le déshonneur avant la mort

-- ft haru

✩ ○.⋆☽ ⋆.○ ✩

( outfit ) Près de deux mois sont passés – et ces deux mois ont été les plus longs de sa vie. Il a pourtant connu l’absence, isolé de l’autre côté du Pacifique lorsque toute sa famille était restée en Corée. Il a pourtant connu l’attente, la boule au ventre, pour savoir si oui ou non son projet intéressait les investisseurs. S’il l’avait assez peaufiné pour séduire l’œil exigeant des plus riches.

Il a connu des temps interminables,
Et pourtant,
Jamais ils ne lui auront semblé aussi longs que ces deux derniers mois.

Sans un mot de son cousin ; pas un signe. Les seules paroles auxquelles se raccrocher étant les formules malheureuses prononcées sur ces trottoirs gris, dans l’opacité de la nuit, dans la tiédeur d’une soirée de printemps. Et alors que l’été s’immisce à pas de loup dans leurs vies, poussent les gens sur les plages et fait brûler le soleil, peut-être est-il temps de faire un pas vers lui.

Il déteste pourtant ça, Shin – ce n’est pas son fort de revenir vers l’autre, encore moins lorsqu’il lui en veut. Et c’est le cas. Il lui en veut, car Haru semble vivre sa meilleure vie, ne pas souffrir le moins du monde de son absence, lorsque Shin erre comme une âme en peine depuis deux mois. Il lui en veut, car ses mots tournent en boucle dans sa tête, ébréchant sa si solide estime de lui-même, ébréchant la certitude que jamais le lien qui les unissait ne pourrait se briser.

Alors oui, il se sent minable lorsqu’il quitte l’air climatisé de son appartement pour passer à celui de sa voiture, direction Busanjin – la maison. Car il ne sait même pas pourquoi il y va ; a déjà le sentiment qu’il n’y a rien à sauver. Sûrement Haru se fera-t-il un plaisir de souligner combien il se comporte comme un petit chien, pour lui, comme lorsqu’il a commis l’erreur de vouloir lui éviter d’oublier son téléphone dans le Uber, et ses doigts se resserrent sur le volant à cette simple pensée.

Il arrête la voiture dans la rue du brun – d’après Instagram, en tout cas, puisque ça fait deux mois qu’il n’a pas vu son ombre –, la boule au ventre et les mâchoires serrées, à se sentir bien ridicule de faire ça. Et sans se laisser le temps de se dégonfler, il enfonce le bouton de la sonnette. Une fois. Deux fois. Trois fois. Sauf que Shin, il ne va pas rester cramer en plein soleil trente minutes durant. Shin, il ne va pas laisser à la transpiration une chance d’humidifier son front, ou de plaquer ses vêtements contre sa peau. Alors il se permet d’entrer dans le bâtiment ; lui laisse une dernière chance de lui ouvrir en sonnant à la porte de son appartement. Mais là encore, il ne répond pas, et là encore, Shin ne va pas attendre trente ans debout dans le couloir, comme le plus parfait des idiots. La dignité n’est de toute évidence pas une valeur très importante pour lui lorsque cela concerne Haru, mais il y a des limites à ne pas dépasser. Alors il compose rapidement le code de l’appartement ; pousse la porte, s’invitant comme s’il était chez lui.

Il plisse un peu le nez face à la petite odeur de renfermé qui se dégage ; se permet d’aller ouvrir une fenêtre, peu désireux de rester dans cette atmosphère Dieu sait combien de temps. Il fait rapidement le tour de l'appartement, pour s'assurer que son cousin est bien absent, et ne refuse pas purement et simplement de lui ouvrir. Et puis l’attente commence. Une heure. Deux heures. Il commence à se demander s’il a bien l’intention de rentrer aujourd’hui – espère qu’il n’a pas prévu de passer les trois semaines à venir chez sa pute –, lorsqu’un petit bip reconnaissable se fait entendre, et que l’instant suivant, la porte s’ouvre.

- Excusez-moi, je vous rappelle plus tard.

Il raccroche l’appel professionnel avec lequel il tentait de s’occuper jusqu’à présent et, élégamment assis dans le canapé, tourne la tête vers Haru dans l’encadrement de la porte, un sourcil haussé.

- Ben alors, c’est à cette heure-ci que tu rentres, chéri ?

A se prêter des faux airs d’épouse délaissée, pour la blague – car c’est plus simple que de lui faire face dans toute son honnêteté ; que cela impliquerait un peu trop de vulnérabilité. Et il se relève, sans trop savoir où se mettre, quoi dire ; finit par grincer :

- Ouais, je sais, je suis bien ton petit chien j’imagine. T’avais raison, t’es content ?

le déshonneur avant la mort

-- ft shin

✩ ○.⋆☽ ⋆.○ ✩

( outfit ) La journée est longue, si longue que t’as l’impression de vivre deux très long jours en une seule et même journée. Et ça, c’est souvent le cas le jeudi. Car le jeudi c’est le jour de réception des marchandises, un jour instauré depuis des dizaines et des dizaines d’années par ton père. Du moins, c’était son jour à lui, était-ce un choix ou une obligation ? Aucune idée mais tu subis bien que t’aurais pu décider d’octroyer quelques changements Haru, instaurer quelques nouveautés pour ton bien être. Mais plutôt que d’appeler chaque sociétés, faire une tonne de paperasse qui te fait chier – et surtout : oser bousculer les habitudes des clients qui attendent particulièrement le jeudi pour les nouveautés t’as juste décidé de t’habituer, de ne rien toucher au travail d’acharné de ton géniteur. T’es condamné à subir ce planning en quasi fin de semaine, passer ta journée à ouvrir des cartons, ranger, trier les emballages et cartons tout en t’occupant simultanément de cette fameuse fidèle clientèle qui ne renonce jamais à ses habitudes.

Il est dix-huit heures que t’es déjà épuisé Haru, n’a qu’une hâte : rentrée chez toi. Ton vrai chez toi et pas celui de Reira car ce soir elle voit une amie – ou peut-être une future associée ? T’as écouté qu’à moitié, tu t’endormais déjà quand elle t’en a parlé. T’as juste retenue qu’elle rentrerait surement tard. Et au-delà de cette raison faut bien tu passes chez toi, que tu te trouves des excuses pour ne pas te sentir con de payer un loyer pour rien depuis des mois. Et de façon presque inattendue, la dernière heure au sein de l’échoppe – que tu ne considères toujours pas comme étant la tienne, passe rapidement grâce à ton ami-ennemi le smartphone. Mais quand l’heure sonne, tu ne fais pas prier pour baisser le rideau, faire la caisse et t’en aller en trainant ta fatigue dans les rues de ce quartier qui t’as vu naitre.

Et tu marches, traine comme une âme en peine, t’arrête sur ta lancée uniquement pour t’acheter un plat nouille à la sauce d’haricot noir. Son plat préféré. Tu soupires Haru et forcément en attendant ton plat, tu vérifies qu’il ne t’a toujours pas envoyé un message – ne serait-ce qu’un point pour lancer une conversation mais rien du tout. Nada. Alors tu ranges ce téléphone portable dans ta poche, maudit le téléphone comme si il était le souci et rentre chez toi encore plus fatigué et contrarié que tu ne l’étais déjà. Code que tu fais une fois à l’entrée du bâtiment, une fois à ta porte. T’entre sans même regarder les environs, trop habitué à la solitude qu’offre cet appartement qui fut un temps était toujours animé que ce soit par les nuits passé avec Euchang à manger des chips et regarder des dessins animés ou bien plus récemment au retour de Shin à Busan, vos soirées jeux vidéo comme lorsque vous étiez adolescent, incapable de vous faire du mal. Tu poses alors ton plat sur la table basse, t’apprête à aller te chercher de l’eau dans le frigo lorsqu’une voix connue – inattendue se fait entendre dans ton dos. Tu te retournes alors d’un seul mouvement, fixe ton cousin comme si il était le mirage tant attendu après des semaines passés dans le brouillard.

Mais forcément après tant de semaines – carrément des mois tu ne sais pas par où commencer. Tu dois le serrer dans tes bras ou lui rappeler ce qu’il a pu te dire ce soir-là ? Tu ne sais pas, tu fais rien de tout ça et répond aussi bêtement que lui :

- Désolé pour le retard mais j’t’ai ramené ton plat préféré mon bébou.

Le bout de ton nez que tu pointes vers le sachet que tu viens de déposer avant d’ajouter :

- C’est jeudi, tu devrais savoir que c’est le pire jour de la semaine pour moi…

C’était un jeudi le soir de votre chamaillerie à deux balles aussi, t’étais fatigué et peut-être que lui aussi l’était. Vous vous êtes dit des conneries plus grosses que vos deux poids réunis et comme tu peux te rappeler de chaque mot, Shin lui aussi semble marqué par certains passages puisque déjà il t’en rappelle un morceau que t’aurais mieux fait de ne jamais lâcher, que tu regrettes amèrement d’avoir prononcé.

- J’suis juste content de voir que t’as capté que t’avais abusé, ça aura pris du temps mais bon.

T’hausses les épaules, va dans la cuisine récupérer deux assiettes, deux paires de baguettes et revient au salon toujours aussi sonné de le voir là, encore debout n’ayant pas bougé d’un millimètre.

- Tu comptes rester en mode la statue de la liberté deux ans ou bien … ?

le déshonneur avant la mort

-- ft haru

✩ ○.⋆☽ ⋆.○ ✩

La porte d’entrée de l’appartement s’ouvre, les chaussures sont abandonnées à ses côtés, et de son œil affuté, il observe son cousin s’avancer dans l’appartement ; poser un sac sur une table, déjà se détourner en direction de la cuisine. Et Shin, il commence à se demander s’il a sérieusement l’intention d’agir comme s’il n’était pas là. Alors il prend la parole ; dit des bêtises pour attirer son attention.

Et enfin, il se retourne.
Lui donne l’attention qu’il réclamait depuis des mois maintenant.

Il a tout de suite l’impression de respirer un peu mieux, lorsque ses yeux se posent sur le visage de son cousin ; qu’il se retrouve dans la même pièce que lui, à respirer le même air que lui, le voir devant lui, en chair et en os. Tangible. Et malgré la rancœur de ces dernières semaines, il se sent déjà mieux, seulement en le voyant ; a l’impression d’avoir retrouvé sa place dans ce monde déliquescent.

Haru a l’air surpris de la voir là, et pourtant, il reprend bien vite contenance ; lui répond sur le même ton, le poussant à lever un sourcil intrigué en direction du sac qu’il lui désigne. Mais il n’a pas l’occasion de répondre quoi que ce soit que le brun ajoute que le jeudi est le pire jour de la semaine pour lui – et malgré lui, il ne peut s’empêcher de penser que c’est arrivé un jeudi. Et tous les jeudis ont eu des relents amers depuis lors, comme lourde réminiscence du jour où tout a semblé se briser entre les deux frères. Alors il ne répond rien ; ne sait pas quoi dire, en réalité, panique un peu lorsqu’il lâche abruptement qu’il doit être bien content de voir que son petit chien est sagement revenu vers lui. Car il a encore en travers de la gorge les paroles que son cousin a pu prononcer, alors lorsque ce dernier répond être seulement heureux qu’il ai compris qu’il avait abusé, ose en plus se plaindre que ça ai pris du temps, il fronce les sourcils ; lui répond trop abruptement :

- Agis pas comme si j’étais le seul à avoir des torts, Haru.

Car s’il s’est fait violence pour venir ici aujourd’hui, il n’oublie pas que son aîné l’a lui aussi blessé ; a lui aussi osé l’attaquer sur les sujets les plus bas, et fragmenter les croyances sur lesquelles il s’appuyait depuis si longtemps. Alors il ne le laissera pas se comporter comme s’il était le seul à lui devoir des excuses.

- De toute évidence ça te prend encore plus de temps à toi puisque t’as toujours pas l’air de capter que t’as abusé aussi, se permet-il d’ajouter avec un haussement d’épaules, son regard brun fixé sur lui.

Et déjà, son cousin tourne les talons, le laissant planté devant le canapé. A son retour, il lui demande s’il compte rester en mode statue de la liberté, et il hausse un peu les sourcils ; lui répond du tac au tac, en levant le bras qui tient toujours son téléphone :

- La statue de la liberté elle se tient comme ça en fait, tu le saurais si t’étais venu me voir aux Etats-Unis…

Contrairement à plus tôt, il n’y a pas de rancœur dans sa voix ; c’est plutôt une blague sur laquelle il avait pour habitude de revenir, du temps où tout allait encore entre eux ; où il pouvait se permettre de lui reprocher de ne jamais être venu le voir en quatre ans, sans réelle méchanceté derrière. Et déjà, il laisse retomber sa main ; reprend place sur le canapé, les mains croisées sur ses genoux écartés, à fixer le vide entre ses pieds sans oser le regarder.

- Alors, ça dit quoi depuis la dernière fois ?, demande-t-il, comme s’il n’était pas sur son Instagram ou celui de sa meuf absolument chaque jour.

le déshonneur avant la mort

-- ft shin

✩ ○.⋆☽ ⋆.○ ✩

Il est là, sous tes yeux. Il est là et soudainement tout va légèrement mieux. Car sa présence ici ne peut que dire qu’enfin les choses vont reprendre leur cours, enfin la vie va reprendre un peu de son sens. T’étais perdu sans ton cousin – surtout sur les nerfs, à un rien d’exploser et triste, surtout triste en réalité. Tu ne t’étais jamais préparé à une telle éventualité dans ta vie, t’étais pas prêt pour une dispute de cette ampleur, surtout pas avec Shin.

Car jamais avec lui le ton n’était monté,
Jamais vous n’aviez eu à vous disputez.

Vous étiez fait pour vous entendre, fait pour que vos caractères soient assez similaires et différents à la fois pour que ça fonctionne. Même gamin vous étiez incapable de vous disputez, les jouets vous les partagiez, jamais une seule personne ne s’était mise entre vous jusqu’à ce soir-là, ce fameux jeudi maudit. Tout est partie en vrille, des mots ont été prononcés que tu n’as pas su lui pardonner tout de suite. Bien évidemment que ça t’a démangé, que t’as failli craquer et retourner vers lui au cours de ces deux derniers mois. Mais t’avais l’impression de lui donner raison en faisant ça, de passer l’éponge sur des choses que tu trouves grave. Qu’il n’a pas à dire même si il n’aime pas la fille avec laquelle tu es, avec laquelle tu comptes resté un très long moment – pourquoi pas toute une vie si elle te supporte jusque-là.

- J’dis pas que j’suis blanc comme neige mais tu peux pas nier que t’as commencé et que t’as dit des trucs hors de propos sur Reira…

Tu l’aimes Shin, plus que tout. L’aime assez pour tout lui pardonner mais là, il ne s’agit pas de toi. Il y a des choses qu’on ne peut pas dire, des choses que même sous un coup de colère ne passent pas. Mais même-là, tu le pardonneras. Car il a fait l’effort de venir, te fait comprendre à sa manière qu’il comprend qu’il a fait quelque chose de mal. Et rien que ça, c’est un grand pas à tes yeux alors il mérite bien que tu t’excuses Shin, soit clément et sincère avec lui.

- Car tu crois que ça me démangeait pas de venir te voir depuis ce soir-là en vrai ? Que j’suis pas dégouté d’avoir réagis comme ça et de t’avoir dit des conneries juste pour te faire mal sur le moment ? C’est même pas ce que t’as dit sur moi qui me touche car t’as le droit d’être énervé contre moi, d’être saoulé même. Mais elle n’avait rien à voir dans l’histoire.

Il ne peut pas tout mélanger Shin, reporter sa frustration et sa colère sur les gens qui vous entourent. Si il est énervé contre toi, c’est contre toi que cette colère doit se diriger. Si il a quelque chose à dire c’est honnêtement qu’il doit le faire, sans faire mille détour autour du sujet. Y’a un millier de chose à dire, tout un tas de truc qui te passe à l’esprit mais tu préfères calmer la tension qui pourrait très vite s’installer. Tu ne voudrais pas le faire fuir ton cousin, qu’il s’imagine avoir pris la mauvaise décision en venant ici. Loin de là, tu veux qu’il reste, que ça s’arrange alors tu bouges un instant à la cuisine, va récupérer de quoi vous équipez pour manger comme si de rien était. Quand tu reviens il est toujours planté debout dans la pièce, n'a pas bougé d’un pouce. Comme si il était gêné, ne savait pas quoi faire lorsqu’ici, il s’est toujours sentie comme chez lui. Ça te fait de la peine, te comprime le cœur de voir ton frère si mal à l’aise alors tu redouble d’effort, sort une connerie pour le détendre et ça semble marcher car déjà il prend la pause le brun te montre à quoi ressemble réellement cette foutue statue de la liberté et tu souris, prend place parterre comme à ton habitude pour ouvrir le sachet de nourriture en lui répondant :

- Pour que tu me coinces en Californie ? On le sait tous les deux que j’serais pas repartie…

Toujours cette même réponse, encore et toujours la même car tu penses sincèrement que tu te serais plu à vivre au côté de ton cousin de l’autre côté de la mer. Mais il avait besoin de se faire sa propre expérience, de ne pas se contenter que de ta présence. Et toi, t’avais juste envie de voyager, vivre une expérience dans les contrés natale de ta mère.  

- Puis elle est moche cette statue toute façon…

Que tu marmonnes sans grande conviction en déballant les petits accompagnements qu’on t’a donné. S’en suit les nouilles que tu lui sers en premiers avant de te servir toi dans un second plan. T’as les yeux rivés sur ce que tu fais lorsque la question de ton cousin retentit dans le silence de la pièce, tu relèves alors les yeux vers lui et répond trop honnêtement :

- J’ai fait la gueule … à tel point qu’il a fallu que Reira m’emmène de force en dehors de Busan avant que j’implose et je mette le feu à l’épicerie… J’étais pas trop chaud à la base mais bon j’serais un menteur de dire que c’était pas sympa de voir autre chose…

C’était beau Hawaii, surement l’endroit le plus paradisiaque que t’es vu jusque-là. Puis il y avait Reira, votre relation a encore évolué là-bas. Mais tout ça, tu ne peux même pas lui raconter à Shin car tu sais que ça le gonfle alors tu te contentes de lui demander à ton tour :

- Et toi ? J’vois t’as changé de couleur déjà… Ca date t’étais pas brun comme ça.

le déshonneur avant la mort

-- ft haru

✩ ○.⋆☽ ⋆.○ ✩

A peine arrivé dans son salon que Haru prend soin de remettre les points sur les I ; les barres sur les T. Il lui rappelle que c’est lui qui a commencé ; qu’il a formulé des mots qu’il n’aurait jamais dû se permettre au sujet de sa petite amie, et Shin ne baisse même pas les yeux, se contente de fixer droit devant lui sans mot dire. Car s’il ne niera pas, il n’approuvera pas non plus ce constat frappant. Venir ici aujourd’hui lui semble déjà être un effort suffisant. Il laisse donc ses mots retomber à plat, comme un enfant bougon qui rechignerait à assumer ses torts ; l’écoute plutôt lui avouer qu’il est lui-même écœuré d’avoir formulé des mots si violents. Et il pourrait daigner tourner la tête vers lui pour le regarder, si seulement il ne venait pas de tout gâcher en remettant Reira sur le tapis. Il se retient alors de souffler et de lever les yeux au ciel, se contente de marmonner, le plus platement possible :

- Hm hm… Pourquoi on parle d’elle, de toute façon…

Lui c’est pour voir son cousin, qu’il a fait le déplacement ce soir, pas pour épiloguer sur la brune insupportable qui lui sert de petite amie, et Haru semble enfin le comprendre lorsqu’il cesse de s’attarder sur ce sujet, tourne plutôt les talons pour disparaître dans la cuisine. Et Shin, il reste planté là sans trop savoir quoi faire de ses dix doigts. Piqué devant le canapé, à ignorer ce que son cousin est parti faire exactement – quand est-ce qu’il a l’intention de revenir, sans trop oser non plus le rejoindre là-bas. Alors il attend, et lorsque Haru revient et le compare à la statue de la liberté, il se permet de lever le bras pour lui faire remarquer qu’il fait erreur sur la marchandise ; qu’il n’était alors pas la représentation la plus fidèle de l’emblème newyorkais. Et c’est toujours la même excuse qui ressort lorsqu’il l’accuse de ne jamais être venu le voir en quatre ans passés aux Etats-Unis, une histoire selon laquelle il ne l’aurait jamais laissé repartir, une histoire qui a toujours le don de lui faire lever les yeux au ciel.

- Je t’aurais pas coincé, abuse pas… J’oserais pas… T’es libre de tes mouvements quand t’es avec moi.

A son grand damne. Car sans doute que si Shin s’écoutait, il enfermerait son cousin dans une jolie cage dorée, juste pour être sûr que jamais il ne se détourne de lui ; ne le laisse seul, abandonné. Mais ça le terrifie un peu, quand il pense comme ça, et ça le terrifie encore plus que Haru puisse apprendre cela un jour, alors il chasse bien vite ces idées de son esprit, reprend plutôt sa place sur le canapé.

- T’es juste un seumard qui regrette de jamais être venu me voir là-bas, se contente-t-il de lui répondre lorsque le brun se permet de critiquer la statue en question.

Et déjà, il s’empare du bol de nouilles qu’il lui sert, le cœur un peu réchauffé par les effluves de son plat préféré – surtout réchauffé par la présence de sa personne préférée, comme si la Terre avait enfin recommencé à tourner dans son axe le plus naturel. C’est trop naturellement qu’il lui demande ce qu’il a fait depuis qu’ils se sont vus pour la dernière fois, comme s’il n’était pas parti en quête de la moindre information sur ce fabuleux réseau qu’est Instagram, et sans surprise, Haru lui raconte avoir changé d’air. Il n’a pas besoin de lui demander pour savoir qu’il est parti à Hawaii ; qu’il était avec sa cruche de petite amie, et qu’il s’est de toute évidence bien amusé. Alors il se contente de hocher la tête succinctement, sans l’inviter à épiloguer sur un sujet qui ne ferait que l’irriter, souffle sur les nouilles coincées entre ses baguettes en répondant lorsqu’il lui retourne sa question :

- J’ai bossé.

Et c’est vrai, c’est ce qu’il a fait, Shin. Il n’a fait que ça, n’ayant pas le cœur à sortir, et encore moins à voyager – ne restait que le boulot pour espérer oublier les soucis qui lui tenaillaient l’esprit, et le sac à puce qui aime un peu trop squatter chez lui, aussi, pour lequel il a monté un arbre à chat il y a deux semaines. Mais tranquille, c'est pas son chat. C’était juste pour tuer le temps. Et tout en mâchonnant son repas, il ajoute :

- Mais ouais, j’avais une soirée pour la marque, donc bon, fallait bien marquer le coup un peu.

Ce n’est pas qu’il avait besoin de changement, Shin – pas du tout –, et déjà, il ajoute :

- Tu peux me dire que j’suis BG comme ça, hein, sois pas timide.

le déshonneur avant la mort

-- ft shin

✩ ○.⋆☽ ⋆.○ ✩

Il existe de ces sujets qui ne doivent pas être abordés, de ces sujets qui sèment la discorde et les reproches. Le premier c’est Reira, le deuxième c’est ce choix que t’as fait en ne mettant jamais les pieds aux États-Unis pendant qu’il y était. Il aura beau dire ce qu’il veut Shin, prétendre jusqu’à la fin des temps qu’il n’aurait pas trouvé un moyen pour te garder près de lui t’es persuadé du contraire. Car il aurait suffi d’un regard triste, d’une seule larme pour que tu changes d’avis.

T’es trop sensible à ses émotions,
Bien trop réceptifs à ses caprices et incapable de lui dire non.

Mais forcément d’avoir résisté, de n’avoir jamais les pieds sur ce continent si éloigné t’as aussi frustré quelque part. Car t’aurais bien aimé voir à quoi ressemble l’Amérique du nord, t’aurais adoré faire comme tous ces touristes une photo sur Hollywood boulevard et laisser tes pieds s’enfoncer dans le sable brulant de Malibu. Même cette foutue statue oxydée par le temps t’aurais apprécié la voir en vraie. Voir si elle est aussi grande que tu l’imagines ou si en réalité elle ne fait pas tant d’effet. Et ça Shin, il semble le lire en toi. Car lui aussi il te connait par cœur.

- Moi un seumard ? La façon dont tu mens…

Et comme lui tu t’affaires sur ton plat de nouille, préfère te concentrer sur ça plutôt que d’avouer que t’aurais peut-être dû y aller dans ce foutu pays pendant qu’il y vivait. Shin semble comprendre, Shin te demande plutôt ce que t’as fait pendant que vous étiez en guerre froide et trop honnêtement tu lui racontes que t’as été atteint par votre dispute, que Reira t’as obligé à bouger et qu’après ça t’étais au moins un peu plus relaxé. Un voyage sympa – plus que sympa en réalité. Un voyage qui te laisse des souvenirs marquant dans la tête mais que tu ne peux pas lui dévoiler puisqu’on touche au sujet interdit qu’est Reira. Tu pinces alors légèrement les lèvres, essaie de retenir ce sourire en coin débile qui tente si fortement de s’immiscer sur ton visage et lui demande en retour ce qu’il a fait de tout ce temps en continuant de manger. T’apprends alors qu’il a bossé, enfin… t’apprends… c’est un grand mot. Car il bosse constamment Shin, depuis toujours il ne fait que ça. Si toi t’étais incapable d’écouter sagement, de faire tes devoirs en temps et en heure lui c’était tout le contraire. Il a toujours été plus discipliné, toujours plus déterminé.

- Oui bon… Tu bosses tout le temps, j’imaginais déjà que tu t’étais pas arrêté… Mais mis à part ça ?

Toi tu notes qu’il a changé sa couleur de cheveux, qu’il a des griffures sur l’avant-bras et un peu trop évasif pour qu’il n’y ait que le travail.

- T’aimes trop les compliments toi… Mais ouais j’avoue t’es tout le temps frais sale chien …

Une tape sur son épaule que tu viens mettre, un peu d’eau fraiche que tu viens boire avant d’ajouter l’air de rien :

- Mais sinon… Tu vois une meuf … ? T’as v’là les griffures sur les avant-bras j’sais pas ce que tu lui as fait mais ça devait être du sale….

le déshonneur avant la mort

-- ft haru

✩ ○.⋆☽ ⋆.○ ✩

Il lui demande ce qu’il a fait au-delà de travailler, et en toute franchise, Shin ne sait pas trop quoi lui répondre. Car il n’a pas fait grand-chose de plus ; a arrêté de sortir, voir des filles, car l’envie n’était plus au beau fixe. Même sa famille, il les a un peu évités, par crainte de croiser son cousin ou simplement qu’ils lui parlent de lui. Il n’a pas non plus envie de lui parler de ce chat qui n’est pas son chat, car c’est la honte, il sent que Haru va le vanner, s’il apprend qu’il lui a commandé le meilleur arbre à chat du marché. Alors il se creuse la tête ; passe une main gênée dans sa nuque lorsqu’il répète :

- A part ça ? Ben, euh… j’ai fait du sport ? Rencontré des gens pour le boulot ? J’ai organisé un truc, aussi, pour fêter le succès de la marque et faire en sorte qu’on se fasse pas oublier, tu connais.

Il hausse alors les épaules ; s’efforce de faire diversion en lui demandant de le complimenter sur son changement capillaire. Car il vit pour les compliments ; la reconnaissance, encore plus lorsqu’ils sortent de la bouche de son cousin. Et lorsque ce dernier lui avoue qu’il est toujours frais, il laisse un petit sourire satisfait s’étirer ; lui répond le plus naturellement du monde :

- C’est les gènes Seomun, ça…

Car il n’accordera aucun mérite au connard qui lui sert de père, ce lâche dont la présence n’a toujours été qu’un tragique mirage dans sa vie d’enfant. Mais la diversion n’aura pas tenu bien longtemps, car déjà le brun lui demande s’il voit quelqu’un ; se permet d’émettre toute une enfilade de théories sur la base des griffures qui lui strient le bras, et il baisse alors des yeux curieux vers ses bras nus, sans trop comprendre. Car ça fait des semaines qu’il n’a vu personne, Shin ; qu’il se noie dans le travail, oubliant bien aisément ses vices et sa fascination pour le corps des plus belles femmes. Puis il voit les griffures du chat, et il comprend. Se met alors à rire nerveusement, ses doigts qui viennent se réfugier dans ses cheveux pour se donner une contenance, car il va être bien obligé de cracher le morceau, tout compte fait.

- Ah… ouais, elle… tu veux la voir ? Pour une fois je pourrais bien avoir quelqu’un à te présenter…

Car il n’est pas vraiment sérieux avec les femmes, Shin ; il les prend, puis il les jette, sans états d’âme et encore moins d’attachement. Et il se contorsionne un peu pour prendre le portable perdu au fond de la poche de son jean ; cherche dans ses dernières photos, jusqu’à trouver le cliché du chat vautré dans un carton, à trente centimètres d’un gros arbre à chat. Et il lui glisse le portable entre les mains, lâchant d’un air las :

- Voilà, c’est elle. Lui ? T’aurais bien fini par voir ce truc la prochaine fois que tu serais venu à l’appart’, de toute façon… J’ai passé une heure à monter ce truc de merde, tout ça pour que ce chien de la casse monte jamais dessus… Je le hais.

le déshonneur avant la mort

-- ft shin

✩ ○.⋆☽ ⋆.○ ✩

C’est son quotidien qu’il t’explique, sans artifices ni histoire croustillante à se mettre sous la dent. Il a juste continué de vivre Shin et à sa façon de te raconter les choses, d’éviter ton regard au maximum tu te dis qu’il a peut-être plus survit que réellement vécu ces derniers temps. Si toi t’avais Reira pour te sortir de ton marasme, c’était pas le cas de Shin qui finalement n’a que très peu de monde autour de lui au quotidien. Forcément que ça te fait mal au cœur de l’imaginer seul, se rendre tout aussi malade que toi de son côté sans pouvoir sortir ne serait-ce que cinq minutes la tête de l’eau pour respirer. Tu te dis que le temps a dû être long pour lui aussi et ça te rend triste mais pour ne pas le gêner plus qu’il semble l’être t’agis comme si tu ne lisais pas entre les lignes, t’hoches de la tête et répond l’air de rien :

- C’est vrai que t’as les épaules plus larges qu’il y a quelques temps maintenant que tu le dis… T’es vraiment comme le vin toi, plus les années passent mieux t’es.

Tu le penses, du plus profond de ton cœur que Shin est de plus en plus beau, de plus en plus charismatique. Ça vient peut-être des gênes de la famille ouais, car ton père avait le même genre d’aura, un charme particulier qui forçait les gens à se concentrer sur lui quand il entrait dans une pièce. Il attirait l’attention, n’avait pas besoin d’en faire des tonnes pour être remarquable. Exactement comme Shin ouais et ça te fait sourire que ça soit le seul enfant qu’il n'ait pas conçu qui lui ressemble le plus. T’es content pour ton cousin et tandis que tu coupes en deux un morceau de viande pour le partager avec ton cousin, le glisser dans son assiette tu ajoutes :

- T’es comme papa c’est vrai, pas de doute que ça vienne des gênes !

Mais malgré tout, t’as l’impression qu’il manque quelques détails à son récit. Qu’il te cache quelque chose ton frère. Il y a ces marques sur ses bras qui te laissent perplexe, ces marques qui semblent bestiales et à la fois toute fraiche. Il a sauté une meuf juste avant de venir ? Dans les faits, ça te regard pas du tout mais t’es curieux quand il s'agit de Shin. Puis si c’est le cas pourquoi il te le cacherait ? Elle est importante pour lui ? Tu tiens plus, lui pose la question et à son rire nerveux tu penses avoir touché dans le mille. T’es presque fier de toi Haru – perplexe car ça n’est jamais arrivé mais t’es quand même prêt à voir la fille qu’il fait grimper au plafond quand il t’annonce qu’il va te la montrer. Tu te penches alors sur la table basse, laisse tes grands yeux noirs glissé sur l’écran de son portable et te met à fixer comme un con un chat qui se lèche les pattes dans un carton bien trop grand pour lui. Silencieux, tu relèves les yeux vers Shin. T’es perdu.

- Depuis quand t’aimes les animaux toi … ?

La vraie question en réalité c’est : depuis quand toi, tu as un chat ? Car il a jamais montré de l’amour ou de la haine envers les animaux, il a toujours semblé désintéressé par chat et chien. Et pourtant aujourd’hui il te parle d’avoir monté un arbre à chat, détester l’animal en question car il ne l’utilise pas. Ça te chamboule, surement plus que l’arrivée d’une femme constante dans sa vie.

- Attend, attend doucement là… T’as un chat mais tu sais même pas si c’est une meuf ou un mec ? Mais il sort d’où ? Depuis quand … ?

Trop de question, bien trop de question te trotte dans la tête et pourtant le seul truc que t’arrive à lui lâcher c’est :

- Tu m’as remplacé par un chat ???

T'es outré, tu sens la trahison, disgrâce à plein nez.

le déshonneur avant la mort

-- ft haru

✩ ○.⋆☽ ⋆.○ ✩

Il le brosse dans le sens du poil, Haru ; applique de la colle sur le cœur fêlé par les paroles prononcées ce soir-là, chaque fois qu’il lui fait un nouveau compliment. Paraît que comme le vin, il se bonifie d’année en année ; qu’il est comme leur père, et ces mots poussent un petit sourire satisfait sur ses lèvres, l’amènent à bomber un peu le torse, en réclamant plus. Attiré par la lumière et la gloire – Shin, il ne demande que ça, qu’on le voit à sa juste valeur. Et il a quand même un brin de curiosité dans la voix lorsqu’il se tourne vers lui pour lui demander :

- Ah ouais ? En quoi je suis comme lui ?

Ça le touche, que son cousin puisse le comparer à lui, et cet homme qui l’a élevé comme un quatrième fils lui manque terriblement, alors il a envie de se le remémorer un peu avec Haru ; honorer l’homme qu’il était, et se rappeler les beaux moments qu’il leur a offert. Ne pas laisser son souvenir s’effacer. Et déjà, son cousin semble s’intéresser à sa vie amoureuse ; l’interroge sur les marques rougies qui strient son bras. Il fait totalement fausse route, en réalité, mais Shin s’amuse un peu avec lui en ne lui disant pas tout de suite ; en prétendant qu’il va lui montrer l’autrice de ces crimes, alors même qu’il fouille dans son téléphone à la recherche d’une photo du sac à puces qui prend un peu trop ses aises chez lui. Et l’ombre d’un sourire se dessine en coin en voyant Haru se pencher vers le téléphone, ses grands yeux curieux portés vers l’écran ; une lueur d’amusement embrase ses yeux lorsqu’ils croisent son regard perdu. Il lui demande depuis quand il aime les animaux, et une petite moue dégoûtée se peint déjà sur ses traits, alors qu’il répond :

- Mais je les aime pas ? T’es fou, toi.

C’est tellement crédible, lorsqu’il tient au creux de sa main l’un de ces clichés de personne suffisamment gaga de leur animal de compagnie pour le prendre en photo dans toutes les situations, preuve tangible du temps qu’il a passé à monter un arbre à chat pour ses beaux yeux clairs. Il lui parle de cet arbre à chat, d’ailleurs, ce foutu truc encombrant qui défigure son salon et lui a coûté une blinde sur un site marchand, tout ça pour que la sale bête préfère jouer avec le putain de carton qui le contenait. Et les questions se bousculent dans la bouche de son cousin, le prenant un peu de court – car il semble se faire des films, imaginer qu’il a adopté cet animal ingrat lorsque ce n’est pas son chat.

- Mais non mais c’est pas mon chat ? Il doit appartenir à quelqu’un dans le quartier, mais il aime trop rentrer par la fenêtre et prendre ses aises à l’appart’. Mais il est pas à moi, dans ma grande générosité je le laisse juste squatter un peu.

Il hausse alors les épaules, un peu gêné d’avouer qu’il peut se montrer si gentil – et il s’attend à tout, absolument tout plutôt que la question qui s’apprête à fuser. Ses yeux bruns braqués sur son cousin, il le dévisage sans mot dire, perplexe de le voir s’insurger à l’idée qu’il l’ai remplacé par un chat – c’est plutôt le genre de chose qu’il pourrait dire lui, ça, et ce constat pousse un éclat de rire hors de ses lèvres. Il est en fou rire, Shin, secoue désespérément la tête sans parvenir à répondre quoi que ce soit, et il lui faudra attendre de s’être calmé un peu, avoir repris son souffle pour tenter de lui expliquer :

- Mais non je t’ai pas remplacé par un chat… ? Je t’ai dit que c’était pas mon chat, en plus, suis un peu… Tu crois quand même pas que cette sale bête va prendre ta place ? Je lui fais juste la charité…

Il laisse échapper un dernier petit éclat de rire, secoue la tête d’un air fatigué avant de reprendre quelques bouchées de nouilles – et c’est avec toute la mauvaise foi qu’on lui connaît qu’il ajoute :

- Heureusement que je réagis pas comme ça quand t’as littéralement un chien et une meuf…

le déshonneur avant la mort

-- ft shin

✩ ○.⋆☽ ⋆.○ ✩

Tu le connais Shin, beaucoup trop bien pour ne pas comprendre qu’il veut que tu le sauces, souhaite entendre de joli mot sortir d’entre tes lippes pour effacer ceux prononcés lors de votre dispute. Si la satisfaction de ton cousin tient à quelque chose de si simple tu ne peux que le lui offrir, sans aucune jalousie, once de fierté car de vous deux tu devrais être la copie du géniteur et pas lui, tu réponds à sa question :

- J’sais pas trop comment expliquer mais tous les deux vous avez la tchatche, le petit truc qui fait que quand vous parlez on ne peut que vous écoutez. Papa n’a pas créé l’entreprise du siècle comme toi t’es à un rien de le faire mais il a réussi quand même à imposer sa petite épicerie à l’ancienne dans un monde qui se voulait high-tech tu vois ? Il a cru en ses projets, s’en est donné la peine et ça me fait penser à toi qui ne lâche rien. Puis l’un comme l’autre vous avez beaucoup de charme, trop d’amour pour les costards… La liste est longue hein, mais toujours t’as des mimiques qui me font penser à lui et c’est cool de le retrouver alors qu’il est plus là…

Un tendre sourire s’étire sur tes lèvres. L’un de ces sourires spontanés, presque rêveur. Car maintenant qu’il est plus là appa, pour entretenir son souvenir tout passe par de petite chose comme celle-ci. Que ce soit Shin et ses mimiques, maman qui prépare le repas préféré de ton père, Eunchang qui écoute sa chanson préférée en boucle depuis des mois dorénavant. Chacun fait vivre à sa manière un petit bout de lui et t’es sûr que d’où il est, il est fier de vous.

Et avant que le sujet ne prenne trop de place, que les souvenirs avec papa ne deviennent douloureux car son absence est encore trop pesante pour le moment vous changez de sujet, c’est toi en réalité qui change de sujet. Car t’as d’autres questions et Shin semble prêt à te dévoiler qui partage sa vie en ce moment. C’est direct comme réponse, étonnant même le connaissant mais t’es pas prêt pour la révélation car quand il te parle d’un chat le brun, t’as l’impression de nager en plein délire. Comment ça Shin il a un chat ? Il n’a jamais été l’ami des animaux lui, il a toujours été plutôt du genre à les repousser, souffler quand il prenait trop de place dans la vie des gens. Et maintenant il est l’heureux détenteur d’un gros matou ? T’es ébaubi.

- Ah bah ouais, ça se voit tu l’aimes pas hein… Tellement que t’as acheté un arbre à chat qui fait ça ?

Sourcil que t’arques, à l’écoute de sa réponse. Semble-t-il que le fameux chat appartienne à un voisin du quartier, qu’il se balade à son aise et a choisi d’établir ses quartiers chez Shin. Ça se tient comme explication, ça t’étonne pas vraiment qu’un chat se balade et choisisse de se poser aléatoirement chez quelqu’un qu’il ne connait pas. Ce qui t’étonne c’est que Shin l’ait laissé faire, que Shin lui achète en son âme et conscience du matériel pour que l’animal soit à son aise chez lui. Pile quand vous ne vous parliez plus ? Tu ne vois qu’une explication. Il t’a remplacé le brun et ça, c’est un coup bas.

- Comme par hasard tu te mets à faire la charité quand on se parle plus ? Juste toi ? C’est un peu gros … Mais si tu le dis hein… Après t’as le droit d’avoir adopté un chat …

Une bouchée de nouille que tu prends en attendant sa réponse. Et forcément que tu ricanes en l’entendant parler de réaction poussée lorsqu’il est le pire à ce jeu-là. t’avales d’abord ce que t’as dans la bouche avant de reprendre la parole, lui dire de façon ironique :

- Ah bah c’est clair … T’imagines toi qui réagit mal car j’aime bien un chien et que j’ai une meuf … ? Non vraiment impossible à imaginer… Grave pas ton genre…

Prunelles que tu laisses rouler avant de demander l’air de rien :

- Il s’appelle comment d’ailleurs ton chat qui n’est pas ton chat ?

le déshonneur avant la mort

-- ft haru

✩ ○.⋆☽ ⋆.○ ✩

Un sourire s’invite sur ses lèvres, car quel plus beau compliment que de se faire comparer si élogieusement à l’homme qui lui a toujours servi de père, lui qui s’est fait renier par son géniteur ? Les mots sont doux dans la bouche de Haru, et plutôt que d’être une simple pêche aux compliments abreuvée d’ego, cela devient un moment plein de tendresse pour cet homme qu’ils ont tous deux connu ; que la vie leur a arraché trop tôt. Et à mesure que les phrases se succèdent dans la bouche de son cousin, il sent l’émotion le gagner, lui que rien ne semble atteindre – sauf lorsque Haru s’en mêle –, alors il est bien content quand ce dernier change de sujet, laisse sa curiosité lui poser mille et une questions. Il ne faudrait pas qu’il le voit craquer ; qu’il voit des perles salines rougir ses yeux perçants. Il n’a pas craqué de tout l’enterrement, de tous les préparatifs et tout ce qui a suivi, alors il n’y a pas de raison que cela arrive maintenant. A la place, ils parlent de ce chat qui aime un peu trop prendre ses aises chez lui, comme s’il était chez lui – et Shin se défend d’aimer les animaux, fronce un peu les sourcils lorsque son cousin souligne qu’il lui a carrément acheté un arbre à chat.

- Et… ben… oui ben ça veut rien dire ! C’est rien, c’est de la merde ce truc !

Il se défend comme il peut, mais la vérité c’est qu’il se retrouve à court de mots ; à court d’excuses. Haru le place face à ses actions ; face à des faits qu’il aime un peu trop ignorer. Alors il essaie de se dépatouiller de toute cette histoire ; lui explique que ce chat ne lui appartient pas, que c’est seulement un squatteur du quartier, et son cousin lui demande, l’air outré, s’il a osé le remplacer. Il ouvre alors les yeux un peu plus grand, Shin ; se met à rire de manière incontrôlable, car Haru ne lui a jamais montré pareille jalousie pour quelque chose d’aussi futile – et ça lui fait plaisir, car dans son cerveau bousillé, c’est là la plus grand preuve d’amour possible. Sauf que son cousin ne semble pas le croire. Son cousin, il l’accuse d’avoir adopté un chat, et à ces mots il manque s’étouffer avec ses nouilles, lui répond trop spontanément :

- Mais ça a zéro rapport ? Ca fait un bout de temps qu’il squatte ici hein, juste j’ai acheté ce truc de merde la semaine dernière. Et j’ai pas adopté de chat ! Putain, je savais que j’aurais pas dû t’en parler, que tu te fous de ma gueule toi…

Il pousse un soupir, las – regrettant amèrement de ne pas avoir continué à lui faire miroiter que c’était une fille aux ongles un peu trop longs qui lui avait ainsi défiguré les bras, et sûrement le dos, tant qu’à faire –, et fait déjà remarquer qu’il n’y a pas à réagir de manière si excessive ; qu’heureusement qu’il ne réagit pas ainsi avec Haru, qui a littéralement un chien et une petite amie. Et ce dernier ricane ; ce dernier lui répond de manière sarcastique que ce n’est pas son genre, en effet, le poussant à arquer les sourcils d’un air outré.

- Ben non ? Je comprends très bien le second degré mais là je capte pas pourquoi tu l’utilises… Canalise-toi.

Il reprend quelques bouchées de pâtes, écoutant son cousin lui demander comment s’appelle ce chat, et c’est trop spontanément qu’il lui répond :

- Ben Goyangi. Enfin non, il a pas de nom, quoi.

Il se reprend de justesse, car il comprend déjà ce que va faire Haru ; qu’il va utiliser cela contre lui, prétendre qu’il ne devrait même pas avoir de nom si ce n’était réellement pas son chat. Et il a la flemme de ça.

- Bon, on arrête de parler de lui, un peu ? J’vais finir par croire tu l’aimes plus que moi… C’est quand que tu m’emmènes en vacances, pour te faire pardonner l’autre jour là, puis d’être aussi lourd avec cette histoire de chat ? Moi aussi je mérite.

le déshonneur avant la mort

-- ft shin

✩ ○.⋆☽ ⋆.○ ✩

T’hausses légèrement les sourcils, fixe ton cousin s’exciter pour pas grand-chose. A croire qu’il se sent coupable, sait que dans le fond t’as raison quand tu dis qu’il t’a légèrement remplacé avec ce chat. Si c’est réellement le cas est-ce que tu peux l’en vouloir d’avoir cherché du réconfort quelque part lorsque toi, t’avais Reira à tes côtés pour tenter de penser à autre chose que cette dispute durant ces derniers mois ? Tu ne peux rien lui dire à ton cousin, il a fait comme il a pu et si c’est grâce à un chat qu’il a tenu le coup alors bien, tu feras avec.

- Non non j’me fou pas de ta gueule je te le jure ? J’suis juste étonné car c’est pas ton genre de base mais en soi c’est cool si enfin tu te ramollis un peu et que t’arrives à apprécier des êtres vivants qui ne portent pas ton nom…

Car Shin se montre alors au moins un peu plus humain, prouve à sa façon qu’il peut être sensible à autre chose que ta personne et son cercle familial restreint. Peut-être que cette dispute a eu du bon pour lui, qu’il lui fallait ce temps là pour comprendre que sa vie ne peut pas tourner autour d’une seule et unique personne, d’un seul et unique but. C’est juste bizarre, un peu difficile à encaisser quand on a été pendant si longtemps la personne ressource. Pendant un instant t’as eu l’impression de perdre ta place de leader dans son cœur de pierre avant de te rendre compte que c’est juste la normalité – la vie est comme ça. Lui aussi a tout le long de sa vie du te partager avec le reste de la famille, une multitude d’amis et maintenant se doit de le faire en ajoutant à la liste ta petite-amie, son chien que t’apprécie un peu trop. Ce qui te fait rire, c’est qu’il ose faire la remarque Shin, ose agir comme si lui n’abusait jamais dans ses réactions et n’était pas du genre à hurler au scandale dès que quelqu’un s’approche un peu trop près de toi, semble prendre une toute petite place dans ton cœur. Parait-il que ton sarcasme n’est pas justifié, que tu devrais doser et t’hoches de la tête vivement, l’air faussement bête et niais quand tu lui réponds :

- Oui oui j’vais me canaliser, t’as raison…

Et déjà tu te remets à manger, entre deux bouchés lui demande comment s’appelle le fameux chat qu’il n’a absolument pas adopté mais qui quand même semble avoir un petit surnom qui finalement colle bien à ce que t’imagines venant de Shin. Lui chercher un prénom de fou ? Pas son genre. Juste l’appeler le chat ça colle bien mieux au personnage et forcément tu ricanes, Haru. Bien évidemment que tu ne peux que rire quand il tente de se rattraper.

- Mais c’est son vrai nom genre il a un collier ou c’est toi t’as inventé ? C’est mignon hein… Un peu cliché comme les gens qu’appellent leur chat Neko mais bon… Tu peux pas être brillant dans tout !

Cette fois, tu te fous bien de sa gueule et c’est surement la fois de trop car ton cousin te demande d’arrêter de parler de ce foutu chat. T’hoches alors de la tête, l’écoute sagement te demander quand est-ce que vous partez en vacances parait-il que t’as des choses à te faire pardonner. Parait-il aussi qu’il mérite que tu l'emmènes en vacances et tu clignes des yeux, reste silencieux un instant avant de dire :

- Toi tu veux partir en vacances … ? C’est… T’as trop changé en deux mois wesh ? D’habitude tu me réponds toujours que t’es trop occupé … T’en a marre du boulot c’est bon ?

Si d’un côté, ça te rassure que ton cousin veuille un peu se reposer t’es malgré tout inquiet car de base, ça ne lui ressemble pas.

- Et t’aimerais partir où ?

Que tu lui demandes curieux, car toi là tout de suite tu sais pas trop ou est-ce que t’aimerais bouger. Puis quitte à bouger avec ton cousin, autant qu’il choisisse un endroit qui lui donne vraiment envie.

- D’ailleurs excuse-moi mais de nous deux c’est toi le friqué donc toi amène-moi en vacances ? Soit mon sugar daddy un peu ?

le déshonneur avant la mort

-- ft haru

✩ ○.⋆☽ ⋆.○ ✩

Shin, il a le toupet de prétendre réagir bien mieux que lui lorsqu’on parle des autres planètes de son système solaire – de Reira et ce roquet qu’elle traîne partout derrière elle, et cette fois il parle bien de Pucci, pas de Haru. Il s’offusque du sarcasme qu’il retrouve dans la voix de son cousin qu’il juge injustifié, l’invite à se canaliser, et lorsque ce dernier va dans son sens, il aura la fierté de considérer qu’il l’a écouté, lorsque dans le fond il le sait, il ne fait que se moquer un peu plus de lui. Mais tant pis. Déjà, Haru se montre plus curieux, lui demande si ce chat à un nom, et il lui fait alors part du prénom qu’il utilise avec lui, classique au possible, se reprend bien vite pour se défendre de lui avoir donné un nom. Ça semble le faire rire, son cousin, et lui, ça ne fait que le renfrogner un peu plus ; c’est avec mauvaise humeur qu’il répond à ses nouvelles questions :

- Mais j’te dis qu’il a pas de nom ? Je t’ai dit que c’était même pas mon chat, il te faut quoi de plus ? Il a pas de collier, je sais pas comment il s’appelle donc c’était juste plus simple que de l’appeler « eh toi ».

Boudeur, il se tourne vers ses nouilles, qui elles ont le mérite de ne pas le faire chier avec un chat à la con ; il n’aurait jamais dû lui en parler, il ne sait pas ce qu’il lui est passé par la tête pour croire que Haru ne se fouterait pas de sa gueule pour un truc aussi débile, mais il a été bien naïf. Et ça ne lui ressemble pas. Alors il lui fait part de cela ; ajoute déjà qu’il devrait l’emmener en vacances, lui aussi, qu’il mérite. Et ça semble choquer son cousin, il s’attend presque à voir ses yeux sortir de leurs orbites comme un personnage de Tex Avery tandis qu’il accueille sa demande en silence, jusqu’à ce qu’il déclare que ces deux mois l’ont changé ; qu’il n’aurait jamais pris ce temps pour lui, avant cela.

Mais la vérité, c’est juste qu’il est jaloux, Shin.

Jaloux comme un pou de voir qu’il est parti vivre sa meilleure vie avec sa copine de l’autre côté du globe, lorsque lui est resté moisir ici. Il n’a pas montré la même verve à venir le voir aux Etats-Unis. Alors forcément, si Reira a eu, Shin veut aussi. Il veut, mais en mieux. Il veut un voyage encore plus cool que celui qu’il a partagé avec elle ; qu’ils s’amusent encore plus, et qu’elle soit aussi malade qu’il a pu l’être devant Instagram lorsqu’ils sont partis à Hawaii. Mais tout ça, il ne peut pas vraiment le dire à Haru, alors pour donner le change, il se contente de hausser les épaules, lui répond évasivement :

- Abuse pas… J’ai toujours une entreprise à faire tourner… Mais j’sais pas… on s’est pas parlé pendant un moment, j’ai envie de retrouver mon cousin un peu.

Ils ne se sont pas parlé pendant une éternité, et en réalité, cette excuse n’est pas moins vraie que la jalousie sous-jacente. Haru lui a juste manqué, et il a envie de créer de nouveaux souvenirs avec lui ; rattraper le temps perdu, car merde, ils ont déjà passé cinq ans séparés par un océan. Pourquoi se fatiguer à rajouter des mois en rab’ ? Et lorsqu’il lui demande où il souhaiterait aller, il réfléchit un instant, car l’idée est sortie impulsivement, et c’est vrai qu’il n’avait même pas réfléchi à ça.

- Hm… La Californie ? Depuis le temps que je te dis que j’ai des trucs à te montrer là-bas… Ou alors Paris. Pourquoi pas Paris, ça a l’air classe. Puis on découvrirait tous les deux pour le coup, à moins que tu sois déjà allé sans moi sale traître ?

Regard suspicieux lancé dans sa direction, alors qu’il reprend une bouchée de pâtes ; l’écoute lui demander de plutôt payer lui les vacances. Et Haru, il n’aura même pas besoin de batailler ; argumenter des dizaines de minutes durant qu’il lâche déjà, bien trop simplement :

- Okay. Tout ce que tu voudras bébé.

Il tend la main vers lui comme s’il allait lui caresser la joue, mais finit par seulement lui mettre une pichenette en ricanant, avant de lui demander plus sérieusement :

- Y a d’autres endroits qui te feraient envie, toi ?

le déshonneur avant la mort

-- ft shin

✩ ○.⋆☽ ⋆.○ ✩

Est-ce que t’es étonné que ton cousin maintienne ses dires, continue de s’enfoncer dans son mensonge lorsque dans ses yeux noirs brille une petite honte qu’il ne peut pas te cacher ?  Absolument pas. Car tu sais comment il est, sait qu’il ne veut pas montrer l’intérêt qu’il porte aux autres par peur que ça lui fasse du tort. Alors tu n’ajoutes rien, te contente de le laisser s’enflammer tout seul en rabâchant qu’il n’a pas donné de nom à ce foutu chat.  Et tu pourrais le saouler encore un peu, lui dire qu’il pue le mensonge mais ça serait redondant alors tu te tais, le laisse changer de sujet à ton cousin. Il préfère parler vacances, te quémander de lui en offrir et ça, c’est le genre de conversation inattendu venant de lui. Assez pour que tu lui demandes ce qu’il se passe pour qu’il soit prêt à prendre un peu de repos si soudainement. Parait-il qu’il veut juste passer un peu de temps avec toi, que la distance établi ces derniers mois l’a assez saoulé pour qu’il veuille rattraper le temps perdu.

Et sur ça, tu ne peux pas le contredire car pour toi aussi le temps a semblé long. Très long même. Il n’y pas un seul jour durant lequel tu n’as pas pensé à lui, pas un seul jour durant lequel tu ne t’es pas demandé ce qu’il pouvait bien faire pour ne pas se laisser dépérir comme toi tu le faisais. Alors bien évidemment que t’es d’accord pour passer du temps avec lui, le seul hic c’est que t’es parti y’a vraiment très peu de temps en vacances, t’as pas envie d’abuser de la gentillesse de maman pour garder l’épicerie pendant que toi tu te la coule douce.

- Moi aussi j’veux on se fasse un voyage mais ça se prévoie, tu voudrais partir quand ?

Que tu lui demandes sans attendre, prêt à préparer ce voyage entre cousin dont vous vous parlez depuis l’adolescence. C’est bien l’occasion de réaliser ce rêve, partir rien que tous les deux découvrir le monde comme vous n’avez jamais pu le faire jusqu’à présent. Ça te fait rêver rien que d’y penser et forcément, tu lui demandes où est-ce qu’il aimerait aller. T’es même pas un brin étonné d’entendre le mot Californie sortir d’entre ses lèvres mais quand il te parle de Paris c’est là que tes yeux s’illuminent.

- J’suis plus chaud pour Paris perso’ mais après si toi t’as vraiment envie de retourner en Californie ça me va aussi…

Epaules que tu hausses, prêt à tout accepter pour ton humain préféré. Si il veut la Californie alors tu t’y plieras, si il souhaite aller à Paris alors t’en sera ravis. Qu’importe le choix tant que tu partages cette expérience avec lui t’es heureux toi Haru et c’est encore mieux si il paie le nouveau riche. Du moins c’est ce que tu laisses entendre quand tu lui proposes de s’occuper de t’offrir le voyage mais bien sûr, faut toujours qu’il en fasse des tonnes ton cousin. Il ne peut pas répondre simplement faut qu’il use de ses charmes, te parle comme si t’étais sa petite meuf. Il y a ce surnom horripilant sortant de sa bouche – et pourtant si agréable sortant d’entre les lippes de Reira qui te tend sur place et alors quand il essaie de te caresser le visage tu recules trop vite, esquive comme si il avait la peste mais il est bien trop rapide et la pichenette atterrit là où elle devait atterrir.

- Putaaaain tu me gonfles quand tu fais ça bouuuuge sale fou ou j’te frappe !

Regard de travers que tu lui lances avant de te remettre bien droit comme un i à ta place ; frotter ton front du bout du doigt. Puis tu te remets à manger tout en réfléchissant à sa dernière question. Car des pays y’en a des tonnes à voir et cette question te donne une impression de déjà-vu, te rappelle à l’identique celle que t’as eu avec ta petite-amie sur les plages de sable fin à Hawaii. Ils se ressemblent un peu finalement, même si eux, ne le voient pas.

- Baah… J’aime bien les iles comme Bali, la Thaïlande et tout mais avec toi je me vois trop faire de la grosse ville en fait genre New York ça me tente ou même le Mexique ? Franchement c’est trop compliqué pour moi de faire un choix car qu’importe l’endroit je pense que je peux m’y amuser…

T’es pas bien difficile Haru, du genre à toujours te contenter de faire plaisir aux autres avant même de penser à toi et ce que tu veux réellement. C’est souvent ce qu’il te reproche Shin mais ça, tu ne peux pas le changer ça fait partie entièrement de ta personnalité.

- C’était long ces deux mois sans toi, tu sais ? Tu m’as manqué p’tit con.

Paroles prononcés tandis que tu fixes ton plat, t’applique à couper un morceau de poulet comme si tu ne venais pas de libérer le fin fond de ta pensée, ne venait pas de lui déclarer ce que t’as sur le cœur.

le déshonneur avant la mort

-- ft haru

✩ ○.⋆☽ ⋆.○ ✩

Lorsque son cousin lui demande quand il souhaiterait partir, Shin réfléchit un instant. Car un voyage, surtout à l’étranger comme il l’aimerait, ça ne s’improvise pas, et c’est de manière bien pragmatique qu’il finit par lui répondre :

- Hm, je ne sais pas, je ne peux pas planter la boîte comme ça, du jour au lendemain. Peut-être à la fin de l’été, du style fin août ou début septembre ?

Ça leur laisserait le temps de s’organiser dans leurs vies personnelles, et de réserver ce qui doit l’être, sans non plus s’aventurer dans la météo aléatoire de l’automne. Et la question de la date discutée, c’est désormais sur le lieu que Haru l’interroge. Il lui parle des Etats-Unis, de la Californie qu’il connaît si bien, plus particulièrement, mais il voit bien que c’est lorsqu’il mentionne la capitale française qu’un déclic semble se produire chez son cousin. Il a soudain le regard brillant d’intérêt ; l’air que plein de choses sont en train de se passer dans sa tête, et avant même qu’il n’ait à ouvrir la bouche, sa décision est prise : ce sera donc Paris.

- T’as vraiment une dent contre cette pauvre Californie, y a pas à pas vouloir aller quelque part à ce point… Mais c’est bon, c’est bon, on va à Paris.

Il l’embête un peu – car jamais, Ô grand jamais il ne cessera de l’embêter avec la Californie. Il l’a trop mal pris, lorsque le brun n’est pas venu lui rendre visite une seule fois en quatre ans ; s’est trop remis en question à l’époque pour laisser ce sujet bêtement tomber dans l’oubli. Et lorsque Haru lui demande de payer le voyage, il accepte sans rechigner ; se permet cependant de le faire un peu chier au passage, lui parle comme s’il était sa michto préférée – car c’est ce qu’il passe son temps à faire, après tout, tenter de le michtoner –, et faisant mine de lui caresser la joue, finit par lui envoyer une pichenette méritée. Haru aura beau essayer, il n’aura pas été suffisamment rapide pour l’esquiver, et face aux insultes qu’il lui adresse, Shin ne peut que ricaner en reprenant sa place dans le canapé.

- Arrête de te comporter comme une meuf qui essaie de me michtoner si tu veux pas que je te traite comme tel.

Curieux, il l’interroge alors sur les destinations qui lui le font rêver ; fronce un peu les sourcils lorsqu’il déclare ne se voir que faire des grosses villes avec lui, sans trop comprendre.

- Ben ? Pourquoi les îles tu te vois pas les faire avec moi ? T’es bizarre toi un peu.

Car lui, il est d’accord avec la dernière phrase qu’il a prononcé ; est persuadé que quelle que soit la destination, il ne pourra que passer de bonnes vacances tant qu’il est avec son cousin. Car il a besoin de lui pour donner des couleurs à sa vie ; que lorsqu’il n’est pas dans les parages, tout est tout de suite un peu plus terne. Sans doute se repose-t-il trop sur Haru ; sans doute lui donne-t-il une place trop importante, qu’il sera impossible de préserver éternellement, mais ça, Shin est bien incapable de le voir. Encore moins lorsque son frère lui avoue que ces deux mois lui ont semblé longs ; qu’il lui a manqué. Et fidèle à lui-même, le brun répond un peu à côté ; prétend ne pas être touché, lorsque son cœur fragilisé par ces dernières semaines et la dispute se reconstruit doucement en retrouvant la personne la plus importante de sa vie.

- Ouais, je sais, ma présence est tellement incroyable que je comprends qu’on puisse pas se passer de moi.

Et en jouant avec le plat au fond de son bol, il ajoute avec humeur :

- T’avais qu’à m’envoyer un message si je te manquais à ce point.

Sa fierté reprend le dessus, mais retombe déjà lorsqu’il rouvre la bouche – car Haru a ce don particulier de faire ressortir un côté de Shin qu’il ne montre avec nul autre ; cette humanité dont il lui reproche pourtant parfois de manquer.

- Toi aussi tu m’as manqué. Au cas où tu l'aurais pas remarqué.

Car ça ne lui ressemble pas de s’excuser ; de faire le premier pas, s’abaisser ainsi à ne pas tout attendre d’autrui. Mais il n’arrivait plus à supporter cette situation ; à évoluer dans le monde normalement sans la présence de son cousin à ses côtés.

le déshonneur avant la mort

-- ft shin

✩ ○.⋆☽ ⋆.○ ✩

Un hochement de tête pour valider sa proposition, fin aout ou début septembre c’est parfait pour toi. Au moins il ne fera pas trop chaud et en prime, t’as le temps de t’organiser avec ta mère pour le planning de l’épicerie. Comme toujours, tu te sens un peu coupable de t’en aller pour profiter et de laisser gérer aux autres le gagne-pain familial mais tu te rappelles que t’as une vie à vivre, te rappelles qu’elle serait malheureuse comme les pierres ta mère de te voir sacrifier ta propre vie lorsqu’elle a toujours tout fait pour que tu sois libre Alors tu tentes de chasser cette pensée de ta tête, te dis que peut-être elle devrait prendre un jeune étudiant pour quelques semaines pour l’aider si c’est trop compliqué pour elle de gérer les plus jeunes de la fratrie et le boulot en même temps ? Au pire pour une semaine ou deux l’une de tes sœurs se prêtera au jeu et lui filera un coup de main après l’école ?

Des solutions il y en a, il faut juste prendre le temps de les étudier.
Et tu l’aideras pour ça, ne laissera jamais ta mère galérer.

Et maintenant que la période est choisie, c’est la destination qui prend forme. Paris qui gagne la bataille, Paris qui te fait rêver rien que d’y penser. Car Paris semble magique, Paris c’est si loin que tu t’as du mal à imaginer mais t’en a toujours entendu que du bien, entendu que c’était un repère à artiste et rien que ça pour toi, c’est le paradis. Mais Paris c’est aussi connu pour être cher, extrêmement cher. Tu peux te payer ton voyage mais celui de ton cousin aussi ? Pas sûr que tu puisses, à moins de piocher dans tes économies ? Ce petit bout d’héritage qui t’a été légué mais qui doit faire pale figure comparé à ce que gagne ton cousin. Toi tu peux te contenter d’une auberge de jeunesse, d’un hôtel pas ouf mais lui ? T’es pas sûr qu’il passe un bon séjour dans ces conditions. Mais puisqu’il souhaite te faire passer pour une michto, t’hausses les épaules et lui répond :

- Non mais c’est bon, j’retire paie rien je m’occupe de tout, j’suis sûr je vais nous trouver un bon plan dans une auberge de jeunesse, une chambre à partager avec 5 ou 6 personnes… ça nous fera faire des connaissances… Tu vas kiffer !

Tu te penches alors sur la table, vient lui tapoter l’épaule comme si tu ne le voyais pas se décomposer après une telle proposition infame de ta part. Tu le connais Shin, il s’imagine déjà partager son espace, s’imagine surement aussi déjà devoir te partager avec des inconnus. Un cauchemar éveillé mais puisqu’il veut te faire chier toi aussi tu peux le suivre dans sa connerie jusqu’à que le sujet ne se tasse, que t’ai à parler de tes destinations de rêve, celles que tu te vois bien faire à ses côtés. Ça l’interloque un peu le brun face à toi quand tu dis que tu te vois plus faire des grandes villes que des iles à ses côtés, tu lui expliques alors :

- Je nous vois plus nous amuser là ou y’a de l’animation, des soirées et pleins d’activité que de juste nous prélasser au soleil sans rien faire ça tient qu’à ça ! Mais si t’as envie de te reposer et prendre des couleurs ça peut se faire aussi.

Vraiment tu t’en fous, tant que c’est à ses côtés tu peux t’accommoder de tout. Il t’a tellement manqué que même aller dans un trou à rat, dans un endroit qui ne te tenterait même pas de base tu serais prêt à accepter juste pour passer du temps avec ton frère. Tu te sens enfin heureux maintenant qu’il est revenu vers toi, t’es pleinement heureux. Car il t’a prouvé que tu comptais réellement pour lui, t’a fait comprendre à sa manière qu’il a compris la leçon et c’est amplement suffisant pour toi. Assez pour que tu lui dises sans honte qu’il t’a manqué, vraiment trop manqué même. Mais lui, il faut qu’il casse le moment « mignon » que tu viens d’instaurer.

- C’était la paix de Dieu quand même hein…

Regard en coin que tu lui jettes avant d’ajouter en riant :

- J’rigole, j’rigole !!!! Vas-y te vexe pas, commence pas…

Car tu le connais Shin, un mot de travers et il est capable d’en faire des tonnes mais contre toute attente il finit par t’avouer que toi aussi tu lui as manqué et tu souris. Pas peu fier qu’il te le dise, car c’est rare. Bien trop rare venant de lui.

- Plus jamais on se redispute comme ça c’est interdit… promis ?

Ton petit doigt que tu lui tends comme quand vous étiez encore des gamins, que tout ce que vous faisiez était conclu par ce geste qui à vos yeux étaient la plus grande des promesses. Celle que vous ne pouviez pas trahir.