ㅡ o1. ㅡ la petite province qui l’a vu naître est si rapidement laissée derrière que sieon n’en a que de vagues bribes de souvenirs. souvent, il oublie que busan n’est pas la ville où il a vu le jour, mais ça n’a pas d’importance quand c’est là qu’il a passé la majorité d’entre eux.

(tw: description de maladie et décès d’un parent, mention de guilt-tripping)
ㅡ o2. ㅡ il n’a que douze ans quand son père tombe malade d’insuffisance cardiaque – ou un truc du genre, à l’époque trop jeune pour saisir les détails de sa maladie et par la suite peu désireux de ranimer la douleur en cherchant à savoir. sieon se souvient suffisamment des crises occasionnelles pour ne pas avoir besoin de détails, des courses contre la montre pour lui donner ses médicaments puis de l’avc qui le plonge dans un état végétatif jusqu’à ce qu’il s’éteigne dans la nuit.

plus vivement que tout le reste, il se souvient du regard terrifié de sa mère pendant la dernière crise, tremblant avec indignation lorsqu’il se pose sur lui et réalise qu’il n’a pas encore trouvé les médicaments. plus tard, il se rend à l’évidence que s’il avait été plus rapide, son père n’aurait probablement pas fini ainsi. comme si c’était sa faute. sieon y croit, et il porte encore en lui la culpabilité et cette pression de ne plus jamais faillir à qui que ce soit d’autre.

(tw: mention de violence homophobe)
ㅡ o3. ㅡ ce qui est indubitablement la relation la plus importante de sa vie se développe à cette période. amitié salvatrice à une époque marquée par la peur et l’incertitude, les sentiments bourgeonnent au fil du temps et sieon découvre pour la première fois jusqu’où les battements de son cœur peuvent aller. milan est la plus belle chose qui lui soit arrivée, une fleur au milieu des débris – même si c’est vers ses propres ruines qu’il finit par l’entraîner.

les yeux du père de milan tremblent de haine chaque fois qu’ils se posent sur eux et milan en fait souvent les frais. sieon est conscient que son amant ne peut pas tenir tête, alors quand la main est levée sur lui une énième fois il s’interpose, donne des coups et en encaisse à son tour. du coin de ses yeux enragés il cherche milan, quémande autant son approbation que son soutien. seulement, il ne voit que son regard qui baisse et, à cet instant, la réalisation est écrasante : il ne pourra jamais rien faire pour lui.

ils se séparent quelques jours plus tard, décision de sieon qui ne peut supporter la culpabilité qu’engendre sa propre impuissance.

(tw: mention de maladie et décès d’un parent)
ㅡ o4. ㅡ sieon ne pourrait pas dire à quand remonte la dernière fois qu’il a été réellement heureux.
comme une malédiction qui plane au-dessus de la famille, c’est au tour de sa mère de tomber malade et il s’attribue le devoir de veiller sur elle. chaque soirée et chaque week-end est passé à son chevet, qu’importe la longue heure de route qu’il lui faut pour se rendre du campus à la maison. sa vie sociale est délaissée pour sa responsabilité et l’épuisement s’accumule lui aussi jusqu’à ce que l’échec scolaire se fasse de plus en plus évident.

en début de l’année courante, elle rend inévitablement l’âme. sieon aurait voulu pouvoir y trouver un quelconque soulagement, autant pour elle que pour lui-même, mais elle semble être la seule à en avoir bénéficié. pour lui, tout continue d’aller mal ou peut-être pire. il se retrouve sous la garde de son frère aîné qui, dépassé par ses propres dépenses et responsabilités de père de famille, lui renvoie souvent l’impression de n’être qu’un fardeau. l’anxiété de l’avenir le rattrape plus vite qu’il ne peut compenser son retard et en fin de compte demeure une seule constante indéniable : il n’a plus rien ni personne.




ㅡ o5. ㅡ le cadet tranquille, peu exigent et facile à satisfaire. il n’a jamais rien demandé, ni d’activités parascolaires ni d’études supérieures prestigieuses, rien de ces choses qui, à ses yeux de gamin, étaient réservées à son grand frère. on l’a toujours trouvé simple d’esprit et facile à satisfaire, lui reprochant parfois même un manque d’ambition, pourtant, sieon veut le monde. il ne connaît pas la modération, il désire et aime sans restreintes ; tout de lui est libre des moindres limites, souvent à l’excès. et quand bien même il a intériorisé l’idée de ne rien mériter de ce qu’il désire, il ne cesse jamais de le poursuivre – ni d’offrir tout son amour et sa bonté même quand il ne reçoit rien en échange.

ㅡ o6. ㅡ ses habitudes de consommation ont légèrement empiré depuis le décès de sa mère. il a commencé à fumer, troque parfois ses cigarettes contre des joints et boit plus que la moyenne, un verre ou une bouteille souvent suspendus à la main pour l’aider à s’assoupir sans agonie. sieon n’est pas fier de cette dépendance, encore moins des mauvaises décisions qu’elle lui fait parfois prendre, mais ce n’est rien à côté de ce qu’il lui arriverait s’il ne se servait pas des vices comme secours.

ㅡ o7. ㅡ les revers ne l’ont jamais réellement découragé. que ce soit par entêtement ou purement par rancune, sieon a la manie de se relever après chaque échec, encore plus prêt à remonter la pente et s’assurer qu’il ne retombera plus jamais. le sourire demeure figé sur ses lèvres en toutes circonstances, l’esprit toujours léger et l’humeur facile – pas pour fuir une quelconque réalité, mais simplement car il brille d’un éclat impossible à obscurcir. sa résilience et son obstination à persévérer sont sa plus grande qualité et la seule chose qui l’aide à tenir – seulement, il les sent s’épuiser petit à petit. à tenter de supporter seul tout le poids qui pèse sur ses épaules, sieon s’étiole lui aussi et il ne tient plus qu’à un fil.

ㅡ o8. ㅡ ses études en santé publique sont le résultat de son désir brûlant d’aider autrui. malgré ses airs d’idiot aux bras cassés, il se retrouve souvent à prendre subtilement soin de ses proches. son affection est discrète mais pas moins marquante et même s’il se plaint parfois quand on réclame son aide, ce n’est jamais sérieux car il est toujours présent dès qu’on a besoin de lui, même sans avoir rien demandé.