Hidden crossroad ft*  @Lee Ash

Deux fois par an, un grand évènement animait le petit magasin de fruits et légumes de Seo-gu nord, un grand chamboulement, faisant valser les cartons et cagettes multicolores devant l’enseigne. Ce moment particulier était l’occasion de faire un grand rangement, un nettoyage de fond en comble et toujours de partir à la recherche de cette légère odeur, piquante, qui était là depuis des années entre les rayons et que l’on n’avait jamais réussi à débusquer.
Munseo pour l’occasion s’était paré d’un masque qu’il avait positionné sur son visage afin de ne pas se faire agresser par la poussière de sa propre boutique. Ajumma était parti déposer un tas de cartons chez monsieur Pyo, au moins il n’aurait pas à se déplacer jusqu’ici pour être le premier sur les lieux.
Armé de son balai, le vendeur de fruits et légume passait un énième coup vigoureux, il lui semblait qu’il y avait toujours la même quantité de poussière à faire sortir, à croire que ses deux précédentes tentatives n’avaient servi à rien. Tant pis, c’était la dernière fois qu’il le ferait, il avait encore bien des choses à remettre dans le petit magasin, à commencer par les fruits et légumes qui s’étalaient dans leurs boîtes tout le long de la rue.
C’était une chose plus ardue qu’on ne le croirait que d’être un vendeur dans un petit magasin.
Alors qu’il était à la moitié de sa tache biannuelle et qu’il prenait quelques secondes de pose pour reprendre son souffle, le coréen entendit une voix légère comme une brindille qui s’élève dans le vent.
Se retournant, surprit, Munseo se retrouva face à une étrange vision qu’il mit quelques secondes à éclaircir tant les formes et tailles lui parurent étranges. Il ne s’agissait pas d’une poire brune géante, mais bien d’une jeune fille, portant sur son dos un lourd fardeau dont les dimensions rappelèrent celles d’un instrument. A la voir lui adresser la parole, le Park se dit qu’elle devait avoir à peu près l’âge de Munbyul.
« Ici ? » Munseo pointa le sol de son doigt alors qu’il répondait à la question par une autre question.
« ah oui… Ici, c’est Seo-gu, nord, Juganggongwon-ro ! » Il y avait une pointe de fierté dans sa voix lorsqu’il prononçait le nom de sa rue. Il faut dire qu’elle n’était pas la mieux indiqué sur une carte, ni la plus connue, mais elle avait beaucoup d’histoire et cela en soit en faisait une fierté.
« Vous ne me dérangez pas ! Il y a beaucoup de chats dans le quartier, je ne vous conseil pas de tous les suivre, sinon qui sait chez qui vous allez atterrir ! »
Le léger sourire de Munseo se voulait rassurant, la pauvre avait l’air véritablement perdue. Ce quartier voyait peu de nouveaux visages, épargné par les avancées technologiques de la Silicon Valley, il y n’y avait guère que les touristes armés de leurs appareils photos qui venaient parfois chercher ici, une authenticité réelle ou présumée de ce que représente la Corée dans leurs pensées dans ces ruelles.
« Vous allez-où comme ça ? Je peux peut-être vous aider ? » Munseo pointa du menton l’étonnant paquetage de l’inconnue et se fendit d’un demi-sourire en dardant ses yeux bruns sur elle.

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Dans l’air, une légère poussière soupoudrée du polen qui avait survécu aux fortes pluies de ces derniers jours, venait se poser sur les peaux légèrement tannées de l’été. Munseo pouvait sentir ses joues le tirer légèrement, alors qu’il se trouvait pourtant dans l’une des ruelles les plus à l’ombre du quartier. La devanture du magasin donnait sur la route principale de laquelle on pouvait apercevoir presque tout Busan. Parfois, il se posait devant la porte et se disait qu’il était le roi de la montagne du monde. C’était comme ça qu’il voyait les choses depuis qu’il était tout petit. Il faut dire qu’il n’avait jamais vu grand-chose d’autre que la Corée, et plus particulièrement il ne s’était jamais intéressé à grand-chose d’autre que Busan. Il n’avait pas l’esprit de voyage, ni même la curiosité pour. Tous le monde ne pouvait être vagabond et se perdre dans ses rêveries. Il faut bien des gens qui ont les deux pieds dans leurs racines aussi.
La ruelle qui longeait le côté gauche du magasin était légèrement en pente et ombragée. C’était là que le vendeur de légume et la petite musicienne se trouvaient actuellement. Ils se faisait face. Munseo ne pouvait retenir un sourire. Les mots semblaient sortir dans le désordre de la bouche hésitante à demander de l’assistance.
Ça pour connaître ce quartier, il le connaissait.

« Oui. Je connais bien ici. C’est pas un endroit très fréquenté. » C’était peu de le dire. Ce quartier était ignoré par toute une partie de Busan, et c’était tant mieux aux yeux de nombre d’habitantes et d’habitants.
Un violoncelle ! Pour une raison ou une autre, Munseo fut d’un coup très impressionné. Lui n’avait jamais eu aucun talent artistique quel qu’il soit. Mais il se retrouvait plus ou moins entourés de gens aux capacité d’entrainement et d’apprentissage extraordinaire. Lui sa vie c’était de s’occuper du quartier, son seul art était celui de la médiation. Un art qui ne nécessitait pas vraiment d’outils en réalité.

« Oh ! Bien sûr. Attendez ici un instant. » Il ne fallut qu’une fraction de seconde au jeune vendeur pour disparaitre et revenir avec une chaise en plastique verte après la requête de la jeune fille. Il n’avait fait qu’acquiescer à tous ce qu’elle lui avait dit. Oui il habitait ici, c’était son chez lui et oui, il allait lui offrir l’hospitalité. Se poser à l’intérieur du magasin ne serait pas une mince affaire, et la légère brise était agréable. Alors autant qu’ils restent dehors, il n’y aurait pas besoin de passage de toute façon vu l’heure.
Tendant la chaise à la jeune femme il tendit son bras libre en offrande pour qu’elle lui décharge son instrument afin qu’il le range contre le mur adjacent à la porte du magasin.

« Vous ne me dérangez pas. J’étais en train de nettoyer. Vous voulez une pêche ? Elles sont très bonne cette saison. Regardez, prenez-en une dans la cagette à côté de vous. C’est offert par la maison. Vous n’en trouverez pas deux des comme ça à Busan, vous pouvez me croire. »

Munseo était très fier de la qualité des pêches cette saison. Il y en avait eu peu par rapport aux autres années mais elles étaient particulièrement juteuses et sucrées, tout ce qu’il fallait pour se remettre d’une longue marche.
Alors qu’il tirait une cagette pour s’asseoir dessus et accompagner la jeune fille de son repos un chat au pelage roux sortie de nulle part et vient ronronner paisiblement entre leurs jambes en faisant de grands cercles.

« Vous avez été adoptée à ce que je vois. Celui là n’est pas un chat très aimable habituellement. Aux faites, je suis Park Munseo. Je suis le vendeur de fruits et légumes du quartier Seo-gu nord. » Baissant légèrement la tête, présumant qu’il était plus âgé que la jeune fille, il retira ses tongs et s’assit en tailleurs sur sa cagette avec la plus grande des décontractions.

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Le magasin de fruit et légume se laissait doucement baigné par la lumière à mesure que la terre tournoyait autour du soleil. Il y avait là des étagères qui en avait fini d’être poussiéreuses pour quelques semaines, des bocaux, des sacs en plastiques accrochés à des petits clous dans le mur, des affiches défraichis et des chaises en skie gris limer jusqu’à la mousse. C’était le petit royaume de Munseo. La télévision dans la réserve lui avait servi de distraction pendant toutes ses années de collège et de lysée lorsqu’il attendait ses parents aux côtés de sa grand-mère. Car pourquoi faire ses devoirs en avance quand on peut récupérer l’attention et les remontrances de sa mère dès le début de soirée ?

Une chose à comprendre de Munseo était qu’il n’avait jamais été féru de prendre des initiatives par lui-même. Son rythme de vie avait, et ce depuis toujours ou presque, été imposé par l’extérieur. C’était ainsi qu’il s’était construit et c’était ainsi qu’il était devenu. La jeune femme croqua dans la pêche et le regard ainsi que l’exclamation confirmèrent à Munseo son avis sur ses pêches. Vraiment elles étaient excellentes cette année, mais beaucoup moins nombreuses que les mangues ça c’était pour sûr, le prix s’en faisait ressentir, mais il n’allait pas faire payer cette pauvre jeune fille qui avait le mérite au moins de lui donner une bonne raison pour arrêter son ménage.

Lee Ash… le nom sonnait étrangement aux oreilles du vendeur de fruits et légumes, il n’arrivait pas à dire pourquoi, mais ça lui semblait bien éloigné du coréen qu’il connaissait, et qu’il parlait, sans compter le dialecte de Seo-gu qui lui était encore plus spécial et qui lui avait aussi fait hériter d’un nom bien peu commun. Mais c’était le nom donné à tous les fils aînés. Il avait un oncle, décédé qui avait eu le même nom, celui que son père avait alors décidé de donner à son fils. Sa sœur avait un peu plus gâté, au moins les hangeul utilisés ne pouvaient pas être lus de trois manières différentes.

« Oui c’est un bon quartier, les gens sont sympathiques. » Le coréen ne savait pas trop quoi dire il était impressionné par la manière dont son interlocutrice était capable de passer d’un sujet à un autre en presque une fraction de seconde, une énergie qu’il était certain de ne pas pouvoir dépenser de son côté.

« Non non pas besoin, je vous promets moi aussi j’ai besoin d’un peu de repos. Allons nous pouvons restez assis là encore un instant. » Munseo leva le bras et l’agitât dans l’air pour signifier à Ash qu’elle pouvait tout à fait rester assise et que ce n’était vraiment pas un problème. Son ventre se mit à gargouiller soudainement et comme s’il n’avait pas remarqué que cela venait de lui il regarda d’une manière accusatrice le chat qui lui rendit son regard. C’est alors qu’il mit une main sur son ventre d’un air gêné en esquissant un demi-sourire.

« Désolé, je n’ai pas mangé de la journée, je ne sais même pas l’heure qu’il est… mon ventre a du vous entendre parler des pâtisseries et maintenant il réclame. C’est vraiment dommage que vous n’habitiez pas le quartier… en plus les loyez ne sont pas cher ici… par contre le bus ne passe que toutes les heures de 6h à 22h, et on a un seul passage piétons connecté. Haha. »

Munseo rit de manière feinte, au fond il aimait se décalage avec le reste de Busan, ça lui permettait de se sentir chez lui dès qu’il arrivait aux portes du quartier nord, cette nette différence était reposante en quelque sorte, elle lui apportait du réconfort.

« Comme vous l’avez dit, c’est mignon ici. Et ce magasin… ah… lui il est dans la famille depuis des génération, c’est pour ça qu’on en prend soin, et que les pêches sont si bonnes, on sait d’où viennent nos produits, de l’autre côté de Busan, c’est de là que vient le producteur, c’est que du local et de saison vous savez ! »

Munseo attrapât son téléphone qui se trouvait dans la poche de son short et y chercha quelque chose un instant avant de le tendre à Ash.

« Tenez regardez, ça c’est la plantation de carotte. C’est joli n’est-ce pas ? » Sur l’image rien de spéciale, plusieurs allées de fanes de carottes, bien rangées les unes derrière les autres, sous un ciel partiellement couvert. Le vendeur de fruit et légume aimait bien recevoir ce genre de photographies, c’était son petite conversation avec sa productrice, elle lui envoyait ce genre d’images pour le tenir au courant ; pour sur Munseo était bien inconscient et se fichait sciemment de ce que pouvait penser les gens de savoir que son téléphone était principalement remplit d’images de plans de légumes et de screenshot de prescriptions médicale qu’il allait chercher pour les habitant.e.s du quartier dans le centre-ville.

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L’air était étrangement léger, comme une brise fraiche à parler de sa passion des légumes, de sa passion des gens aussi, car c’est par là que tout se passait, nourrir les gens. Munseo en oubliait de se nourrir lui-même. Heureusement qu’ajumma veillait sur lui, et les autres personnes âgées du quartier, et son gang, toujours prompte à quelques matinées à manger des ramyeon en attendant que la mousson ne passe. C’était comme vivre dans un de ces vieux films un peu lent que vos tantes aiment tellement, de vivre ici à Seo-gu.
Le maraicher montrait ses photographies favorites, en acquiesçant de la tête, il avait en réalité très envie de pâtisseries maintenant et pour ajouter à sa faim sa jeune interlocutrice lui parlât de fleurs de courges. Il adorait les fleurs de courges, en plus la couleur était rayonnante dans l’assiette, ça sentait le printemps et la joie de vivre quand on en faisait quelques centaines pour les anniversaires du quartier. Un véritable bonheur.
Le ventre de Munseo gargouilla et il vit le visage de la musicienne fait une moue contrite qu’il balayât d’un mouvement de main un peu gêné devant son visage.

« Non, non ne vous en faites pas, je mangerais du ragout d’os ce soir et ça ira tout de suite mieux. »

Réfléchissant un instant il se rappela que les fleurs ne faisaient pas parti des aliments les plus recherchés dans ce quartier. Sans conteste le grand vainqueur restait le chou chinois avec sa belle couleur vert clair.
Une grimace arrachât le coréen à sa contemplation. Il remit son téléphone dans sa poche et secoua vivement la tête de mécontentement.

« Non pas les oignons… je n’aime pas vraiment ça… C’est une longue histoire. Mais pas très intéressante. » restant renfrogné, Munseo ne put d’empêcher de montrer sa moue de dégout, un traumatisme certain l’attachait à la mémoire  d’une bonne centaine d’oignons éplucher. Il fallait changer de sujet, et ça tombait bien, il avait encore beaucoup de choses à dire sur les fruits et les légumes, puisqu'on lui posait la question.

« Je peux vous recommander les fânes de carottes en hiver, il faut les faire en soupe, c’est plein de vitamines, peu de gens savent qu’ils peuvent manger les feuilles de la carotte mais c’est très bon. Il y a aussi la courge au four en automne. Du chou toute l’année, ça c’est une valeur sur le chou, surtout si vous le conserver en kimchi. Mais l’odeur peut être dérangeante quand on habite dans un petit appartement. Ici on ne s’en fait pas, ça sent toujours un peu la marinade partout. »

Munseo se fendit d’un petit rire en se grattant l’arrière de la tête. Il aimait beaucoup trop le kimchi, parfois il fallait le résonner, surtout lorsqu’il buvait, il était capable de s’en remplir la pense sans même le remarquer, ne laissant que quelques miettes à ses invités.

« Si vous voulez des fruits et légumes frais, nous livrons vous savez ! Après c’est toujours plus agréable de choisir les fruits et légumes soit même, pour la taille et la quantité, mais si vous habitez trop loin, vous pouvez nous appeler. Nous avons un téléphone, enfin… c’est mon téléphone en faite… »

Affichant un regard bienveillant, le vendeur de Seo-gu se leva et allât dans la boutique, il à peine quelques secondes plus tard avec un calepin, un stylo et une petite bouteille d’eau.

« On est un peu vieux jeu ici, alors si vous voulez, vous pouvez écrire vos coordonnées ici, comme ça si vous m’envoyer un message je peux venir vous livrer à la bonne adresse. Sinon, ça sera à vous de déménager ici ! »

Tendant la bouteille d’eau à la jeune fille, il posa le calepin et le stylo sur l’une des caisses près de lui et se rassit tranquillement en attrapant une pêche à son tour et en croquant dedans. Heureusement qu’ajumma n’était pas à la maison pour le voir manger la marchandise, elle rouspèterait pour sûr ! Mais le garçon considérait que c’était son valeureux salaire pour avoir fait tant d’efforts depuis la matinée.

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« Aaah… vous parlez vraiment vite vous savez ! » Munseo ne pu se retenir, laissant à la fois son souffle amusé sortir de sa bouche avec un sourire et à la fois sa tête se pencher vers l’avant avec un léger rire. Il releva la tête vers la jeune fille, un sourire s’étalant sur ses lèvres minces dévoilant des petites dents blanches qu’il avait la chance d’avoir bien alignées. Oh, elles n’avaient pas toujours été comme ça et comme quasiment tous les enfants coréens il avait eu le loisir de porter l’un de ses appareils qui vous arrache l’intérieur des lèvres. Pas qu’il s’en était particulièrement plains. D’une manière générale Munseo ne se plaignait pas de grand-chose. Il n’était ni plus costaud que la moyenne, ni plus faible que le commun des mortels, alors pourquoi se plaindre.

« Vous n’avez pas besoin de m’apporter à manger vous savez. Mais c’est très gentil… aaaah j’aimerai que ma sœur soit aussi gentille. Elle vous ressemble un peu d’ailleurs. Vous avez une énergie…similaire. Ou peut-être que c’est parce que vous êtes presque du même âge je suppose. »

Gardant un œil sur la jeune fille il se mit à réfléchir un instant. Cela ne lui avait jamais vraiment parut important jusqu’alors, mais cette génération, celle qui arrivait juste après lui, semblait bien plus diverse que la sienne. Ils étaient soit des moulins à parole soit des tombes. Il avait exactement le même panel dans le quartier, à une échelle plus réduite, mais du moins c’est ce qu’il pouvait observer de sa position. Aussi… Ils étaient soit complément collé à leurs téléphones, soient ils suivaient des chats et se perdaient dans des ruelles. Quel genre de gens allaient-ils devenir ?
Le vendeur de fruits et légumes se fichait bien d’avoir un avis sur la question. Il n’était pas du genre à être nostalgique d’un passé qu’il n’avait pas connu et il n’était pas non plus du genre à faire des plans sur la comète.
Lui se remontait les coudes et travaillait, cela l’occupait suffisamment en plus de toutes ses activités. Il n’avait pas donc pas à s’en faire plus que cela pour l’avenir de la Corée, après tout, ce pays avait toujours été un peu bancale, il ne fallait pas être devin pour s’en rendre compte. Même si l’image lisse donnée à l’internationale depuis plusieurs années faisait qu’il y avait toujours une forme de pression sur la population pour ressembler à un idéale inatteignable.

« Ne partez pas maintenant. Puisque vous êtes dans le quartier… vous devriez monter jusqu’au temple et observer la fin de l’après-midi depuis là-haut. La vue est magnifique. La plus belle vue sur la baie de Busan. Attends-je dois avoir une photo. »

Cette fois-ci Munseo ne sorti pas son téléphone, il entra dans la boutique et décrochât du mur une carte postale un peu jaunis. Une des dernières imprimées qui fut prise depuis les hauteurs. Il l’avait trouvé lorsqu’il était étudiant et avait voulu l’envoyer à Munbyul, sa sœur, mais entre temps il était tombé sur une carte postale avec une vache dansant le disco dessus et il avait finalement décidé de lui envoyée cette dernière. Alors il avait ramené la carte postale à ajumma pour qu’elle décore le magasin. Ajumma adorait les cartes postales et les accrocher des choses aux murs. Dommage qu’elle aime moins faire les poussières car la plupart de ses affiches finissaient jaunes et à peine visible sous une épaisse couche grise si Munseo ne faisait rien pour arranger ça.

« Tenez, regardez. » dit-il en tendant la carte à la jeune fille. Dessus figurait une vue plongeante de Busan prolongé par une vue sur la mer sur laquelle le soleil se couchait. Le tout était baigné d’une belle couleur jaune pâle de fin de journée. Lorsque le temps était beau comme aujourd’hui, on pouvait même distinguer les ferries revenant ou partant vers le Japon. C’était somme toute magique.

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Un léger picotement dans la plissure de l’œil fit frotter le doigt du maraicher sur sa paupière. La poussière avait dû s’y déposer, rappel à l’ordre de la lourde tâche qui l’incombait de devoir ranger, trier, jeter et ranger encore. C’était comme ça la vie dans les endroits où la machine n’avait pas encore fait son œuvre de grand remplacement, c’était comme ça ici. Entre deux dialectes presque perdus et des origines parfois lointaines, on continuait de faire vivre ce qui restait de l’ancienne vie coréenne du haut de cette montagne devenue bien industriel au-dessus d’un port tout modernisé.
Munseo sourit en entendant les paroles de la jeune femme. Elle était franche, elle avait l’air sincère et elle n’était pas facile à attraper entre deux sourires, ses paroles s’échappaient comme l’eau coule entre les doigts.
Elle filait, d’idée en idée. Mais elle restait là face à l’inconnu qu’il était lui prêtant sa confiance le temps de la discussion. Il s’en sentait touché, pas que c’était rare qu’on le trouve attachant, peu de personnes à Seo-gu aurait la capacité de dire quoi que ce soit de méchant, et même ce bougon de Chin Ho n’avait jamais vraiment rien de méchant sur lui dans son dos, préférant garder son impolitesse sous le nez du Park. Non ce qui le touchait là particulièrement c’était la teneur particulière et sans prétention de la conversation. Munseo partageait un bout de ce qu’il aimait le plus, ce quartier ; et la jeune fille lui apportait de la joie et de la gentillesse, le troc avait fière allure t il ne regrettait pas d’y avoir ajouté une pêche dans la balance.

« Je peux vous y emmener, mais je dois encore tout ranger et cela risque de me prendre un peu de temps. »

Se rendant compte que la formulation de sa phrase pouvait sonner quelque peu expéditive, voir même qu’il pourrait sous-entendre qu’il voulait se débarrasser d’elle, le jeune vendeur de fruits et légumes s’empressa de rajouter.

« Mais vous pouvez rester, bien sûr ! On ne sait jamais quand on revient dans un quartier dans lequel on s’est perdu n’est-ce pas ? »

Avançant un peu dans la rue, Munseo tendit le bras vers une enseigne aux teintes marrons et oranges, caractéristiques d’une chaîne de café que l’on pouvait trouver un peu partout par ici.

« Vous voyez ici, il y a un café vous pouvez y aller et je pourrais venir vous chercher, ou encore là-bas … »

Cette fois-ci il pointa une enseigne bleue et dorée qui se trouvait plus en contre bas vers l’arrête de bus.

« … C’est un restaurant sino-coréen très apprécié, si vous avez envie de manger quelque chose, vous pouvez dire que vous venez de ma part. »

Un peu gêner de désigner ainsi son quartier sans pouvoir le faire visiter lui-même, Munseo soupira en posant les mains sur ses hanches et en observant son propre étale.

« Dommage que vous soyez arrivé aujourd’hui, je trimballe tellement de poussière ça pourrait tacher vos vêtements, sinon vous auriez pu profiter du ventilateur dans le magasin en attendant la fermeture. Mais je dois fermer le ventilateur pour passer correctement le balai. »

Le magasin de fruits et légumes n’avait pas fière allure, presque entièrement caché sous les cagettes et cartons aux couleurs diverses, mais il se tenait là, comme la pierre angulaire du quartier. Le guide, passeur de mémoire et infatigable amoureux de l’endroit qu’était Munseo ne pouvait s’empêcher de faire els choses correctement pour ce magasin qui représentait aujourd’hui à la fois son mode de vie et son gagne-pain.

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Regarder le monde avec un œil bienveillant. Ainsi devait-il en être entre les cartons poussiéreux et les légumes soyeux de la boutique. C’est ainsi qu’il vivait la majorité du temps sans vraiment s’en faire, flegmatique et jamais impatient. Voici un vendeur bien aimable pouvait-on se dire. Pourtant parfois il pouvait se montrer enthousiaste, voir même autoritaire, mais jamais dans l’excès. Ça non, l’excès ce n’était pas vraiment son truc à lui. Lui il aimait les choses simples, parce qu’en réalité on n’est jamais mieux servi d’aventures que par le quotidien.
Munseo se mit à sourire. La jeune fille se tenait là, pleine d’enthousiasme elle aussi, un peu surexcitée comme si elle venait de découvrir une boîte pleine de chocolat et cela qui fit chaud au cœur, que l’on puisse tant apprécier le quartier que lui-même aimait d’un amour qu’il ne partageait avec aucun être sur terre. Lui qui jamais ne s’était véritablement tombé amoureux, n’avait ressentit aucun souffle d’attirance pour qui que ce soit, lui qui ne voyait pas vraiment d’intérêt aux relations, c’était ce quartier qui remplissait son cœur en vérité. Peut-être était-ce pour cela qu’il ne faisait qu’y revenir. Finissant par cesser de lutter contre lui-même, il s’était réinstallé ici définitivement et c’était très bien comme ça.

« Ah ! Je serais bien content de vous montrer oui, mas pas besoin de m’aider, mon travail est mon travail. Vous devriez profiter de la vue plutôt. » En disant ces mots il pointa la ruelle qui leur faisait face et menait à un toit surplombant une partie de la l’aval qui découvrait la ville et ses gratte-ciels, vu d’ici, c’étaient à peine des grattes nuages en vérité.

« Vous savez. Quand on vient à Seo-gu une fois, on se sent obligé d’y revenir. Demandez à n’importe qui ici, personne n’arrive vraiment à en partir définitivement. » En disant cela, le maraicher ne se rendait certainement pas compte que cela sonnait comme une malédiction, lui qui ne voyait le verre que toujours « avec de l’eau », ni à moitié vite, ni à moitié plein, juste là, portant son eau. Il n’était ni superstitieux, ni négatif, ni positif, il était juste factuel. Une fois à Seo-gu on ne pouvait se dépêtrer de l’attraction de ce quartier que difficilement.

« Vraiment ? Vous voulez dix pêches ? » Les yeux de Munseo s’écarquillèrent surprit avant d’afficher un air malicieux, il était persuadé qu’une jeune fille comme elle ne pourrait tout manger avant que les pêches ne murissent trop. Elle devait avoir une idée derrière la tête ; et il n’avait pas envie de demander laquelle. Une envie de confiture, de tarte, de sorbet ? Mille et une merveilles pouvaient être faites avec une dizaine de pêches. Munseo sorti un sache et commença à y déposer les pêches avant de les mettre prêt de l’instrument de musique de la jeune fille.

« Voilà ! Elles sont à vous, laissez tout ça ici et allez profiter de la rue, on verra plus tard pour le payement. Je peux garder vos affaires en attendant, comme ça vous n’aura pas à remonter la rue avec ça sur les épaules. »

Le vendeur remit sa casquette sur son front et l’enfonçât bien sur ses oreilles. Il était prêt pour terminer son travail de la journée, requinqué qu’avait été cette rencontre.

« Par contre faites attention, ne suivez pas tous les chats du quartiers cette fois ci. » Se permit-il de prévenir avant de prendre dans ses bras une pile entière de caisses de légumes en plastiques vides qu’il s’apprêtait à remettre dans la remise qu’il avait balayé un peu plus tôt.

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Le temps avait caressé de sa main cet après-midi. Laissant tomber la lumière et faisant vibrer les nuages vers de nouveaux lendemain. Munseo se sentait léger, ravi aussi d’avoir fait une nouvelle rencontre. Lui qui pourtant était un grand introverti, il avait une passion pour la simplicité qui le faisait apprécier les petites choses, les petites rencontres surtout, même lorsqu’elles portaient de gros instruments sur le dos.

Le visage de la jeune fille lui était devenu familier malgré le peu de temps qu’ils avaient passé ensemble. Sa voix lui resterait en tête, lui et sa mémoire qui ne lui faisait jamais défaut, l’une des rares qualité qu’il connaissait de lui-même.

Prenant le temps d’aider la jeune fille à passer l’instrument sur ses épaules, il l’a salua avec respect et acquiesça à ses remarques d’une petite onomatopée joyeuse, lèvres serrées en un grand sourire tendis qu’il gardait ses mains respectueusement serrées devant lui. Il avait beau être plus âgé, il était vendeur et il savait très bien que l’apparence et le relationnel était important dans son métier. Certes il n’était pas le meilleur pour s’habiller ou donner la meilleure première impression, mais il était plutôt doué pour se faire apprécier finalement.

Observant la jeune fille et son éclectique charment Munseo eu un sourire. Elle dégageait cette joie de vivre qu’il aurait aimé voir sur tous les visages du quartier, cette joie de vivre un peu contagieuse pour laquelle il œuvrait comme il le pouvait, faisant toujours de son mieux. En se penchant encore à nouveau, toujours sourire aux lèvres il s’écria.

« Revenez quand vous le voulez, vous serez toujours la bienvenue au magasin ! »

La ruelle semblait s’assombrir à mesure que la demoiselle s’en allait, tenant fièrement les pèches avec elle. Les cagettes elles n’avaient pas bougée et il fallait bien faire quelque chose pour les ranger. Elles n’allaient pas le faire toutes seules et Munseo savait que son ajumma finirait bien par rentrer, ainsi que Munbyul … il ne voulait leur rajouter de travail ni à l’une ni à l’autre et préférait largement partager un bon repas avec les deux femmes devant la télévision plutôt que de finir ce pénible rangement avec elles.

Il avait promis que tout serait fait, et il allait tout faire, à commencer par repasser un grand coup de balais nécessaire et bien venue entre les allées du magasin. Ici tous le monde passait, repassait, venait et y revenait. Une fois que l’on avait gouté au plaisir simple de Seo-gu, il était difficile de l’oublier, comme le gout des dernières pêches de l’été.