blossom

Jambes croisées, cahier sur les genoux, Noy travaillait sous les rayons de soleil et l’air frais du midi. Il n’avait pas faim et n’avait absolument aucune envie de se retrouver à déjeuner seul à la cafétéria. C’était déjà assez difficile d’être le plus jeune de sa promo, étant l’équivalent en âge, d’un premier année, se retrouvant en fin de licence. Il avait déjà déposé son projet de mémoire, validé, évidemment, autant en Thaïlande qu’ici. Il ne lui fallait plus que terminer son année tranquillement et tout ira bien. Sauf qu’il n’était pas ce que l’on pouvait appeler calme. Son moral avait baissé sans même qu’il ne s’en rende compte. Vivre seul dans un pays différent, sans amis, ayant plus l’impression de faire tâche que de réellement apporter quelque chose aux autres, était difficile. Il était doué, ce n’était pas de sa faute. Il n’y pouvait rien. Son crayon traçait les intégrales sur son cahier avec une aisance particulière. Comme à son habitude, il refaisait des exercices pour passer le temps avant son prochain cours. Lorsqu’il n’avait pas la concentration pour faire ses recherches ou encore le temps de se plonger dans son projet, il préférait s’occuper l’esprit ainsi. Certains en profitent pour sortir, discuter, aller boire un verre. Mais il n’a personne pour aller le faire. Alors, autant travailler un peu plus. Il avait passé sa vie à faire cela de toute manière.

Une voix le fit sursauter, le sortant de ses réflexions. Le petit releva les yeux vers la jeune fille qui lui demandait si elle pouvait s’asseoir. Pour seule réponse, il se décala, ne quittant sa position en tailleur, même pour lui laisser de la place. Ce banc était assez grand pour trois personnes et vraiment, Noy n’était pas l’homme avec la corpulence la plus impressionnante. Etant prêt à retourner à ses questions, il fut de nouveau pris au dépourvue par les cadeaux de sa désormais voisine de banc. Clignant des yeux plusieurs fois, il accepta le sandwich et le jus en courbant légèrement l’échine, signe de respect. Elle semblait joviale et animée. Mais ce qu’elle lui dit lui fit hausse un sourcil. Elle l’avait observé ? Mais pourquoi donc ? Il n’était rien d’autre qu’un passant dans la vie de cette jeune fille. Pourquoi irait-elle le remarquer alors qu’il y a sans doute beaucoup plus de personnes avec de l’intérêt que lui ? Il aurait pu répliquer de façon amère, mais à la place, il retint un grognement impoli, haussant les épaules.

« Je ne jeûne pas… corrigea-t-il. Je mange le matin et le soir… Je n’aime juste pas aller à la cafétéria. »

Au-delà du statu social qui ne lui plaisait pas, manger devant les autres le dérangeait par moment. Et puis, c’était beaucoup plus rafraichissant de passer un petit moment dehors qu’enfermer dans un bâtiment. Il pouvait observer le ciel bleu, les feuilles qui bougeait avec le gens, entendre les bruits de l’extérieur et non des professeurs qui déblatérait à longueur de journée. Quoi que… Ecouter la voix du professeur Park n’était pas un problème. C’était même plutôt agréable lorsqu’on pouvait allier l’ouïe et la vue. Non, mais vraiment, ce cours d’anglais n’était pas fait pour qu’il se concentre ou qu’il ne progresse. Aucun autre de ses professeurs n’était comme lui. Les prof de maths étaient souvent vieux et changeaient de sujet comme on change de chaussettes. Pas plus que ce matin, alors que son professeur discutait de domaine mathématique, il avait soudainement demandé si l’un de ses étudiants avait lu un certain auteur français, pas le moins du monde mathématicien, mais qui, selon lui « pourrait intéresser les plus curieux ». Noy était de nature curieuse. Mais il n’ira pas lire un livre français, qui plus ait, alors qu’il ne parle déjà pas totalement la langue du pays dans lequel il étudie. Soudainement, la jeune fille se présenta. Se sentant obligé de faire de même, il lui répondit.

« Noy. Mathématiques. »

Simple, concis. Il aurait pu lui sortir son nom complet, mais elle se serait enfuie en courant. Avec précaution, il commença à boire le lait de fraise. Le goût sucré le dérangea légèrement, mais plus que cela. Il en avait pris l’habitude. Au niveau du sucre, il avait l’impression d’être un homme de Cro-Magnon découvrant la civilisation. Tout ce qu’il avait mangé dans sa vie était amère, épicé, huileux et souvent, sans saveur particulière. A Bangkok, il avait compris que manger pouvait être un art. Et encore plus à Busan où la culture coréenne privilégié la nourriture par-dessus tout. Puis, il prit une bouché du sandwich, essayant de faire l’impasse sur le fait que c’était aussi sucré que le jus pour lui. Un vrai sandwich, comme ceux qu’il connait, ça n’a le goût délicat dans la bouche. Mais il ne dit rien, acceptant simplement le fait qu’elle est bien voulue lui offrir quelque chose. Une bouchée et une gorgée. C’était pas mal déjà non ?

« Merci… Hum… Pour le repas, qu’il finit par dire. C’est vraiment gentil. »

Il ne savait toujours pas pourquoi elle avait fait ça. Mais il n’allait pas s’en plaindre non plus. Elle avait pris du temps pour venir lui apporté cela. Il fallait qu’il soit un minimum poli. Par contre, il ne pouvait rien promettre si elle décidait de rester discuter avec lui…

♡ busan vibe ♡