Combien de temps, combien de jours, mois, années depuis qu'il était tombé dans cette psychose ? Lui qui la voyait comme l'unique et simple femme qui lui faudrait jusqu'à la fin de ses jours, cherchant à obtenir ce qu'il n'aura jamais, et pourtant il espérait, chaque nuit les yeux fermés alors qu'il n'arrivait pas à s'endormir. Il ne voyait qu'elle, sa muse, celle qui le gardait en vie, qui lui permettait de continuer à vivre comme un humain dans une société active, et pourtant, même si elle était si importante pour son courant vital, elle était également ce qui le rendait fou, ce qui le rendait incapable d'être une personne soi-disant normal. Il l'avait accepté une chose, il l'aimait, plus que tout, plus qu'il n'avait jamais aimé une personne de sa vie, plus que son propre sang, que ce qui était là pour lui depuis des années, elle avait pris tant de place dans son corps qu'il en devenait doucement dangereux. Kyubin, un jeune infirmier parmi d'autres, un petit génie qui avait suivi le monde au lieu de plonger dans ses exploits, il avait tout jeter pour elle. Et plusieurs fois, il se demandait s'il ne devait pas être plus agressif, si elle n'avait pas déjà eu le temps nécessaire pour se remettre de sa grande séparation avec l'ancien homme qui avait la place dont il rêvait tant. C'était lors de ses heures-ci, alors que la lune brillait au sein des étoiles dans le ciel sombre, une heure où le monde dort, qu'il se disait tous les interdits. Tous les crimes. Toutes les lois qu'il devrait ou pourrait briser pour atteindre son but. Il l'aimait, il voulait son cœur, son corps, elle, entière, l'obtenir. C'était maladif, c'était malsain, c'était tout sauf juste, et pourtant, il ne pouvait faire taire ses voix résonnant en lui à l'heure du crime.

Pas traînant sur le sol de l'appartement, il était rentré depuis quelque temps déjà, bien avant la petite course entre les chats de San habituelle de trois heures du matin, mais il semblait bel et bien que le marchand de sable n'arrivait pas à trouver une place pour Kyubin en cette nuit. Il s'était alors levé simplement pour prendre un verre d'eau, vivre le restant de la nuit et dormir le matin comme il faisait souvent, tout en regardant autour de lui, laissant ses pensées prendre le dessus sur sa personne. Il n'avait peut-être pas de connaissance en psychologie, malgré ses études en médecines, mais il savait très bien que ce n'était pas une heure pour écouter ce que sa triste cervelle pouvait lui raconter et pourtant, le voilà, à écouter le démon sur son épaule, pensant à toutes les façons possibles pour faire en sorte qu'un jour, elle soit sienne. Passant un coup sur les tables, retirant les poils de chat volant partout dans l'appartement, il finit par rester debout devant une fenêtre, regardant le ciel, le regard vide, comme un corps sans âme. Le bruit d'une porte s'ouvrant pourtant derrière lui annonça qu'il n'était pas la seule âme errante en cette nuit. « Retourne te coucher San, il est tard. » Dit-il calmement alors qu'il n'était pas vraiment le mieux placé pour parler. Certes, il venait de rentrer du boulot depuis quelques bonnes minutes, mais lui-même ne semblait pas vouloir rencontrer son matelas cette nuit. La lune était si belle, presque pleine, peut-être qu'elle l'appelait trop pour qu'il puisse laisser le confort de l'oubli prendre le dessus.

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les nuits sont bien longues ces derniers temps.

lorsque le jour se couche et que les étoiles se font leur place dans les cieux, lorsque l'appartement est calme et qu'il n'y a aucun bruit, lorsque la fatigue de la journée l'empêche de rester plus longtemps debout et qu'il retrouve le confort et la chaleur de son lit ; c'est ces moments-là que son cerveau semble choisir pour ressasser tout ce qui ne va pas. parce qu'il a beau dire, san, il a beau toujours avoir le sourire, toujours prétendre que tout va bien ; il n'est qu'un être humain. lui aussi a ses failles, ses faiblesses, ses soucis. lui aussi a des cassures et des blessures, un passé tourmenté qu'il tente comme il peut d'oublier, de camouffler derrière des sourires et des promesses que tout va bien. pourtant il y a des fois, ou non, tout ne va pas bien. parce qu'il a lui aussi des sentiments, lui qui semble être impénétrable et impertrubable ; et lui aussi a son lot de tourment qui vient avec. en l'occurence, plus les temps avancent, et plus il semble se rendre compte que les battements de son coeur en sa présence sont trop exagérés et trop évidents. trop risqués. il se rend compte petit à petit que non, il ne peut pas continuer comme ça, à se contenter de l'aimer éperdument sans rien attendre de sa part, à soupirer d'émoi lorsqu'il lui accorde de l'attention, lorsqu'il l'invite à passer du temps ensemble. parce que sa passion risque de s'emballer, de déraper. et il a peur qu'un jour, son ami ne comprenne le fond de son coeur, qu'il prenne ses distances. dans son amour, il a trop peur de perdre leur amitié.

il fait nuit noire et il est impossible de dire l'heure qu'il est, lorsqu'après s'être une énième fois retourné dans son lit sans que le sommeil ne vienne, il soupire et décide de se lever. peut-être qu'aller faire quelques pas, manger ou boire quelque chose, l'aidera à trouver le sommeil ? c'est avec cet espoir qu'il se décide à sortir du lit pour aller dans la cuisine ; mais à peine a-t-il franchi le seuil de sa porte qu'une voix l'interpelle, le faisant sursauter. ses grands yeux surpris se posent sur son colocataire - évidemment, ça ne pouvait être que lui - après qu'il lui ai ordonné de retourner se coucher. "j'arrivais pas à dormir." il justifie, et il ne ment pas ; malgré son air fatigué, il ne ressemble pas à quelqu'un qui vient de se réveiller, mais bien à quelqu'un qui cherche à trouver le sommeil depuis des heures. "tu viens de rentrer ? il est qu'elle heure ?" il interroge en ouvrant le frigo pour se servir un simple verre d'eau, avant de s'avancer vers son ainé. peut-être que parler un peu, juste quelques mots, l'aidera à s'endormir ensuite... s'il parvient à se concentrer sur les mots de son aîné, plutôt que sur ce qui lui tourmente la cervelle.

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