Les pieds s'embrouillent. (Noy)

Tu ne veux pas t'attarder sur ta vie privée. Tu veux bien parler avec Noy, faire plus ample connaissance en lui offrant un verre. Après tout sans lui tu serais encore coincé dans le cordage à t’époumoner pour demander de l'aide. A manquer de t'étouffer en sentant sous tes mouvements désespérés la corde se resserrer. Alors tu lui dois bien un verre après avoir soigner ses mains. Vous pourrez parler de tout et n'importe quoi, de ton métier, de tes passions, de la pluie et du beau temps. Mais Minjun est un sujet qui reste délicat. Trop de douleur en toi quand tu repenses à ce que tu as perdu. Tu as fais le plus grosse connerie de ta vie. Et depuis tu en paies le prix. Et tu risques fort de le payer encore longtemps, parce que pardonner ce genre de geste n'est pas si facile à faire. Et vu les réactions de Noy sur le pont tu ne veux pas non plus qu'il enfonce le couteau dans la plaie. Parce qu'il a bien aimé aiguiser tes nerfs quand tu étais bloqué et que tu sollicitais son aide. Alors par prudence tu préfères passer à un autre sujet et puis comme tu lui dis gentiment il n'est pas psy pour analyser le pourquoi du comment de tes ressentis. Et pour que ce changement de conversation se fasse encore plus avec aisance tu te concentres sur ton sauveur. Il doit avoir des choses à te dire le gamin. Et il semble que tu es trouves de quoi occuper son esprit à autre chose que ton ex histoire d'amour. Tu sens le passionné quand il parle mathématique. « Je n'ai aucun doute là dessus. Et je sens toute ta motivation pour arriver à relever ce défi. » Tu ne le connais pas spécialement mais tu as déjà une petite idée vu son comportement de comment il est. En plus tu as remarqué qu'il était curieux de tout et ça aide pas mal dans ce genre de cas. Même si parfois il ne faut pas non plus pousser trop loin la curiosité. « Tu as la tête sur les épaules et l'envie de réussir s'entend dans le son de ta voix. Tu n'es pas quelqu'un qui lâche facilement prise. Et avoir un but à atteindre est une bonne chose. » Qu'importe le temps que l'on met pour y arriver. Toi ton nouveau but c'est de reconquérir celui qui fait battre ton cœur. Qui l'a toujours fait battre.

Si la conversation un temps se concentre sur Noy, une question revient vers toi, te mettant à nouveau au centre des interrogations du gamin. Tu te l'es posé cette question, surtout après ton erreur. Parce que oui si tu pouvais remonter le temps tu éviterais de coucher avec cette fille. Tu éviterais de tromper Minjun. Alors que vous vous aimiez. Tu as agi comme un idiot sur ce coup là et tu le regretteras toute ta vie. Mais on ne peut pas remonter le temps et changer le passé. Pour ta faute tu ne peux que tout faire pour être pardonner par ton ex petit ami. Et imaginer des choses qui sont impossibles à faire tu trouves ça un peu bête. « Je suis responsable de cette erreur, celle que je voudrais effacer si je le pouvais. Mais voilà je ne le peux pas car remonter le temps pour éviter l'acte qui le fait encore souffrir aujourd'hui est une chose impossible. » Et en parler ne fait que te rendre amer et t'en vouloir d'avantage. Tu as été qu'un égoïste sur cet acte. Mais Noy a un point de vu bien différent du tien. Tu sens dés le départ de sa phrase que ce qu'il va dire est intense et douloureux. Encore plus douloureux de ta tromperie. Et tu blêmis quand ses mots tombent. Tu accuses le coup car en effet le pardon dans ce cas est impossible, inenvisageable. Tout comme l'oublie. « Je suis désolé .. pour ce qu'on t'a fait subir. C'est inhumain. » Tu es sincère dans tes mots et tu trouves ce genre de comportement abject. « En effet difficile de pardonner. Ce genre de mec ne mérite que de finir écorché vif en enfer. » Tu ne supportes pas cette violence là, celle qui souille l'innocence. « Cela n'a rien à voir avec mon histoire et je comprends que tu souhaiterais remonter le temps pour dénoncer et faire payer. Mais tu peux toujours dénoncer et faire payer maintenant, même si cela ne changera pas le fait que c'est et que ça restera un acte impardonnable et marquant à vie. » Tu parles avec douceur, et tu lui ressers un verre. Tu es surpris qu'il se confie de la sorte. Ce n'est pas le genre de chose évidente à dire et encore plus à un étranger. Tu te doutes qu'il a du avoir envie de tuer celui qui avait osé et qu'il a peut être même eu envie de mettre fin à ses jours. Vivre avec ce poids, cette horreur ne doit pas être aisé.

« En effet Noy ma théorie n'est pas valable pour tout le monde. Et je comprends parfaitement que ce genre d'acte tu es envie de le faire disparaître de ton esprit. Parce que c'est gravée à jamais dans ta tête. Et je suis désolé que dans ce cas remonter dans le temps soit impossible. » Tu soupires. « Tu ne peux que vivre avec cette terrible blessure et avancer. Montrer que tu te reconstruis et que cette horreur t'a rendu plus fort. Même si c'est compliqué. Même si parfois tu veux baisser les bras. » Tu espères ne pas te montrer maladroit dans tes mots, car tu ne veux pas le blesser plus qu'il ne l'est en te parlant de cette douleur.  « Je n'ai aucune idée de tout ce que tu as du vivre et encaisser pour te sortir de l'enfer dans lequel cette histoire t'a plongé. Et je suppose que tu n'en es pas sorti totalement. » On ne sort jamais vraiment de ce genre d'horreur. Tu le regardes se servir un autre verre. « En tout cas si je peux t'aider, si sortir en mer peut te faire du bien. Je serais là. Tu peux même compter sur un endroit pour te loger et avoir un repas chaud si un jour tu en as besoin. Le MinHo te sera toujours ouvert et je serais là si je peux t'apporter mon aide. » Bien sur cette proposition ne réparera pas le mal fait alors qu'il était enfant, mais tu ne peux rester indifférent face à la souffrance qui a marqué son cœur et son corps à tout jamais. Ce n'est qu'une goutte d'eau dans cet océan d'horreur, mais elle est sincère et tu n'en attends aucune contre partie.

Les pieds s'embrouillent. (Dak Ho)

Dak Ho avait une façon étrange de le décrire. Déjà, il utilisait toujours et encore des expressions que le plus jeune ne connaissait pas. “La tête sur les épaules” ? Évidemment que sa tête était attachée à ses épaules, sinon où serait-elle ? En train de flotter ? Il fallait que Noy laisse son égo de côté et aille se renseigner sur les différentes dictons coréens. Les paupières plissées, l’étudiant regardait le pirate comme pour percer un trou dans son front, ou encore - et plus probablement - comprendre toutes les implications de sa description. “Avoir un but à atteindre" était tout ce qui le motivait dans sa vie. Ceci et la perspective de rendre le quotidien plus facile en étant honnête avec lui-même, donc, sans se restreindre lorsqu’il voulait faire ou ne pas faire quelque chose. Comme aider sans rien avoir en compensation. Noy n’était pas un bon jeune homme, serviable et généreux. S’il donnait, même un simple coup de pinceau, il fallait une récompense à la clé. Et apparemment, ça faisait de lui un mauvais personnage ? La bonne blague ! Comme s’il en avait quelque chose à faire de que les autres individus qui respiraient le même oxygène que lui avaient à penser. Il avait déjà trop de choses dans la tête pour vraiment s’occuper de ce qu’il y avait dans celle des autres.

Pourtant, cela ne l’empêche pas de poser des questions. Et l’alcool faisait son bon travail, il s’enquit d’une idée irrationnelle et irréalisable, mais qui lui tenait à cœur. Le meilleur moment fut lorsqu’il descendit tranquillement l’argument de l’homme en face de lui. Dak Ho semblait bien trop adulte pour répondre à ce genre de choses avec intérêt. Oui, bien sûr que c’était impossible, évidemment. Mais ce n’était pas la question, de savoir s’ils allaient le faire ou non. Mais bien, qu’est-ce qu’ils en auraient fait, de cette chance ? Tout le monde avait sa propre histoire, ses propres démons - pour ceux qui en avaient - mais Noy considérait toujours que ses problèmes avaient plus d’impacts que ceux des autres. Pas forcément parce qu’ils étaient plus graves ou plus importants, mais tout simplement parce qu’il s’agissait des siens. Les partager n’était pas un tabou ; c’était comme raconter une expérience. Mais il avait dû mal à s’investir dans quelque chose comme l’adultère ou les ruptures. L’amour était comme un vêtement : on pouvait le mettre autant de fois que l’on voulait, mais il finit par s’user. A vous de savoir s’il vaut mieux le garder ou non, le rapiécer ou non. C’était peut-être présomptueux de sa part, lui qui n’avait pas encore connu de passionnante histoire romantique. Comme disait l’un de ses professeurs de lycée “il n’y a que les idiots qui ne changent pas d’avis”. A tout moment, son monde pouvait être bouleversé. C’était ça, la meilleure partie du jeu.

« Je n’ai pas besoin de vos conseils ou de vos excuses, répondit-il, le regard droit dans les yeux, dead-serious. Vous parlez comme si vous saviez ce que je vis… (Un petit sourire en coin anima son visage, une étincelle de moquerie dans les yeux.) C’est un peu… Comment dire ? Arrogant ? C’est ça le mot ?  »

Son verre était plein, alors il but. La possibilité d’avoir du mal à rentrer ne l’émoustilla même pas. Ils étaient en Corée du Sud, de quoi devait-il avoir peur ? Des taré.es qui faisaient des manifestations contre VICE ? Des autres personnages avec un coup dans le nez ? Non, vraiment, que pouvait-il bien lui arriver s’il terminait son verre, là, maintenant, tout de suite, sans une goutte d’eau dans le système ? Noy restait un jeune adulte, la gueule de bois était à peine un frein, il en sera remis en moins de vingt-quatre heures. L’étourdissement se fit discret. Il était toujours assis, alors tout allait bien. Pas de quoi paniquer, absolument pas. Lorsqu’il reposa le contenant transparent, il y avait encore du rhum dedans, qui tourna mollement en attendant la prochaine rincette. Noy émit un petit rire, loin du bonheur néanmoins.

« C’est gentil, merci, avoua-t-il, avant de rire de nouveau. Et vous voulez quelque chose en échange, je pense ? En plus, j’ai un abonnement à vie maintenant ! Vous allez souvent me voir… »

Pour ponctuer sa dernière phrase, il hocha de la tête d’un air entendu, comme s’il y avait eu un contrat, qu’ils avaient signé tous les deux que maintenant, Dak Ho comme Noy étaient tenu de respecter l’accord. L’un avait un pass à vie pour un bateau fort sympathique à Busan et l’autre aura la joie et le bonheur de partager des heures durant le même espace qu’un génie. Si ce n’était pas un dessin parfait, tout ça. Pour faire bonne mesure, il termina son verre et sentit la brûlure lui descendre jusque dans l’estomac, fronçant légèrement du nez avant d’inspirer. C’était étrange, comme situation, si on se penchait réellement sur la chose. Deux hommes, dans le ventre d’un bateau, en train de boire de l’alcool, alors que quelques minutes plus tôt l’un d’eux était ficelé sur le pont et l’autre en train de le prendre en photo. Bon, en fait, en y réfléchissant, c’était plutôt logique que la journée se poursuive sur une route impétueuse. Noy éloigna par habitude le verre du bord, le rapprochant du centre de la table, avant se laisser aller contre le dossier de son siège. Il avait lu dans un article que la prise d’alcool brûlait les neurones. Pour tout, il y croyait, car cela expliquerait pourquoi l’entrée d’alcool ou tout autre addictif dans le pensionnat était aussi sévèrement puni. Et cette restriction ne lui avait que plus envie de les découvrir à l’université.

« Vous avez quelque chose de prévu, demain ? s’enquit-il en le regardant toujours, presque fasciné par le visage du pirate. Je peux rester sur le bateau ? »

Les pieds s'embrouillent. (Noy)

C'est un peu un jeu de ping pong qui s'établit en Noy et toi. Les questions s'alternent, même si tu fais tout pour détourner la discussion sur ton sauveur. Tu ne veux pas entrer dans les détails de ta vie privée. Et puis parler de Minjun est toujours compliqué, parce que ça réveille ta douleur et cela rend ta bêtise encore plus imposante. Et tu veux aller de l'avant, rester positif pour pouvoir le reconquérir, même si tu sais que rien ne sera simple. Tu essaies de cerner le jeune homme qui te fait face, parce que c'est vrai que vu son comportement sur le pont tu as eu envie de l'étrangler pas mal de fois. Mais là tu le découvres un peu plus. Voyant en lui une personne qui sait ce qu'il veut. Une personne qui s'est fixé une ligne de conduite et qui veut si tenir, même si rien n'est évident. Il t'apparaît comme réfléchi et sincère. Même si sur le pont par moment tu as eu la sensation d'avoir à faire à un gamin qui s'amusait de la situation. Là il change, même si les barrières de la langue viennent parfois faire écho, bloquant la compréhension. Faut dire que tu parles vite et tu devrais aussi réfléchir sur les expressions que tu emploies vu le regard que Noy pose sur toi, certaines ne doivent pas être claires. Mais tu restes prêt à lui expliquer s'il a un problème et que tes paroles sont plus floues que claires. L'alcool ne doit pas non plus l'aider à concentrer son esprit sur ce que tu lui dis. Par moment il semble en colère ou outré par rapport à tes réponses. Ou alors tu ne saisis pas tout non plus, bousculé par la fatigue de ta journée, de ta soirée et le taux d'alcool qui s'invite à chaque verre dans ton sang. Même si tu tiens bien la route et que tu es habitué à descendre des bouteilles. Encore plus depuis ta rupture avec Minjun, car l'alcool a souvent été une échappatoire à ton chagrin.

Par moment tu as la sensation de te perdre dans ses raisonnements et ses questionnements. Pour toi les choses sont logiques, parce que impossibles. Remonter le temps pour changer le cours des événements c'est infaisable, alors pourquoi se demander ce que l'on changerait ? En tout cas Noy démonte pièce à pièce tes arguments. Toi tu restes là à le regarder pensif et interloqué. Il doit avoir un don pour retourner le cerveau des gens, tu as bien remarqué avant qu'il te délivre qu'il avait une drôle de manière de fonctionner. Et là avec le discours qu'il te dit, tu as une nouvelle fois ce ressenti. Vous n'avez pas la même vision des choses, ce qui est normal en soit, pas la même éducation, pas la même vie, pas les mêmes souffrances. Pas les mêmes raisons de vouloir remonter le temps pour changer les choses. Pas la même manière de voir l'amour, les conséquences des actes. Mais ce qu'il dit se tient. Et ses aveux te troublent et te bouleversent, Noy parle sans détour de cet acte horrible qu'il a subi. Un acte abjecte et contre lequel tu es révolté. Tu es peut être un salopard, mais jamais tu ne ferais ce genre de chose. Et tu lui apportes ton soutien, enfin tu essaies car il se rebelle. Tu restes un peu con face à ses mots. « Tu te méprends aucune arrogance dans ma réponse. Et en effet je ne sais pas ce que tu vis. Et jamais je ne pourrais le savoir. Mais je me doute que c'est difficile et que cela risque de le rester. Et je ne voulais pas te froisser, juste t'apporter mon soutien. Enfin pas grave, la fatigue et l'alcool n'aident peut être pas à la bonne compréhension des choses. » Et tu ne veux pas prendre le risque en débattant un peu plus sur la question que tout s’envenime. Surtout que vous continuez à enchaîner les verres de rhum. Tu le sens paumé, faut dire qu'il y a de quoi, étranger dans ce pays et avec un si lourd bagage. Même s'il a un but, rien ne doit être évident au quotidien. Alors tu lui assures qu'il pourra trouver à tout moment refuge sur ton voilier. Que ce lieu que tu chéris pourrait être son havre de paix dans ses moments de tourmente. Une manière de s'éloigner de la rudesse de la vie, pour n'en ressentir que la caresse, même si elle est éphémère. « Non je ne te demande rien en échange. Mon bateau a souvent été une terre d'asile, certaines des personnes sont restées et font à présent parties de mon équipage, d'autres ont juste eu besoin de cette parenthèse pour souffler avant de reprendre leur vie. » Tu souris. « En effet et j'espère que cela ne sera plus dans de telle circonstance. » Et là tu ris, une façon aussi de détendre l’atmosphère car la discussion n'a pas été toujours simple ce soir. Et tu veux que Noy comprenne que tu ne le juges pas, que tu ne lui en veux pas. Tu lui tends la main et tu n'attends rien de spécial en retour. A part des moments de partage s'il veut en offrir.

Et vos verres se remplissent encore, faisant descendre la bouteille. Il est certain que tu n'oublieras pas cette soirée. Demain tu feras bien rire ton équipage si tu leurs racontes cette péripétie. Tu sais même que tes hommes la remettront sur le tapi un bout de temps, surtout quand tu rangeras les cordages. Mais si tu ne leurs dis rien, Noy s'en chargera sûrement, vu qu'il va également croiser les marins qui bossent avec toi. Surtout selon les moments où il viendra à bord. Tu te mets à imaginer les réactions de chacun, avant de te concentrer à nouveau sur ton invité qui semble doucement sombrer dans les dédales de l'alcool. Il n'est pas ivre, mais tu te doutes que son cerveau s'embrume des vapeurs et s'y noie doucement. Il semble à son aise et tu détailles un peu plus ses traits. Cette jeunesse marquée à jamais des horreurs que les adultes savent distiller comme du poison. Tu espères pour lui qu'un jour il trouvera la paix. « Oui dans l'après midi, une sortie avec deux couples qui veulent plonger au large. Un couple d'habitués qui amène deux amis. Pourquoi ? » Si tu l'observes un peu plus il en fait de même en retour. « Tu pourras venir avec nous si tu veux et si tu n'as rien de prévu. Et bien sur que tu peux rester sur le bateau. De toute manière dans ton état je ne suis pas certain que tu retrouves le chemin de chez toi. » Tu souris. « Je vais te préparer une cabine. » Et tu t'éloignes pour aller arranger une cabine. Bon elles sont toujours en ordre, c'est juste histoire de vérifier qu'il n'y manque rien. Puis tu retournes vers Noy. « Aller viens je te montre tes quartiers. » Tu lui montres la cabine où il va pouvoir s'installer. Tu as réaménagés au moment des travaux, certaines cabines. Pas que tu cherchais à faire du MinHo un voilier de luxe, mais juste pour offrir aux clients qui passent quelques jours en mer tout le confort. L'ensemble garde le charme du bois et ne dénature pas le style du bateau. Le hublot donne une vue direct sur l'horizon. La mer y danse se mariant au ciel. Quatre couchages une personne, un coin pour ranger quelques affaires, et une salle d'eau. Assez intime pour que Noy soit tranquille et au calme. « Tu peux choisir le lit que tu veux. Et tu as tout dans la salle  d'eau si tu veux te doucher. » Serviettes et produits étant mis à disposition. « Repose toi, on se voit demain. » Et tu le laisses s'installer tranquillement. Tu remontes sur le pont et tu te poses un instant dans ton hamac les yeux perdus sur l'horizon, le cœur vagabond, l'âme éprise d'une seule pensée Minjun. Tu fermes les yeux et tu te laisses aller, bercer par les mouvements et le bruits de l'eau. Moment de paix que tu voudrais partager avec celui que tu as blessé. Et oui si tu pouvais remonter le temps tu ne commettrait pas la même erreur. Jamais tu tromperais Minjun.

Les pieds s'embrouillent. (Dak Ho)

De nouveau, il ne comprit pas la totalité de son discours. Mais Noy capta le message, ce qui était le plus important. Ce bateau, ce “MinHo”, pouvait devenir un refuge, un endroit où fuir les journées trop difficiles, trop épuisantes, trop contraignantes. Dak Ho était un type bien, il n’y avait pas à dire, même si Noy gardait contre lui un certain regard : celui d’un homme maladroit et tempétueux. Car il ne lui avait pas fallu longtemps avant qu’il ne craque et dévoile son tempérament, tandis que Noy touchait au bouton de ses émotions avec dextérité. Comme la mer, l’océan vaste, Dak Ho possédait des visages intriguants. Le plus jeune se contenta d’hocher la tête, comprenant bien que la discussion s'éterniserait s’il relevait des nouvelles questions qui obtiendrait les mêmes réponses. La journée touchait à sa fin, il était temps, peut-être de songer à quitter la cale pour remonter sur le pont et repartir vers d’autres aventures. Pourtant, il lui était difficile d’imaginer se lever maintenant, alors que le rhum imbibait son sang, embrumait son esprit, lui faisait dire des choses qu’il n’aurait sans doute jamais révéler si ce n’était pour l’inconnu et l’alcool. Noy avait, sans le vouloir, saisit la main que le pirate lui avait tendu métaphoriquement, y trouvant une place qu’il n’avait jamais imaginé vouloir. Aimer la mer et ses vagues n’était pas ce que l’on pouvait qualifier de forgeron d’amitié. Pourtant, ils étaient là, à voguer côte à côte, pour la soirée, en attendant de trouver terre promise des naufragés.

Curieux de savoir ce que programmait le lendemain, Noy attendit sa réponse, penchant la tête sur le côté en l’écoutant. Il savait qu’il lui était impossible de rentrer dans cet état. Il ne voulait pas retourner dans son appartement étudiant. Il ne voulait pas faire le chemin seul. Ses yeux s’arrêtèrent sur Dak Ho. Il pouvait rester ; un poids quitta ses épaules, son estomac et ses jambes. Un sourire vient même animer son visage, supplantant son expression toujours plus détachée. Il avait appuyé sur un sujet difficile, voulant étrangement savoir ce qui composait la vie de Dak Ho, avant d’abandonner en se rendant compte que, même pour n’importe quel discours, il ne lui expliquera rien. Il n’osa rien lui dire, si ce n’est un « merci » en le voyant quitter la pièce pour lui préparer une chambre. Le temps qu’il ne revienne, Noy était debout, se préparant à passer la nuit dans un endroit qu’il ne connaissait pas. Jetant un coup d'œil à son téléphone, il se rendit rapidement compte qu’il devrait bientôt le charger s’il voulait avoir son réveil demain matin. La cabine était bien organisée, oubliant le spacieux pour le confort et Noy s’en moquait bien. Il s’assit sur la première couchette qu’il trouva, déposant son sac à côté de lui. Puis il leva les yeux vers Dak Ho. Un instant, il contempla l’idée de lui répondre banalement. Mais trop tard, son sourire ravit ses yeux.

« Merci ! »

La seule chose qu’il fit avant de s’allonger et de fermer les yeux fut de mettre en charge son téléphone sur la table de chevet. Aussitôt la tête sur l’oreille, il bascula. Et se réveilla au son de son réveil. Tapotant sur l’écran, il sortit de sa nuit sans rêve rapidement, roulant agilement hors du lit. Aujourd’hui était une nouvelle journée, il n’avait pas mal à la tête, il avait fait une nouvelle rencontre, avait gagné un accès à un voilier à vie. Le soleil était à peine levé. Noy était prêt à affronter la vie. Alors, sans cérémonie, il alla réveiller Dak Ho, espérant que ce dernier avait passé une bonne nuit - faux, il s’en moquait bien, mais c’était pour faire bonne mesure - afin de le déranger pour quelques heures supplémentaires. Peut-être que le plus farouche des deux n’était pas le pirate, mais bien la petite créature venant d’un pays lointain. Noy voulait bien être l’acolyte qui emmerdait le monde, si cela lui donnait la possibilité de faire ce qu’il voulait sur ce bateau. Son sourire pourra ravir les cœurs de l’équipage mais ses remarques lui attireront sans doute les foudres. Mais comment résister, lorsqu’il y avait tellement de raisons de rire et de s’amuser ?