était imposé lui-même en commençant son job en tant que policier. Gamin qui s’était alors mêlé à une bagarre, inutile de dire qu’il avait réussi à calmer la bagarre mais à quel prix ? Visage blessé, sang qui coulait par-ci par-là, il fallait bien se l’avouer les hommes avec qui il s’était battu ne l’avaient aucunement raté. Il ne pouvait pas rentrer chez lui comme ça et il ne se voyait pas du tout aller à l’hôpital dans cet état, pas en sachant que sa mère viendrait le voir et pleurer des larmes de crocodiles à en faire faussement pleurer les chaumières. Le chinois se devait alors de contacter quelqu’un en qui il avait confiance, quelqu’un qui pouvait le soigner sans réellement poser de question et il ne voyait qu’une seule personne pour cela, Hyean. Il savait que tout irait bien avec lui puis il n’avait même pas à réfléchir le chinois, le visage de Hyean s’était dessiné dans son cerveau comme si c’était une évidence. Message envoyé, simple et efficace, il n’avait pas tout expliqué dans les détails, c’était quelque chose qu’il préférait dire à l’oral après tout.

Gamin qui se dépêchait alors d’aller à l’appartement de son ami, le sang qui ne voulait pas réellement s’arrêter, gamin qui commençait à se sentir mal plus il avançait, qu’est-ce qu’il détestait être sale, qu’est-ce qu’il détestait avoir du sang sur lui, quelle idée avait-il eue de se battre, lui qui aurait pu juster passer son chemin, lui qui aurait pu juster continuer comme si de rien n’était mais non, pour une fois, son cerveau lui avait crié d’aider l’homme dans cette ruelle quitte à en ressortir avec quelques blessures. Porte d’entrée du bâtiment ouverte après qu’il ait sonné à l’interphone, le voilà qu’il montait les escaliers, doucement, avec un peu de mal, il fallait se l’avouer, il espérait juste ne pas avoir une côte de brisée ou quelque chose du même acabit. Tête qui passait alors dans l’ouverture de la porte d’entrée afin de vérifier s’il pouvait réellement entrer, chaussures qu’il déposait sur le palier, veste qu’il laissait alors tomber par terre, quasiment avec lui dans la foulée. « Hyean, t’es là ? J’entre. » Politesse non utilisé avec Hyean, comme si c’était une évidence pour lui, peut-être qu’au final, il était la personne la plus proche de lui à l’instant-T, celui qui faisait en sorte qu’il soit à l’aise, celui sur lequel il pouvait compter même s’il était aussi faible que cela. Sang qui coulait encore sur ses habits, salissant légèrement le parquet de son ami, il n’y avait qu’une grimace sur le visage du jeune chinois tandis qu’il attendait de voir la tête de son ami.

Hyean a à peine le temps de poser les verres sur la table, qu'il entend du bruit un peu plus loin de lui, alors qu'il laisse tomber ses affaires avec fracas. Quand il rélève la tête, il voit son ami à deux doigts de partir avec la veste.

— Je suis là, il dit dès qu'il entend la voix du policier.


L'appartement de Hyean n'est pas si grand finalement. Il n'y a qu'une pièce, si on ne compte pas la salle de bain et les toilettes qui restent séparés de la pièce de vie. Il est simplement étudiant après tout, il n'a pas forcément les moyens d'acheter mieux. Sachant que l'immeuble est plutôt vieux et que son appartement est loin d'être des plus modernes. Au contraire, sans ses affaires, l'appartement ferait peut-être même décrépit. En tout cas, il a réussi à séparer son espace chambre grâce à des étagères qu'il a rempli avec ses livres de cours et autres objets à l'utilité plus ou moins explicite. Il a une petite table qui peut s'agrandir si jamais il reçoit du monde, mais ça n'arrive jamais en réalité...

— Oh.

Il fait, se figeant alors, les pupilles tremblant légèrement.

— Ca fait beaucoup de sang quand même, il constate.

Son esprit s'égare au moment où il a vu autant de sang. Sieun. La terrible nuit remonte alors dans son esprit ; il se rappelle briévement de ses mains rouges et poisseuses, mais c'est malgré tout très flou. Il secoue la tête pour chasser ses souvenirs et se concentre sur l'instant présent. Il essaye de se dire que Lei ne saigne peut-être pas autant qu'elle à ce moment-là. Sûrement moins. Il l'espère en tout cas sinon ça veut dire que Lei va crever dans son appart et ça c'est hors de question.

— T’es sûr que mon kit de survie va être suffisant pour soigner tout ça ?

Ses sourcils se froncent dans une inquiétude réelle – Hyean n’est pas autant un robot qu’il le croit. Le sang de Lei coule quand même sur le parquet.

— Assis-toi, il s'empresse tout à coup.

Il a vraiment l'air dans un sale état. Alors il tire la chaise pour lui éviter de faire trop d'efforts, le tient par le bras pour qu'il évite de s'écrouler à tout moment jusqu'à que son fessier soit sécurisé sur ladite chaise.

Il manquerait plus qu'il lui fasse un malaise.

— Tu saignes où ?

En l'observant ainsi, il avait du mal à saisir d'où le sang venait exactement. Et s'il avait mal, le mieux qu'il avait à lui proposer, c'était du doliprane...

et si le sang coulait des quelques blessures du chinois, il n’en était pas moins embêté, visage qui commençait à devenir rouge écarlate, sa chemise qui commençait à avoir les mêmes tons, qu’est-ce qu’il détestait le fait d’être sale même si ce n’était que du sang, il savait très bien que ce genre de tâche ne partait pas si facilement que cela, à son plus grand malheur. soupir qui sortait des ses lippes tandis qu’il attendait dans le salon de Hyean, attendant qu’il vienne le voir, même si l’état du policier était assez déplorable. il espérait juste que Hyean n’allait pas s’évanouir ou bien paniquer en le voyant, ce n’était rien après tout, du moins c’est ce que lei espérait réellement. il n’avait pas envie de se retrouver à l’hôpital pour cela, puis comment expliquer ce qu’il s’était passé ? que lei avait fini par se battre pour venir en aide à quelqu’un ? ce n’était pas son genre, lui qui était assez solitaire, lui qui ne s’occupait que de sa petite personne pour ne pas changer le cours de ses petites habitudes, de son petit train train habituel. « j’aurai peut-être dû te prévenir que je saignais beaucoup, non ? je pensais pas.. saigner autant, je nettoierai ton sol et tout plus tard, d’accord ? et je ne sais pas si ton kit sera suffisant mais je l’espère très sincèrement. » parce que si ce n’était pas le cas, lei ne savait pas comment régler tout ça, lui qui n’avait pensé qu’à venir chez Hyean, lui qui n’avait réellement aucun autre plan, il pensait que c’était quelque chose de bénin, pas quelque chose de plus gros mais en voyant les expressions et la réaction de Hyean peut-être.. peut-être qu’il avait mal jugé la chose.

et le policier réussit à s’asseoir sur une chaise grâce à son ami, sans lui il serait très probablement tombé à terre, ayant alors la fainéantise de se relever immédiatement. lei ne s’était jamais senti comme cela après tout, lui qui faisait toujours attention à ne pas se mêler des affaires qui ne le regardaient pas, à tourner de l'œil très souvent, à ne pas aller se battre, lui qui détestait le sang au plus haut point. « je saigne de la tête je crois ? un peu de la joue. j’espère que je saigne pas à l’intérieur de moi, sinon je vais devoir aller à l'hôpital.. ah et.. tu pourrais vérifier si j’ai pas un bleu sur la côte gauche ? j’ai mal.. » léger sourire qui apparaissait alors sur son visage, il essayait de pas faire paniquer Hyean même s’il commençait doucement à paniquer lui-même, force qui commençait à vouloir quitter son corps, à son plus grand malheur.

Hyean ne remarque pas qu'il tremble, parce que le souvenir de Sieun s'immisce insidieusement dans son esprit. Il tente de garder son calme ; il sait qu'il en est capable, car il n'est pas si vulnérable. Il a vécu tellement pire que ça, il ne devrait pas trembler. Mais Lei est son ami, alors ça joue contre lui.

— Il faudrait peut-être aller à l'hôpital pour tout ça...?

La chemise était recouverte de sang, il n'était pas sûr que ça soit normal. Le fait qu'il peine à tenir sur ses jambes n'était pas non plus un bon indicateur. Attendre davantage n'était peut-être pas la chose la plus safe à faire.

— On s'en fiche du sol... Je préfererais que t'évite de clamser tout court, dit-il pensivement, alors qu'il commence à se rapprocher de son ami dans l'idée de l'examiner.

Une étape à la fois. Commençons par le début et on verra après. Son ami lui sourit mais ça ne le rassure pas vraiment. On a tendance à être dans le déni dans ce genre de situation, n'est-ce pas ?

— Je regarde. Dis-moi si ça ne va pas ou que je te fais mal.

Un avertissement comme quoi il s'apprête à le toucher. Il pose sa main précautionneusement sur sa tête, soulève délicatement des mèches de cheveux pour localiser l'origine du sang, la blessure qui laisse échapper autant de sang. Il grimace un peu et laisse échapper un hissement quand il découvre l'ampleur des dégâts.

— Ca a l'air ouvert...

Hyean soupire un peu, avant d'ajouter :

— Je vais pas être en mesure de te recoudre, tu sais...?

Il s'éloigne un peu pour récupérer une chaise et s'asseoir face au policier.

— Fais-moi voir tes côtes.

Il l'aide à soulever son bras gauche doucement, puis lève le tee-shirt avec précaution, guettant sa réaction et espérant que le contact du tissu ne provoque pas trop de douleur. Puis il jette un oeil à là où il a mal.

— C'est plus que bleu, Lei.

Ca relevait sûrement du miracle qu'il ait réussi à venir jusqu'ici, ou de beaucoup de détermination.

et le corps de lei était sain, il ne se faisait que très rarement mal, lui qui faisait attention à ce qu’il faisait, lui qui évitait les situations dangereuses le plus possible. alors reconnaître qu’il s’était très probablement planté ce soir-là risquerait d’être difficile pour le jeune chinois. il ne pensait pas finir à l’hôpital, surtout pas aujourd’hui, surtout pas pour une raison aussi stupide, du moins stupide d’après lei, il n’avait juste pas enregistré l’ampleur de la situation. voulant alors se rassurer mais plus précisément rassurer hyean, lei n’allait pas tomber aujourd’hui, il ne le pouvait pas, il avait trop de choses à faire, à accomplir dans sa vie, il devait retrouver son père après tout. « y’a trop de monde à l’hôpital Hyean, puis si ça se trouve, j’ai rien. puis si tu y vas pour rien, on te fait payer une amende, non ? et je vais pas mourir hyean, t’inquiètes pas. » s’il savait qu’il était sur le point de rendre l’âme, il n’aurait jamais été chez hyean, lui qui ne voulait pas lui donner cette vision, jamais. au fil du temps, lei avait appris à apprécier hyean, réellement, et cela était rare pour lei d’avoir ce genre de sentiments pour quelqu’un mixer avec l’envie de le protéger. ils étaient similaires dans le fond.

et si lei détestait se faire toucher d’une quelconque sorte, il se laissait faire, sans rien faire, sans grimacer par la nouvelle proximité qu’il y avait entre hyean et lui. ce serait mentir de dire que les réactions de son ami ne commençait pas à l’inquiéter, est-ce que c’était réellement grave ? est-ce qu’il pouvait réellement perdre sa vie maintenant ? et plus hyean regardait, et plus l’état de lei se révélait être bien pire que prévu. un léger sourire apparaissait alors sur les lèvres du jeune chinois, il fallait agir, mais comment ? lei ne se sentait toujours pas réellement prêt à aller à l’hôpital.  « je pensais pas que c’était aussi ouvert. j’ai réellement essayé de me protéger mais je devais faire attention vu que j’étais pas seul. on fait quoi du coup ? parce que s’il faut recoudre et que tu peux pas le faire.. je sais pas si j’aurai la force de bouger autre part hyean. » parce qu’il fallait bien qu’il ait les pieds sur terre lei, il n’avait pas assez de force ni de détermination pour se lever encore une fois et aller à l’hôpital de son plein gré. s’il pouvait seulement s’endormir un peu chez hyean.. juste un peu..

Les deux hommes étaient similaires sur bien des points. Avant tout, ils étaient deux personnes éprouvant de grandes difficultés à exprimer leurs sentiments. Et sûrement beaucoup d'autres choses. Alors naturellement, ils s'étaient rapprochés, en capacité de se comprendre beaucoup plus facilement que d'autres personnes, certainement.

Alors quand il lui dit qu'il y a trop de monde, que de toute façon il n'a rien et qu'il ne va pas mourir, Hyean ça l'agace. Ses yeux brillent parce que le mélange d'émotions soudain qui le prend en tenaille, bien que trop rarement, le submerge tout à coup.

— Ne me dis pas ça.

Les intentions de son vis-à-vis n'étaient certainement pas mauvaises, et il ne voulait pas insinuer certaines choses. Mais il l'avait vécu, Hyean ; tenir le corps inanimé de quelqu'un qu'il aime. C'est quelque chose qu'il ne veut plus jamais voir, malgré ce trouble qui l'empêche de ressentir les choses correctement. Il n'en parlait pas forcément, pourtant. Pas nécessairement comme un secret, mais simplement, il s'agissait du passé, pourquoi le ressasser ? Et pourtant, les photos étaient là, dans son appartement, à sa mémoire, témoignant de son existence, mais pas forcément de sa mort.

Lei n'a pas réalisé l'ampleur des dégâts. Forcément. L'adrénaline, tout ça... Ca l'a poussé à tenir debout jusqu'à présent. Mais quid du après ?

Il lui semble que Lei commence à défaillir, surtout après lui avoir dit qu'il n'aurait pas la force de se lever et de se rendre à l'hôpital par la force de ses propres jambes. Il a l'air épuisé, c'est écrit sur ses traits.

— Ne ferme pas les yeux, il ordonne tout à coup.

Le jeune homme palpe ses poches, cherche son téléphone dans ses poches, se retourne pour découvrir qu'il est sur son lit. Il s'éloigne rapidement de son ami pour récupérer l'appareil, compose le 119 dans l'idée d'appeler les secours. Comme un parent surveillant son enfant, Hyean revient rapidement auprès du policier pour s'assurer qu'il reste conscient, attendant qu'ils décrochent.

le rouge écarlate qui coulait alors de son visage, le chinois aurait dû aller à l’hôpital au lieu d’aller voir hyean. l’hôpital n’était pas forcément un endroit qu’il affectionne après tout, il ne voulait en aucun cas revoir sa mère, surtout pas dans cet état là, elle qui fera tout pour que la situation soit à propos d’elle et non de lei, toujours. elle qui passait avant son propre fils, elle qui voulait avoir l’amour et la pitié des personnes. et si lei essayait de rester conscient, il se sentait partir plus les minutes passèrent. partir, ce serait bien, non ? se reposer juste un peu, quelque temps, rejoindre les bras de morphée, l’embrasser et enfin passer une bonne nuit à ses côtés. et les yeux qui commençaient alors à se fermer, doucement, jusqu’au moment où lei entendait la voix d’hyean, ne ferme pas les yeux, c’était plus facile à dire qu’à faire et pourtant, lei essayait d’écouter. lui qui n’était pas si docile en temps normal, bien au contraire, alors rester calme et écouter hyean sans broncher n’était pas quelque chose de très lei au final. attendant sagement que hyean revienne, lei ne se doutait pas que ce dernier avait pris son téléphone afin d’appeler les urgences mais lorsqu’il le remarquait, il fronçait alors des sourcils. hors de question que les urgences viennent, il n’avait rien de grave, n’est-ce pas ? juste quelques égratignures, rien de bien folichon, n'est-ce pas ? « me dit pas que tu as appelé les secours, s’il-te-plaît. » et il ne fallait surtout pas appeler les secours, jamais, lei allait survivre sans ça, il était fort lei. une légère moue apparaissait alors tandis qu’il essayait de se relever doucement, c’était hors de question qu’il mette un pied à l’hôpital. « je peux essayer de me soigner tout seul sinon, tu penses pas que c’est mieux ? t’as de quoi recoudre ? enfin moi je pense que c’est faisable.» non pas qu’il était médecin le chinois mais il s’y connaissait un peu en blessure et peut-être, peut-être qu’il pourrait se recoudre lui-même, se réparer lui-même, tant qu’il était encore vivant, tout irait bien, non ? puis cela ne pouvait pas être si compliqué que cela, il lui fallait juste un peu d’alcool, d’accord, beaucoup d’alcool, pour faire passer la douleur.

L'état de Lei se dégrade à vue d'oeil. Le policier commençait à piquer du nez progressivement, jusqu'à qu'il le reprenne à l'ordre. Pour autant, ça n'allait pas fonctionner longtemps.

— Lei. Arrête ton cinéma. Je peux pas te laisser comme ça.

Pour une fois, Hyean se faisait autoritaire. Il ne voulait pas répéter les erreurs du passé et prendre le risque de perdre encore un ami.

Le jeune homme essaye de se lever, sans grande réussite. Hyean arrive à le stabiliser pour qu'il ne tombe pas, utilisant son propre corps pour retenir Lei, laissant sa tête reposer contre son ventre, sa main libre au niveau de son épaule pour lui éviter de partir en avant.

Le sonnerie laisse place à une voix au bout du fil, et Hyean commence à expliquer la situation à l'opérateur. Il fournit des informations, explique même que le policier ne souhaite pas aller à l'hôpital, alors que son cas semble l'exigeait et la personne au bout du fil finit tout de même par lui envoyer une ambulance.

L'appel termine, il pose son téléphone sur la table non loin d'eux. Hyean reste là à le soutenir.

Même s'il voulait se soigner tout seul, il n'était pas capable de le faire ; son esprit était brumeux, cela se voyait dans son regard et dans son attitude globale.

— T’es pas en état de faire quoi que ce soit seul… Désolé de te l’imposer mais là… On a pas d’autres options.

Il continue à lui parler, en espérant que ça gardera son esprit éveillé.

bêtise, peut-être que lei avait fini par en faire une, se mêler des choses qui ne le concernaient pas et tout ça lui avait retombé dessus. les coups qui s’étaient enchaînés, que ce soit du côté du groupe qui harcelait quelqu’un ou bien de celui de lei. lui qui restait souvent les pieds sur terre, qui pensait qu’à sa petite personne pour éviter les problèmes, il était pourtant là, en sang, chez hyean, en train de perdre plus au moins connaissance. léger soupir qui sortait alors de ses lippes, est-ce qu’il savait que son état était grave ? sûrement mais ce n’était pas pour autant qu’il voulait aller aux urgences, hors de question qu’il laisse une chance à sa génitrice de jouer le rôle de mère, aucune chance qu’elle vienne profiter de la situation pour gagner la peine des personnes. est-ce qu’il y avait réellement d’autres options ? non, il n’y en avait plus, il fallait se rendre à l’évidence, il était obligé de mettre ses pieds à l’hôpital. il essayait tant bien que mal de se remettre assis, cherchant alors dans ses poches sa cigarette électronique afin qu’il puisse fumer en attendant les urgences, est-ce que cela était une bonne idée ? non. est-ce qu’il allait fumer devant hyean ? pour une fois oui, il savait pertinemment qu’il allait survivre à ces blessures mais.. au cas où, il allait quand même fumer une dernière fois, une toute dernière fois avant qu’il ne s’endorme pour quelque temps.

— je sais mais.. faut juste pas que ma mère l’apprenne, okay ? je compte sur toi pour qu’elle mette aucun pied dans la chambre, hésite pas à l’engueuler, elle le mérite.

il préférait le préciser, jamais ô grand jamais il ne voulait se retrouver dans la même pièce qu’elle, la peur qui venait alors envahir son corps lorsqu’il la voyait sans aucune raison apparente, mémoire qui était alors défaillante pour le jeune chinois. il avait beau se souvenir de beaucoup de choses, il ne se souvenait aucunement de son enfance, peut-être qu’au final, sa génitrice avait réussi son coup, faire taire son aîné afin de cacher un méfait qu’elle a pu faire.

Voir Lei vouloir fumer alors qu'il est en mauvais état ne lui semble pas être une bonne idée, ou du moins un réflexe peut-être plutôt étrange.

L'étudiant ignore vraiment qu'elle est la nature de la relation de Lei avec sa mère. Pas très bonne, il suppose. En tout cas, assez mauvaise pour que le policier n'ait pas envie de la voir débarquer à l'hôpital. Il a sûrement ses raisons, raisons qui dépassent un peu Hyean, n'ayant jamais vraiment été confronté à ce genre de situation. Après tout, il n'a aucun souvenir de sa mère biologique, il n'a pas eu non plus ce genre de relation avec son père biologique. Et finalement, ses parents adoptifs ne lui accordait pas assez de considération pour le mettre dans l'embarras dans un hôpital. Si seulement le jeune homme était capable de se sentir dans l'embarras dans une telle situation.

— D'accord, il dit simplement.

Hyean sait prendre un ordre, surtout quand il vient de quelqu’un à qui il tient. Il ne voulait pas le décevoir, en quelque sorte, donc il ferait de son mieux pour que sa génitrice ne vienne pas l’importuner.

— Je reste avec toi de toute façon.

Mots lourds de sens ; il ne le laissera pas seul. Surtout pas dans une situation comme celle-ci, il allait veiller sur lui, même si ce n’était normalement pas son rôle, Hyean ferait de son mieux.

Il essaye également de maintenir la conversation pour lui éviter de sombrer dans un certain sommeil et lui donner une chose sur laquelle se concentrer.

— Comment c’est arrivé …? Il demande doucement, les sourcils froncés, plus pour lui-même qu’en tant que réelle question.

Puis le temps finit s’écouler lentement, il semblerait, mais éventuellement les secours finissent par arriver, ils s’occupent rapidement du blessé, ne demandant pas à l’étudiant de lâcher le corps de son ami qui semble en bien piètre posture.

dire que lei n’avait pas une bonne relation avec sa mère n’était pas un mensonge, bien au contraire, moins il la voit, mieux il se porte. la peur qui venait toujours au creux de son corps rien qu’en pensant à elle, à tout ce qu’elle lui avait fait, à tout ce qu’elle avait fait à sa soeur et à son petit frère, tout ce qu’elle était au final, rien qu’un vulgaire monstre, c’était même à se demander si elle était réellement quelqu’un d’humain dans le fond. un léger soupir sortait tout de même de ses lèvres lorsqu’il comprit enfin que hyean ne la préviendra aucunement, cela le rassurait réellement, lui qui préférait crever comme un rat mort plutôt que de la voir être à ses petits soins. il préférait largement un vulgaire inconnu même si cela n’était pas propre plutôt que d’avoir sa mère à ses côtés, c’est à ce point qu’il en avait peur, qu’il la détestait du plus profond de son cœur.

— merci beaucoup, je compte sur toi en tout cas hyean, heureusement que je t’ai.

et comment expliquer tout cela à hyean, comment expliquer son accident ou plutôt sa mauvaise rencontre ? dire que lui, qui ne travaille pas après 18 heures, lui qui ne s’occupait que de ses petites affaires, avait fini par vouloir sauver quelqu’un qu’il ne connaissait pas. un acte héroïque pour certains, c’était un acte dénué de sens pour lei et encore pire, idiot. il n’aimait réellement pas se mêler des affaires qui n’étaient pas les siennes et il aurait juste dû continuer son petit bonhomme de chemin, ignorant ce qu’il venait de voir. quel idiot il avait été ce soir-là, se prenant des coups pour un vulgaire inconnu qu’il ne reverra très probablement jamais.

— oh, je rentrais juste du boulot, je marchais un peu puis j’ai entendu du bruit provenant d’une petite ruelle, je suis passé sans y faire attention jusqu’au moment où l’adolescent m’a regardé dans les yeux, j’étais obligé d’aller le sauver des personnes qui le tapaient. j’ai protégé l’adolescent, je me suis bien défendu mais ils ne m’ont pas raté. mais ça reste entre nous.

léger rire qui sortait de ses lippes, ce n’était pas envisageable de savoir qu’il avait utilisé ses poings au lieu d’appeler ses collègues car il ne fallait pas l’oublier et ce même si lei n’en parlait pas très souvent qu’il était un policier.

Bien qu'il avait un père toxique et maltraitant, il avait du mal à comprendre Lei, il lui semblait. Coupé du monde, Hyean n'avait pas appris à détester son père. Pour autant, il savait que ce qu'il avait fait été mal, et que la manière dont il l'avait négligé l'avait amené à être ainsi, dépourvu d'émotion, éprouvant des difficultés à comprendre les émotions d'autrui. Il y avait du mieux, et pourtant tant de progrès à faire...

— Je garderais la porte, s'il faut.

Mais si Hyean ne comprend pas toujours tout, il est d'une loyauté sans faille, à aller plus loin qu'il ne le devrait pour les gens à qui il tient. Il acquiesce simplement quand son ami lui indique qu'il compte sur lui, qu'il a de la chance de l'avoir. Il ne sait pas trop quoi dire. Sieun est bien la seule à le lui avoir dit, à lui avoir confié à quel point elle tenait à lui. 

Alors il voulait le protéger, aussi, malgré lui, parce qu'il sait qu'il tient à lui, et qu'il l'aime, d'une certaine façon.

Lei était sorti de son propre personnage, était venu à la rescousse de quelqu'un en dehors de ses heures de travail. Et en réalité, ça l'amuse un peu, Hyean, qui ne peut s'empêcher de sourire d'entendre son ami agir différemment de son habitude. Il rit aussi.

— Je garderais le secret. Aussi.

Ca faisait beaucoup de choses à garder maintenant. Sachant qu'il gardait déjà Lei contre lui pour lui éviter de finir à terre en plus de tout le reste.

Ce n'est qu'après que les secours arrivent, avant de s'affairer auprès du policier. Hyean sait déjà qu'il ne pourra pas monter dans l'ambulance, et qu'il devra faire le chemin par ses propres moyens, tout en espérant arriver plus vite que la matriarche.

— Ca va aller ? Je veux dire tout seul. Dans l'ambulance.

A côté les pompiers s'affairent, demandent si Lei peut marcher, tente d'examiner les blessures.

et le temps semblait passer plus lentement pour lei, peut-être qu’au final, on ne l’avait réellement pas raté et qu’il ne sortirait pas indemne de tout cela, physiquement parlant car mentalement parlant il s’en voulait déjà légèrement de ne pas être resté dans sa ligne droite de conduite comme à son habitude, non, il a fallu qu’il joue les héros à deux centimes. léger sourire triste sur son visage, quelle idée il avait eu aussi de se laisser guider par une bonne action, non pas qu’il se considérait comme un vilain l’aîné des cheng mais plutôt qu’il n’avait aucune raison de faire cela. acte héroïque qui restera uniquement dans sa mémoire, il n’y avait rien gagné à part quelques blessures et voir un hyean paniqué mais surtout un séjour à l’hôpital. il fut tout de même rassuré de savoir que ce dernier n’allait rien dire, gardant alors ce secret pour lui, bien gardé, lei trouvera une excuse nulle pour les médecins, ne faisant alors aucune mention d’une bagarre.

est-ce que ça ira tout seul ? pas forcément, non pas que lei n’aimait pas la solitude mais plutôt parce qu’il se connaissait, il ne risquerait pas de rester trop longtemps à l’hôpital, être entouré de personnes, se faire toucher par les infirmières ou les médecins, cela le dégoûtait réellement mais hyean avait insisté pour qu’il y aille, un peu trop d’ailleurs alors il fera de son mieux pour survivre, du moins jusqu’à tant que hyean vienne le rejoindre ou bien fei ou encore hua.

— ça devrait aller, après si tu peux venir avec moi, viens ? dis que tu es quelqu’un de ma famille. mais promis, ça ira, si tu peux pas venir, rejoins moi juste d’accord ?

il ne mentait pas réellement en disant que hyean faisait parti de sa famille, il était bien la seule personne qui ne partageait pas son sang qui se rapprochait d’un vrai frère, non pas qu’il pourrait tout donner pour ce dernier, mais presque. après tout, ils se ressemblent, peut-être un peu trop d’ailleurs, et ils se comprennent, lei se sent vraiment à l’aise à ses côtés, chose rare.

Hyean ferait comme s'il n'avait rien entendu... à part si la vie de son ami se trouver être en danger et que dire la vérité était le seul moyen de l'aider... Si ça devait lui coûter plus que ces quelques blessures, Hyean refuserait de mentir davantage. Mais ça, il se garde de lui dire pour le moment. Il n'avait pas besoin de le savoir. Et pour les conséquences, tant pis, il verrait avec lui après coup, et il lui expliquerait la situation convenablement pour s'assurer qu'il comprenne ses raisons.

— Tu es sûr ? Ca veut dire qu'on doit mentir...

Et Hyean, il a appris que mentir c'était mal. Alors il a du mal à ne pas dire la vérité, aussi cruelle soit-elle. C'est une subtilité qu'il a du mal à saisir. Il avait du mal, également, à saisir le concept de considérer quelqu'un qui ne fait pas partie de sa famille comme étant sa famille. Sachant qu'il n'avait pas de famille sur qui compter.

— Mais je viens, si tu y tiens.

Hyean se sentait un peu troublé par cette situation, il ne saurait décrire ce qu'il ressent. Après tout, la notion de famille ne lui a jamais vraiment réussi. Sa mère l'a abandonné, et au final, son père lui a fait plus de mal qu'autre chose. Sa famille d'accueil n'a pas été d'un grand secours non plus, et ils ont toujours eu plus ou moins peur de lui. Il ne s'est jamais vraiment senti aimé, si ce n'est par sa soeur adoptive ou encore son ancienne petite amie, qui lui manque terriblement. Mais il est peut-être vrai que les deux hommes sont plus aptes à se comprendre qu'avec d'autres personnes.

Et puis les pompiers finissent par allonger son ami dans une civière après s'être assuré que cela n'allait pas être mortel. Hyean ayant sagement laissé les pompiers le détacher de ses bras, qui le maintenaient jusqu'à présent afin de lui éviter de finir par terre. Lei est recouvert d'une couverture de survie, avant d'être embarqué par les secours.

Pendant ce temps, Hyean parle avec les secouristes pendant quelques minutes. C'est alors qu'un peu plus tard, une fois que Lei est bien installé dans l'ambulance et que les secours se chargent de le stabiliser, que Hyean monte également dans le véhicule, vers l'extérieur pour laisser la place au ambulancier au cas où ils auraient besoin de faire une manipulation spécifique.

le chinois n’aimait pas réellement mentir mais qu’est-ce qu’il pourrait faire de plus ? dire qu’hyean faisait parti de sa famille était certes mentir mais lei avait fini par le considérer comme telle, la famille n’est pas faite uniquement que par les liens du sang après tout. puis parfois il fallait bien mentir pour une bonne cause, un petit mensonge blanc qui ne faisait de mal à personne.

— mentir c’est parfois nécessaire malheureusement, mais personne ne dira rien, t’inquiètes pas, et oui j’y tiens, viens. je te promet que tout ira bien, je sortirai demain.

il n’aimait pas les hôpitaux ou tout ce qui s’en rapprochait, que ce soit médecins ou bien infirmier, pour lui ce n’étaient pas des endroits propres mais qu’est-ce qu’il pouvait bien dire de plus à hyean ? il avait déjà essayé de ne pas aller aux urgences mais son cas inquiétait son ami et peut-être que dans le fond, on l’avait pas raté. soupir qui sortait alors de ses lèvres, il devait juste se forcer, rassurer hyean du mieux qu’il le pouvait, ce n’était pas comme s’il allait mourir, il aurait sûrement une cicatrice rien de plus, n’est-ce pas ? ce n’était pas la mer à boire, peut-être que dans quelques jours il sera remis sur pieds, prêt à reprendre le boulot comme si de rien n’était, et même avec un peu de chance, peut-être que le lendemain il pourra ressortir.